Texte | Pour faire diversion à nos promenades dans Naples, nous résolûmes, Jadin et moi, de tenter quelques excursions dans ses environs. Des fenêtres de notre hôtel nous apercevions le tombeau de Virgile et la grotte de Pouzzoles. Au delà de cette grotte, que Sénèque appelle une longue prison, était le monde inconnu des féeries antiques; l'Averne, l'Achéron, le Styx; puis, s'il faut en croire Properce, Baïa, la cité de perdition, la ville luxurieuse, qui, plus sûrement et plus vite que toute autre ville, conduisait aux sombres et infernaux royaumes. Nous prîmes en main notre Virgile, notre Suétone et notre Tacite; nous montâmes dans notre corricolo, et comme notre cocher nous demandait où il devait nous conduire, nous lui répondîmes tranquillement: – Aux enfers. Notre cocher partit au galop. C'est à l'entrée de la grotte de Pouzzoles qu'est situé le tombeau présumé de Virgile. On monte au tombeau du poète par un sentier tout couvert de ronces et d'épines: c'est une ruine pittoresque que surmonte un chêne vert, dont les racines l'enveloppent comme les serres d'un aigle. Autrefois, disait-on, à la place de ce chêne était un laurier gigantesque qui y avait poussé tout seul. A la mort du Dante, le laurier mourut. Pétrarque en planta un second qui vécut jusqu'à Sannazar. Puis enfin Casimir Delavigne en planta un troisième qui ne reprit même pas de bouture. Ce n'était pas la faute de l'auteur des Messéniennes, la terre était épuisée. On descend au tombeau par un escalier à demi ruiné, entre les marches duquel poussent de grosses touffes de myrtes; puis on arrive à la porte columbarium, on en franchit le seuil et l'on se trouve dans le sanctuaire. L'urne qui contenait les cendres de Virgile y resta, assure-t-on, jusqu'au quatorzième siècle. Un jour on l'enleva sous prétexte de la mettre en sûreté: depuis ce jour elle n'a plus reparu. Après un instant d'exploration intérieure, Jadin sortit pour faire un croquis du monument et me laissa seul dans le tombeau. Alors mes regards se reportèrent naturellement en arrière, et j'essayai de me faire une idée bien précise de Virgile et de ce monde antique au milieu duquel il vivait. Virgile était né à Andes, près de Mantoue, le 15 octobre de l'an 70 avant Jésus-Christ, c'est-à-dire lorsque César avait trente ans; et il était mort à Brindes, en Calabre, le 22 septembre de l'an 19, c'est-à-dire lorsque Auguste en avait quarante-trois. Il avait connu Cicéron, Caton d'Utique, Pompée, Brutus, Cassius, Antoine et Lépide; il était l'ami de Mécène, de Salluste, de Cornélius Nepos, de Catulle et d'Horace. Il fut le maître de Properce d'Ovide et de Tibulle, qui naquirent tous trois comme il finissait ses Géorgiques. Il avait vu tout ce qui s'était passé dans cette période, c'est-à-dire les plus grands événements du monde antique: la chute de Pompée, la mort de César, l'avènement d'Octave, la rupture du triumvirat; il avait vu Caton déchirant ses entrailles, il avait vu Brutus se jetant sur son épée, il avait vu Pharsale, il avait vu Philippes, il devait voir Actium. Beaucoup ont comparé ce siècle à notre dix-septième siècle; rien n'y ressemblait moins cependant: Auguste avait bien plus de Louis-Philippe que de Louis XIV. Louis XIV était un grand roi, Auguste fut un grand politique. […] Voilà l'homme [i. e. Auguste] qui protégea vingt ans Virgile; voilà le prince à la table duquel il s'assit une fois par semaine avec Horace, Mécène, Salluste, Pollion et Agrippa; voilà le dieu qui lui fit ce doux repos vanté par Tityre, et en reconnaissance duquel l'amant d'Amaryllis promet de faire couler incessamment le sang de ses agneaux. En effet, le talent doux, gracieux et mélancolique du cygne de Mantoue devait plaire essentiellement au collègue d'Antoine et de Lépide. Robespierre, cet autre Octave d'un autre temps, ce proscripteur en perruque poudrée à la maréchale, en gilet de basin et en habit bleu-barbeau, à qui heureusement ou malheureusement (la question n'est pas encore jugée) on n'a point laissé le temps de se montrer sous sa double face, adorait les Lettres à Émilie sur la mythologie, les Poésies du cardinal de Bernis et les Gaillardises du chevalier de Boufflers; les Iambes de Barbier lui eussent donné des syncopes, et les drames d'Hugo des attaques de nerfs. C'est que, quoi qu'on en ait dit, la littérature n'est jamais l'expression de l'époque, mais tout au contraire, et si l'on peut se servir de ce mot, sa palinodie. Au milieu des grandes débauches de la régence et de Louis XV, qu'applaudit-on au théâtre? Les petits drames musqués de Marivaux. Au milieu des sanglantes orgies de la révolution, quels sont les poètes à la mode? Colin-d'Harleville, Demoustier, Fabre-d'Églantine, Legouvé et le chevalier de Bertin. Pendant cette grande ère napoléonienne, quelles sont les étoiles qui scintillent au ciel impérial? M. de Fontanes, Picard, Andrieux, Baour-Lormian, Luce de Lancival, Parny. Chateaubriand passe pour un rêveur, et Lemercier pour un fou; on raille le Génie du christianisme, on siffle Pinto. C'est que l'homme est fait pour deux existences simultanées, l'une positive et matérielle, l'autre intellectuelle et idéale. Quand sa vie matérielle est calme, sa vie idéale a besoin d'agitation; quand sa vie positive est agitée, sa vie intellectuelle a besoin de repos. Si toute la journée on a vu passer les charrettes des proscripteurs, que ces proscripteurs s'appellent Sylla ou Cromwell, Octave ou Robespierre, on a besoin le soir de sensations douces qui fassent oublier les émotions terribles de la matinée. C'est le flacon parfumé que les femmes romaines respiraient en sortant du cirque; c'est la couronne de roses que Néron se faisait apporter après avoir vu brûler Rome. Si, au contraire, la journée s'est passée dans une longue paix, il faut à notre cœur, qui craint de s'engourdir dans une languissante tranquillité, des émotions factices pour remplacer les émotions réelles, des douleurs imaginaires pour tenir lieu des souffrances positives. Ainsi, après cette suprême bataille de Philippes, où le génie républicain vient de succomber sous le géant impérial; après cette lutte d'Hercule et d'Antée qui a ébranlé le monde, que fait Virgile? Il polit sa première églogue. Quelle grande pensée le poursuit dans ce grand bouleversement? Celle de pauvres bergers qui, ne pouvant payer les contributions successivement imposées par Brutus et par César, sont obligés de quitter leurs doux champs et leur belle patrie: Nos patriae fines et dulcia linquimus arva; Nos patriam fugimus. De pauvres colons qui émigrent, les uns chez l'Africain brûlé, les autres dans la froide Scythie. At nos hinc alii sitientes ibimus Afros; Pars Scythiam... Celle de pauvres pasteurs enfin, pleurant, non pas la liberté perdue, non pas les lares d'argile faisant place aux pénates d'or, non pas la sainte pudeur républicaine se voilant le front à la vue des futures débauches impériales dont César a donné le prospectus; mais qui regrettent de ne plus chanter, couchés dans un antre vert, en regardant leurs chèvres vagabondes brouter le cytise fleuri et l'amer feuillage du saule. ... Viridi projectus in antro. ............................... Carmina nulla canam; non, me pascente, capellae, Florentem cytisum et salices carpetis amaras. Mais peut-être est-ce une préoccupation du poète, peut-être cette imagination qu'on a appelée la Folle du logis, et qu'on devrait bien plutôt nommer la Maîtresse de la maison, était-elle momentanément tournée aux douleurs champêtres et aux plaintes bucoliques; peut-être les grands événemens qui vont se succéder vont-ils arracher le poète à ses préoccupations bocagères. Voici venir Actium; voici l'Orient qui se soulève une fois encore contre l'Occident; voici le naturalisme et le spiritualisme aux prises; voici le jour enfin qui décidera entre le polythéisme et le christianisme. Que fait Virgile, que fait l'ami du vainqueur, que fait le prince des poètes latins? Il chante le pasteur Aristée, il chante des abeilles perdues, il chante une mère consolant son fils de ce que ses ruches sont désertes, et n'ayant rien de plus à demander à Apollon, comment avec le sang d'un taureau on peut faire de nouveaux essaims. Et que l'on ne croie pas que nous cotons au hasard et que nous prenons une époque pour une autre, car Virgile, comme s'il craignait qu'on ne l'accusât de se mêler des choses publiques autrement que pour louer César, prend lui-même le soin de nous dire à quelle époque il chante. C'est lorsque César pousse la gloire de ses armes jusqu'à l'Euphrate. .... Caesar dùm magnus ad altum Fulminat Euphraten bello, victorque volentes Per populos dat jura, viamque affectat Olympo. Mais aussi que César ferme le temple de Janus, qu'Auguste pour la seconde fois rende la paix au monde, alors Virgile devient belliqueux; alors le poète bucolique embouche la trompette guerrière, alors le chantre de Palémon et d'Aristée va dire les combats du héros qui, parti des bords de Troie, toucha le premier les rives de l'Italie; il racontera Hector traîné neuf fois par Achille autour des murs de Pergame, qu'il enveloppe neuf fois d'un sillon de sang; il montrera le vieux Priam égorgé à la vue de ses filles, et tombant au pied de l'autel domestique en maudissant ses divinités impuissantes qui n'ont su protéger ni le royaume ni le roi. Et autant Auguste l'a aimé pour ses chants pacifiques pendant la guerre, autant il l'aimera pour ses chants belliqueux pendant la paix. Ainsi, quand Virgile mourra à Brindes, Auguste ordonnera-t-il en pleurant que ses cendres soient transportées à Naples, dont il savait que son poète favori avait affectionné le séjour. Peut-être même Auguste était-il venu dans ce tombeau, où je venais à mon tour, et s'était-il adossé à ce même endroit où, adossé moi-même, je venais de voir passer devant mes yeux toute cette gigantesque histoire. Et voilà cependant l'illusion qu'un malheureux savant voulait m'enlever en me disant que ce n'était peut-être pas là le tombeau de Virgile! | | Source | Alexandre Dumas (père), Le corricolo, "Deuxième partie", "III. Le Tombeau de Virgile" Portrait, entre 1860 et 1870 Source: Prints and Photographs Division, Library of Congress Biographie en résumé | Alexandre Davy de La Pailleterie Dumas, dit Dumas. Illustre auteur dramatique et romancier français, fils du général Alexandre Dumas, né à Villiers-Cotterets (Aisne) le 5 thermidor an X (24 juillet 1802), mort à Puys, près de Dieppe, le 5 décembre 1870. "Héros des guerres de la Révolution et de l'expédition d'Egypte, son père, fils d'un marquis normand et d'une esclave de Saint-Domingue, meurt, alors que le jeune Alexandre n'a que quatre ans. Des centaines de livres, des milliers de personnages et des millions de mots ne viendront jamais combler la cruelle absence de celui dont la figure héroïque hantera toute son oeuvre. De son propre aveu, Alexandre Dumas ne guérira jamais de "cette vieille et éternelle douleur de la mort de son père." Fils de mulâtre, sang mêlé de bleu et de noir, Alexandre Dumas doit alors affronter les regards d'une société française qui, pour ne plus être une société d'Ancien Régime, demeure encore une société de castes. Elle lui fera grief de tout : son teint bistre, ses cheveux crépus, à quoi trop de caricaturistes de l'époque voudront le réduire, sa folle prodigalité aussi. Certains de ses contemporains iront même jusqu'à lui contester la paternité d'une oeuvre étourdissante et son inépuisable fécondité littéraire qui tient du prodige. De tout cela, Dumas n'aura que faire. Force de la littérature, force de la nature, comme son héros Porthos qu'il aimait tant, il choisit de vivre sa vie. Cette vie foisonnante, luxuriante, parfois criarde, jamais mesquine, tout entière habitée par une généreuse lumière." (Jacques Chirac, Discours prononcé à l'occasion du transfert des cendres d'Alexandre Dumas au Panthéon, 30 novembre 2002) Voir aussi cette brève biographie Vie et œuvre | Les divers épisodes de la vie de Dumas ont été tant de fois contés par lui-même ou par d’autres jusque dans leurs moindres détails qu’il suffirait de résumer brièvement les principales circonstances de cette existence si prodigieusement active, ainsi que les grandes œuvres qui en marquent les étapes, puis de grouper, dans l’ordre chronologique, et par leur nature même, les autres écrits de Dumas, dont la paternité lui a été contestée, ou ceux-là même qu’on pourrait, de son propre aveu, retrancher de son avoir. (...) Restée veuve en 1806 et réduite aux modiques ressources que lui concédait le titre de son mari, Mme Dumas ne put faire donner au fils issu de cette union qu’une éducation extrêmement sommaire et incomplète. L’enfant tenait, par contre, de son père, une constitution athlétique, une aptitude naturelle à tous les exercices du corps et une santé robuste. Les premiers chapitres de ses Mémoires renferment de nombreuses preuves de ce triple privilège, dont Dumas se montre presque aussi fier que de ses dons intellectuels et qui favorisèrent singulièrement les frasques de son adolescence, longuement contées aux mêmes pages. D’abord clerc d’avoué à Villers-Cotterets, puis à Crépy-sur-Oise, il vint en 1823 à Paris solliciter l’appui des anciens compagnons d’armes de son père, ralliés, pour la plupart, à la Restauration. Éconduit de divers côtés, il ne fut accueilli avec bienveillance que par un membre de l’opposition, le général Foy qui, aussi frappé de ses talents de calligraphe qu’affligé de son ignorance, lui procura une place d’expéditionnaire dans les bureaux de la chancellerie du duc d’Orléans. Le jeune homme, qui se proposait bien un jour de vivre de sa plume, se trouva néanmoins fort heureux de devoir à son écriture un traitement de 1200 fr. qui lui permettait de ne plus être à la charge de sa mère et lui laissait assez de loisirs pour apprendre tout ce qu’il ne savait pas et nommément l’histoire de France. Bientôt il osa faire imprimer ses premiers essais : une Élégie sur la mort du général Foy (1825, in-8); un dithyrambe en l’honneur de Canaris (1826, in-12) et un petit volume de Nouvelles contemporaines (1826, in-12). En même temps, il collaborait à deux vaudevilles, La Chasse et l’Amour (Ambigu-Comique, 22 septembre 1825) et La Noce et l’Enterrement (Porte Saint-Martin, 21 novembre 1826), tous deux signés Davy et dont il partagea les minces profits avec son camarade de jeunesse, Adolphe de Ribbing (de Leuven), James Rousseau, Lassagne et Gustave Vulpian. D’autres tentatives dramatiques plus sérieuses, tirées de la conjuration de Fiesque ou de l’épisode des Gracques, demeurèrent alors inédites, tandis qu’un passage d’Anquetil lui inspirait le drame d’où datent ses véritables débuts : Henri III et sa cour (cinq actes, en prose), représenté sur le Théâtre-Français le 11 février 1829, et demeuré depuis au répertoire (*), lui valut de véritables ovations; le duc d’Orléans, bien que fort peu sympathique à son subordonné, ne dédaigna pas de donner lui-même le signal des applaudissements et le nomma bibliothécaire adjoint aux appointements annuels de 1500 fr. Alexandre Dumas avait écrit avant Henri III un autre drame reçu dès le 30 avril 1828 par le comité du même théâtre et dont diverses circonstances avaient fait ajourner la représentation : ce drame, c’était Christine ou plutôt, pour lui donner le titre sous lequel il fut définitivement joué à l’Odéon le 30 mars 1830, Stockholm, Fontainebleau et Rome, trilogie en cinq actes et en vers, avec prologue et épilogue. Son succès ne fut pas moins vif que celui de Henri III, et Dumas se vit dès lors considéré comme l’émule de Victor Hugo; mais cette rivalité n’avait pas encore altéré leurs bons rapports personnels. Convié par Hugo à une lecture de Marion Delorme, alors arrêtée par la censure, il avoua hautement son admiration; de son côté, dit-on, Victor Hugo aurait, aidé d’Alfred de Vigny, retouché une centaine de vers de Christine, mal accueillis le soir de la première représentation. Dumas avait depuis quelques mois dit pour toujours adieu à la vie administrative et travaillait à plusieurs drames lorsque éclata la révolution de 1830. Il fit le coup de feu parmi les insurgés et, sur l’ordre de La Fayette, se rendit en hâte à Soissons où, avec le concours de quelques habitants, il protégea une importante poudrière et en assura la possession au parti vainqueur. Puis il partit pour la Vendée avec mission d’y provoquer la formation d’une garde nationale chargée de défendre le pays contre une nouvelle chouannerie que tout pouvait faire craindre. Admis au retour à faire connaître au roi lui-même son impression sur l’état des esprits, Dumas ne lui dissimula pas combien le remède lui semblait dangereux et insista sur la nécessité d’ouvrir à travers le Bocage et le Marais des voies de communication qui rendraient plus difficile la guerre civile qu’on redoutait. Bien que le second de ses conseils ait été suivi plus tard, le résultat de l’enquête ne raffermit point le crédit de Dumas auprès de Louis-Philippe; son élection de capitaine dans l’artillerie de la garde nationale parisienne, devenue l’un des foyers de l’opposition à la monarchie du 9 août, une visite intempestive aux Tuileries avec l’uniforme de ce corps supprimé par décret la veille même, le refus de prestation de serment exigé pour la remise du brevet et des insignes de la croix de Juillet, la présence de Dumas aux obsèques du général Lamarque, prélude des journées des 5 et 6 juin 1832, tels sont les principaux épisodes de cette période de politique militante à laquelle, par bonheur, Dumas ne tarda pas à renoncer, mais qu’il fallait rappeler sommairement ici. Une violente passion conçue pour Mme Mélanie Waldor (fille de Villenave), et à laquelle celle-ci, mariée à un officier, ne pouvait légalement répondre, inspira à Dumas ce drame où, sous le nom d’Antony, il s’est peint lui-même, a-t-il dit, «moins l’assassinat» et où il a peint, sous le nom d’Adèle Hervey, la maîtresse adorée, «moins la fuite», et qui, merveilleusement interprété par Bocage et Mme Dorval (Porte-Saint-Martin, 3 mai 1831), obtint alors une centaine de représentations. En 1834, il fut question de le transporter à la Comédie-Française, mais un article du Constitutionnel le dénonça comme immoral; l’interdiction, alors prononcée par le ministre de l’intérieur, fut levée seulement à la fin du second Empire, et de nos jours (*) Antony a repris sa place dans la série des matinées classiques organisées par l’Odéon. De 1831 à 1843, et sans préjudice des autres œuvres qui seront rappelées plus loin, Dumas occupa les diverses scènes de Paris avec les pièces suivantes: Napoléon Bonaparte ou Trente Ans de l’histoire de France, drame en six actes (Odéon, 10 janvier 1831), écrit en huit jours chez Harel qui retenait l’auteur en chartre privée; Charles VII chez ses grands vassaux, tragédie en cinq actes (Odéon, 20 octobre 1831), mal accueillie du public, malgré des beautés de premier ordre; Richard Darlington, drame en trois actes et en prose avec un prologue (Porte-Saint-Martin, 10 décembre 1831), dû à la collaboration de Beudin et de Goubaux qui en avaient fourni à Dumas l’idée première, empruntée aux Chroniques de la Canongate de Walter Scott, et où Frédérick Lemaître déploya un talent prodigieux; Térésa, drame en cinq actes (Opéra-Comique, Théâtre-Ventadour, 6 février 1832) dont le scénario primitif était d’Anicet-Bourgeois; Le Mari de la Veuve, comédie en un acte et en prose (Théâtre-Français, 4 avril 1832), avec la collaboration d’Anicet-Bourgeois et de Durrieu qui ne furent point nommés sur le titre de la brochure; La Tour de Nesle, drame en cinq actes et neuf tableaux (29 mai 1832), l’un des succès les plus retentissants et les plus prolongés du théâtre contemporain (*), mais qui souleva entre Frédéric Gaillardet, auteur du texte primitif, Jules Janin qui l’avait retouché et Dumas qui avait presque entièrement récrit la pièce, une polémique terminée par un duel avec le premier et par un procès; Catherine Howard, drame en cinq actes (Porte-Saint-Martin, 2 avril 1834), tiré par Dumas d’un autre drame resté inédit et intitulé Edith aux longs cheveux; Angèle, drame en cinq actes (Porte-Saint-Martin, 28 décembre 1833), avec la collaboration d’Anicet-Bourgeois; Don Juan de Maraña ou la Chute d’un ange, mystère en cinq actes, musique de Paccini (Porte-Saint-Martin, 30 avril 1836), imité en partie des Ames du Purgatoire de Prosper Mérimée; Kean, comédie en cinq actes et en prose (Variétés, 31 août 1836), autre grand succès de Frédérick Lemaître qui se renouvela plus tard à l’Ambigu et à la Porte-Saint-Martin; Piquillo, opéra-comique en trois actes avec Gérard de Nerval, musique de Monpou (Opéra-Comique, 31 octobre 1837); Caligula, tragédie en cinq actes et en vers avec prologue (Théâtre-Français, 26 décembre 1837), dont la chute rappela celle de Charles VII et n’est pas mieux justifiée; Paul Jones, drame en cinq actes (Panthéon, 8 octobre 1838), représenté contre le gré de l’auteur qui avait laissé le manuscrit à l’agence dramatique Porcher en nantissement d’un prêt; Mademoiselle de Belle-Isle, drame en cinq actes et en prose (Théâtre-Français, 2 avril 1839), resté au répertoire; L’Alchimiste, drame en cinq actes en vers (Renaissance, 10 avril 1839), auquel, s elon Quérard, Gérard de Nerval et Cordellier-Delanoue auraient collaboré; Bathilde, drame en trois actes et en prose (salle Ventadour, 14 janvier 1839), avec Auguste Maquet (seul nommé sur l’affiche et sur la brochure) et Cordellier-Delanoue; Un Mariage sous Louis XV, comédie en cinq actes, avec Leuven et Brunswick (Théâtre-Français, 1er juin 1841), restée aussi au répertoire (*); Lorenzino, drame en cinq actes et en prose, avec les mêmes collaborateurs (Théâtre-Français, 24 février 1842); Halifax, comédie en trois actes en prose avec prologue (Variétés, 2 décembre 1842); Les Demoiselles de Saint-Cyr, comédie en cinq actes et en prose, avec Leuven et Brunswick (Théâtre-Français, 25 juillet 1843), qui provoqua entre le principal auteur et Jules Janin une polémique violente et qui, mal accueillie le soir de la première représentation, trouva un peu plus tard et garda le succès dont elle était digne; Louise Bernard, drame en cinq actes et en prose, avec Leuven et Brunswick (Porte-Saint-Martin, 18 novembre 1843); Le Laird de Dumbicky, comédie en cinq actes et en prose, avec les mêmes (Odéon, 30 décembre 1843); Le Garde forestier, comédie en deux actes en prose avec les mêmes (Variétés, 15 mars 1845). En dépit de sa longueur, cette liste ne renferme que les pièces signées par Dumas, avouées par lui ou réimprimées dans les deux éditions collectives de son Théâtre (1834-1836, 6 vol. in-8, ou 1863-1874, 15 vol. in-12), mais non celles qu’il tira de la plupart de ses romans. Il nous faut maintenant revenir en arrière et rappeler les titres des principaux récits qui ont tour à tour distrait, ému ou charmé deux ou trois générations et qui se subdivisent en impressions de voyages, en romans et en chroniques historiques. Dumas a lui-même raconté comment, après l’insurrection de juin 1832 et une atteinte de choléra, dont il se ressentit d’ailleurs une partie de sa vie, les médecins et ses amis lui conseillèrent de quitter Paris durant quelques mois. De cette première excursion à travers la Bourgogne et la Suisse datent ces fameuses Impressions de voyage qui forment l’une des parties les plus attrayantes de son œuvre et qui ont si légitimement contribué à sa popularité. Ce sont, dans l’ordre chronologique: Impressions de voyage [en Suisse] (1833, 5 vol. in-8); Excursions sur les bords du Rhin (1841, 3 vol. in-8); Une année à Florence (1840, 2 vol. in-8); Nouvelles impressions de voyage [Midi de la France] (1841, 3 vol. in-8); Le Speronare (1842, 4 vol. in-8), voyage en Sicile avec le peintre Jadin et son bouledogue Mylord; Le Corricolo (1843, 4 vol. in-8); et La Villa Palmieri (1843, 2 vol. in-8), relatifs au même séjour dans le sud de l’Italie; De Paris à Cadix (1848, 5 vol. in-8); Le Véloce ou Tanger, Alger et Tunis (1848, 4 vol. in-8) qui forme la suite du précédent; Le Caucase (1859, in-4); De Paris à Astrakan (1860, 3 vol. in-12), réimpr. sous le titre collectif de : En Russie. À cette série se rattachent, sans en faire cependant partie : l’ouvrage intitulé Quinze jours au Sinaï (1839, 2 vol. in-8), rédigé sur les notes du peintre Dauzats, ainsi que L’Arabie heureuse, pèlerinage d’Hadji-Abd-el-Hamid-Bey [Du Couret] (1855, 6 vol. in-8, ou 1860, 3 vol. in-8); Les Baleiniers, journal d’un voyage aux Antipodes par le Dr Félix Maynard (1861, 2 vol. in-12) et le Journal de Mme Giovanni à Taïti, aux îles Marquises et en Californie (1855, 4 vol. in-8), présentés comme revus et mis en ordre par Alex. Dumas, sans que sa collaboration soit parfaitement établie. C’est par de courtes nouvelles que débuta le romancier qui devait entreprendre et mener à leur fin les plus longues et les plus captivantes inventions de la littérature moderne. Le Cocher de cabriolet, Blanche de Beaulieu (déjà publiée dans les Nouvelles contemporaines), Cherubino et Celestini, Antonio, Maria, et Le Bal masqué, Jacques Ier et Jacques II ont été réimprimés sous le titre de Souvenirs d’Antony (1835, in-8); Pauline et Pascal Bruno ont reçu le titre collectif de La Salle d’armes (1838, 2 vol. in-8). Viennent ensuite des œuvres de plus longue haleine : Le Capitaine Paul (1838, 2 vol. in-8), dont, si l’on en juge par un ex-dono de Dumas, l’idée première appartiendrait à Dauzats; Acté, suivi de Monseigneur Gaston de Phebus (1839, 2 vol. in-8); Aventures de John Davy (1840, 4 vol. in-8); Le Capitaine Pamphile (1840, 2 vol. in-8); Maître Adam le Calabrais (1840, in-8); Othon l’Archer (1840, in-8); Aventures de Lyderic (1842, in-8); Praxède, suivi de Don Martin de Freytas et de Pierre le Cruel (1841, in-8); Georges (1843, 3 vol. in-8), dont, selon Mirecourt, Félicien Malefille aurait pu revendiquer la paternité; Ascanio (1843, 5 vol. in-8), sur lequel, toujours d’après le même pamphlétaire, M. Paul Meurice aurait pu faire valoir les mêmes droits; Le Chevalier d’Harmental (1843, 4 vol. in-8), d’où date l’alliance intime, féconde et hautement avouée par le premier, de Dumas et de Maquet à laquelle on a dû successivement : Sylvandire (1844, 3 vol. in-8); Les Trois Mousquetaires (1844, 8 vol. in-8), le plus amusant et le plus célèbre des romans de cape et d’épée et ses deux suites dignes de leur aîné : Vingt ans après (1845, 10 vol. in-8) et Dix ans plus tard ou le Vicomte de Bragelonne (1848-1850, 26 vol. in-8); Le Comte de Monte-Cristo (184-1845, 12 vol in-8), dont Fiorentino réclamait une part formellement niée par Dumas et restée inconnue à Maquet; Une Fille du Régent (1845, 4 vol. in-8); La Reine Margot (1845, 6 vol. in-8); La Guerre des femmes (1845-1846, 8 vol. in-8); Le Chevalier de Maison-Rouge (1846, 6 vol. in-8); La Dame de Monsoreau (1846, 8 vol. in-8); Le Bâtard de Mauléon (1846, 9 vol. in-8); Mémoire d’un médecin (1846-1848, 19 vol. in-8) et ses deux suites : Ange Pitou (1853, 8 vol. in-8) et La Comtesse de Charny (1853-1855, 19 vol. in-8); Les Quarante-Cinq, suite et fin de La Dame de Monsoreau (1848, 10 vol. in-8). Alexandre Dumas, qui se flattait « d’avoir des collaborateurs comme Napoléon a eu des généraux », eut recours encore à Hipp. Auger pour Fernande (1844, 3 vol. in-8), à M. Paul Meurice pour Amaury (1844, 4 vol. in-8), à Paul Lacroix pour Les Mille et un fantômes (1849, 2 vol. in-8), La Femme au collier de velours (1851, 2 vol. in-8), et pour Olympe de Clèves (1852, 9 vol. in-8), etc. Parfois même il lui est arrivé de mettre ou de laisser mettre son nom sur la couverture de livres qu’il n’avait pas même lus, ainsi qu’il l’a reconnu plus tard pour Les Deux Diane de M. Paul Meurice (1846-1847, 10 vol. in-8), ou pour Le Chasseur de Sauvagine de M. G. de Cherville (1859, 2 vol. in-8), où sa part effective se réduisit, dit-il, à mettre un point sur l’i du dernier mot du titre. En revanche, on ne lui a jamais disputé plusieurs autres romans moins célèbres, il est vrai, que ceux dont les titres sont rappelés plus haut : Gabriel Lambert (1844, 2 vol. in-8); Le Château d’Eppstein (1844, 3 vol. in-8); Cécile (1844, 2 vol. in-8); Les Frères Corses (1845, 2 vol. in-8), émouvant récit, dédié à Prosper Mérimée. Malgré cette production sans exemple et qui dépassait tout ce que la cervelle et même la main humaine avaient pu jusqu’alors concevoir et exécuter, en dépit des procès suscités, et le plus souvent gagnés par les directeurs de journaux dont les traités restaient en souffrances, Dumas trouvait encore le temps de surveiller la construction de la villa de Monte-Cristo, près de Saint-Germain, et qui engloutit une partie des sommes fabuleuses que lui rapportait sa plume, de parcourir d’octobre 1846 à janvier 1847 l’Espagne et l’Algérie, en compagnie de son fils, de Maquet, de Louis Boulanger, de Desbarolles et d’Eugène Giraud, de prendre enfin la direction du Théâtre-Historique dont le duc de Montpensier lui avait fait obtenir la concession et où il se proposait « d’offrir chaque soir au peuple une page de notre histoire ». L’inauguration en eut lieu le 20 février 1847 avec La Reine Margot, drame en cinq actes et treize tableaux, tiré du roman portant le même titre, avec le concours d’Auguste Maquet qui, outre deux adaptations antérieures des Mousquetaires (Ambigu, 27 octobre 1845), et de La Fille du Régent (Théâtre-Français, 14 avril 1846), produisit dans les mêmes conditions : Le Chevalier de Maison-Rouge (Théâtre-Historique, 5 août 1847), dont le souvenir s’est perpétué par le fameux refrain Mourir pour la patrie! devenu peu après le chant patriotique de 1848; Monte-Cristo, drame en quatorze tableaux divisés en deux « soirées », innovation assez malheureuse, suivie plus tard de deux autres « soirées »: Le Comte de Morcerf et Villefort (1851); Catilina, drame en cinq actes (Théâtre-Historique, 14 octobre 1848); La Jeunesse des Mousquetaires, drame en cinq actes et quatorze tableaux, avec prologue et épilogue (Théâtre-Historique, 10 février 1849), l’un des grands succès de Mélingue; La Guerre des femmes, drame en cinq actes et dix tableaux (avril 1849); Le Chevalier d’Harmental, drame en cinq actes et dix tableaux (Théâtre-Historique, 26 juillet 1849); Urbain Grandier, drame en cinq actes, avec prologue (Théâtre-Historique, 30 mars 1850). C’est sur la même scène que furent encore représentés Le Comte Hermann, drame en cinq actes (22 novembre 1849), interprété par Mélingue, Laferrière et Rouvière, et une adaptation d’Hamlet, en cinq actes et en vers, qu’il a signée avec M. Paul Meurice et qui figure au répertoire actuel* de la Comédie-Française (15 décembre 1847). La révolution de février 1848 ne fut pour Dumas qu’une suite de déceptions et le signal du déclin de son extraordinaire fortune. Collaborateur d’une feuille quotidienne éphémère, La Liberté (mars-juin 1848), et fondateur d’une revue politique intitulée Le Mois (15 avril), qui n’eut pas une destinée beaucoup plus brillante, candidat malheureux dans Seine-et-Oise et dans l’Yonne, bientôt menacé dans la source principale de ses revenus par l’amendement Riancey qui assujettissait à un droit fiscal le roman-feuilleton, traqué par ses créanciers personnels et par ceux du Théâtre-Historique, dont la crise que l’on traversait avait entraîné la fermeture, il quitta Paris vers la fin de 1851 et vint se fixer à Bruxelles où il demeura jusqu’en 1854. C’est là qu’il écrivit : Un Gil Blas en Californie (1852, 2 vol. in-8); Mes Mémoires (1852-1854, 22 vol. in-8); Isaac Laquedem (1852, 2 vol. in-8), sorte de contre-partie du Juif Errant d’Eugène Suë, annoncée comme devant former trente volumes, mais qui fut arrêtée par la censure impériale; Le Pasteur d’Ashbourn (1853, 8 vol. in-8); El Saltéador (1853, 3 vol. in-8); Conscience l’Innocent (1853, 5 vol. in-8); Catherine Blum (1854, 2 vol. in-8); Ingénue (1854, 7 vol. in-8), dont la publication dans Le Siècle fut interrompue sur la réclamation d’un descendant de Restif de la Bretonne; Les Mohicans de Paris (1854-1858, 19 vol. in-8), dont Paul Bocage fut le collaborateur, ainsi que pour Salvator (1855-1859, 4 vol. in-8), qui en forme la suite. Grâce au dévouement de M. Noël Parfait, ancien représentant du peuple, exilé par le coup d’État et qui avait remis quelque ordre dans les finances de Dumas, celui-ci put, à son retour en France, retrouver une tranquillité relative. De 1854 à 1860, il fonda et dirigea Le Mousquetaire, devenu, en 1857, Le Monte-Cristo, «rédigé par M. Dumas seul», fit représenter Romulus, comédie en un acte et en prose (Théâtre-Français, 15 janvier 1854), dont O. Feuillet et Paul Bocage furent les collaborateurs; La Jeunesse de Louis XIV, comédie en cinq actes et en prose, reçue mais non jouée au Théâtre-Français, représentée au Vaudeville à Bruxelles le 20 janvier 1864 et reprise en 1874 à l’Odéon; La Conscience, drame en cinq actes (Odéon, 7 novembre 1854); L’Orestie, tragédie en trois actes et en vers (Porte-Saint-Martin, 5 janvier 1856); Le Verrou de la reine, comédie en trois actes (Gymnase, 5 décembre 1856), intitulée d’abord La Jeunesse de Louis XV et remaniée après son interdiction par la censure; L’Invitation à la valse, comédie en un acte (ibid., 3 août 1857); L’Honneur est satisfait, comédie en un acte (ibid., 19 juin 1858); Les Gardes forestiers, drame en cinq actes (Grand-Théâtre de Marseille, 23 mars 1858), tiré de Catherine Blum, roman cité plus haut; La Dame de Monsoreau, drame en cinq actes avec prologue (Ambigu, 10 novembre 1860), le dernier et l’un des meilleurs que Maquet ait signés avec lui; enfin, il écrivit deux de ses meilleurs romans, Les Compagnons de Jéhu (1857, 7 vol. in-8), et Les Louves de Machecoul (1859, 10 vol. in-8). Le voyage de Dumas en Italie (1860), la part plus ou moins effective qu’il prit à l’expédition de Garibaldi en Sicile, son séjour à Naples de 1860 à 1864 inaugurent le début de la dernière période de sa vie. Les œuvres s’y succèdent encore, de plus en plus hâtives et improvisées, et sans qu’à de rares exceptions près, on y sente percer, comme jadis, l’ongle du lion. Il suffira de citer : Madame de Chamblay (1863, 2 vol. in-12), dont l’auteur tira un drame en 1868 (Porte-Saint-Martin); Les Mohicans de Paris, drame en cinq actes (Gaîté, 20 août 1864), interdit par la censure et autorisé par Napoléon III à qui Dumas avait adressé une curieuse supplique; La San Felice (1864-1865, 9 vol. in-18); Les Blancs et les Bleus (1867-1868, 3 vol. in-12), épisode des guerres de Vendée, qui fournit aussi le sujet d’un drame joué sous le même titre au Châtelet en 1869. Si longue que soit l’énumération qui précède, elle resterait notablement incomplète si l’on n’y faisait point figurer trois séries d’écrits où Dumas, tout en donnant carrière à son imagination, a entendu raconter sa propre existence, celle de plusieurs de ses contemporains et de ses amis, enfin quelques-uns des principaux épisodes de l’histoire de France. Outre ses Mémoires déjà cités, on trouvera beaucoup de particularités curieuses, mais le plus souvent sujettes à contestations, dans un fragment placé en tête de la première édition de son Théâtre: Comment je devins auteur dramatique, dans ses Souvenirs de 1830 à 1842 (1854, 2 vol. in-8); dans ses Causeries (1860, 2 vol. in-18); dans Bric-à-Brac (1861, 2 vol. in-18), enfin dans l’Histoire de mes bêtes (1868, in-18). Le second groupe est formé par Un Alchimiste au XIXe siècle (le comte de Ruolz), premier chapitre de La Villa Palmieri, tiré à part; Le Maître d’armes (1844, 3 vol. in-8), mémoires de Grisier; Une Vie d’artiste (1854, 2 vol. in-8), histoire de la jeunesse et des débuts de Mélingue; La Dernière Année de Marie Dorval (1854, in-18), touchant appel à la charité publique pour parvenir à lui ériger un tombeau; les Mémoires de Garibaldi (1860), soi-disant traduits sur le manuscrit original; Les Morts vont vite (1861, 2 vol. in-18), intéressantes réminiscences sur Béranger, Musset, Achille Devéria, Eugène Suë, Chateaubriand, le duc et la duchesse d’Orléans, etc. En 1833, une première étude historique : Gaule et France, était présentée comme devant former la tête d’une série de Chroniques qui ne fut pas continuée après la seconde : Isabelle de Bavière (règne de Charles VI) (1836, 2 vol. in-8), car on ne peut donner ce nom aux compilations que Dumas a signées depuis et qu’il suffit de rappeler pour mémoire: Louis XIV et son siècle (1845-1846); Michel-Ange et Raphaël (1846); Louis XV (1849); La Régence (1849); Louis XIV (1850); Le Drame de Quatre-vingt-treize (1851); Histoire de deux siècles (1852); Histoire de la vie politique et privée de Louis-Philippe (1852); Les Grands Hommes en robe de chambre (César, Richelieu) (1857). Mettons à part La Route de Varennes (1860, in-18), amusant récit d’une excursion en Champagne, d’après l’itinéraire même de la famille royale, mais où une inexactitude lui valut un long procès définitivement jugé en sa faveur. À ces spéculations de librairie, on préférera toujours les deux ou trois contes écrits pour les enfants et restés des modèles du genre : Histoire d’un casse-noisette (1845, 2 vol. in-12, ill. par Bertall); La Bouillie de la comtesse Berthe (1845, in-12, ill. par le même) et Le Père Gigogne (1860, 2 vol. in-12). Les toutes dernières et si tristes années de la vieillesse de Dumas furent adoucies par le dévouement de sa fille, Mme Petel, et par la sollicitude de son fils, qui finit par pourvoir à tous les besoins de sa vie matérielle; ce fut dans la ville de Puys, près de Dieppe, qu’il s’éteignit le 5 décembre 1870, sans avoir conscience des désastres infligés à la France, et sa mort passa forcément alors inaperçue. Au mois d’avril 1872, sa dépouille fut exhumée de la tombe provisoire où elle était déposée et transportée, selon un vœu souvent exprimé par lui, au cimetière de Villers-Cotterets, en présence de la plupart de ses amis, collaborateurs ou interprètes encore survivants. Le 4 novembre 1883, fut inauguré sur la place Malesherbes, à Paris, le monument dû à Gustave Doré, qui n’avait pu en voir l’achèvement et où il avait placé au pied de la statue assise du grand romancier le personnage le plus populaire de son œuvre (d’Artagnan), encadré par deux groupes symbolisant les diverses classes de lecteurs que charmeront toujours ses légendaires exploits. Les indications bibliographiques des œuvres citées au cours de cet article se réfèrent toutes à leurs éditions originales, mais les divers écrits de Dumas (à l’exception de ses poésies qui n’ont jamais été réunies(*)) ont été l’objet de deux réimpressions générales en quelque sorte permanentes, l’un en livraisons in-4 illustrées, l’autre dans le format in-18 et comprenant beaucoup de romans (authentiques ou apocryphes) parus antérieurement sous d’autres titres; cette partie de la bibliographie de Dumas n’a pas été traitée par MM. Parran et Glinel dont les travaux n’en sont pas moins fort intéressants et fort utiles. Les portraits originaux de Dumas ne sont pas aussi nombreux que pourrait le faire supposer sa très réelle célébrité. On ne peut guère citer, parmi les documents les plus importants, que deux lithographies d’Achille Devéria, l’une en pied (sur un canapé), l’autre en buste et toutes deux fort belles; un médaillon en bronze de David d’Angers; une autre lithographie par Lelièvre (1833); un pastel par Eugène Giraud (1845); un portrait en costume de Circassien par Louis Boulanger (Salon de 1859), appartenant au fils du modèle; une statue par Carrier-Belleuse, à Villers-Cotterets; de très nombreuses caricatures et un certain nombre de photographies; l’une d’elles, représentant Dumas en manches de chemise et tenant dans ses bras une célèbre écuyère américaine, miss Adah Menken, fut retirée du commerce sur la plainte de la famille. (*) Au moment de la publication de cette notice, c’est-à-dire vers 1885. source: Maurice Tourneux, article «Dumas» de La grande encyclopédie: inventaire raisonné des sciences, des lettres et des arts. Réalisée par une société de savants et de gens de lettres sous la direction de MM. Berthelot, Hartwig Derenbourg, F.-Camille Dreyfus [et al.]. Réimpression non datée de l'édition de 1885-1902. Paris, H. Lamirault, [191-?]. Tome quinzième (Duel-Eoetvoes), p. 36-39. | | | | | | |
Commentaires
il est ecrit,tombeau presumè de virgile,,ce n'est donc pas une certitude?
bizzzz
c'est ce qu'on apelle un mythe, monette...