Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
L’ascension (du Mont Ventoux) pour défi 249 des croqueurs de mots que je mène
Pour qu’advienne le paysage tel que nous le connaissons, il a fallu que se développent deux types de domestication artistique, de "picturalisation", de la nature: celle, en acte, opérée par l’art du jardin et celle, indirecte, opérée laborieusement sur le regard par la création de modèles de vision, de perception et de délectation ("L’ascension du Mont Ventoux", récit fondateur écrit en 1335 par Pétrarque, montre déjà l’éventail des difficultés et indécisions qui grèvent la construction d’une "nature-paysage" esthétiquement cohérente à même de prendre place aux côtés de la "nature" conçue par la philosophie et la science).
La naissance du genre "paysage" dans l'art occidental
Le paysage comme genre autonome en peinture a existé avant ce dont il est pourtant la représentation : en effet, jusqu’au XVllle siècle, on ne parle que rarement de "paysage" pour désigner une configuration géographique remarquable ou particulière, sinon pour souligner qu’elle ressemble fortuitement à une peinture où le décor naturel (puis urbain) tient la place la plus importante, inversant le rapport entretenu par l’image avec son modèle dans le cadre des pratiques figuratives (on reconnaît ici la réalité à partir de sa figuration, la réalité ressemble à une image qui aurait la valeur de modèle, le paysage peint "anticipe" le paysage réel).
Les manifestations naturelles pendant longtemps ont été dépourvues de toute valeur esthétique (par exemple, la montagne et la plage ne deviennent des éléments et des motifs du paysage, des choses dignes d’attention qu’au XlXe siècle) : l’absence de paysage correspondait, dans les esprits, à l’omniprésence, contraignante, généreuse ou menaçante, du pays, de la nature considérée dans son imprévisible brutalité.
Pour qu’advienne le paysage tel que nous le connaissons, il a fallu que se développent deux types de domestication artistique, de "picturalisation", de la nature: celle, en acte, opérée par l’art du jardin et celle, indirecte, opérée laborieusement sur le regard par la création de modèles de vision, de perception et de délectation ("L’ascension du Mont Ventoux", récit fondateur écrit en 1335 par Pétrarque, montre déjà l’éventail des difficultés et indécisions qui grèvent la construction d’une "nature-paysage" esthétiquement cohérente à même de prendre place aux côtés de la "nature" conçue par la philosophie et la science).
Le paysage comme seul sujet d’une image est une idée qui se développe lentement, à partir de la fin du Moyen Age, lorsque la "nature" se laïcise (c’est-à-dire lorsque l’on cesse de la considérer comme une émanation ou une incarnation de la puissance divine) et que le perfectionnement des techniques de figuration des personnages, pour être pleinement apprécié, exige un décor, un espace aussi cohérent que réaliste, un lieu où les intégrer. Le paysage est alors un "fond de scène", à l’arrière-plan, utile pour mettre en valeur les scènes religieuses au centre de l’espace pictural. Destiné à n’être qu’un fond, travaillé indépendamment des autres figures, les éléments du paysage s’organisent peu à peu en un Tout, autonome mais laborieux, qui finit par nuire à l’homogénéité du tableau, à la manière d’une image dans l’image (alors qu’il était, à l’origine, destiné à produire exactement l’effet inverse).
C’est en inventant le motif de la fenêtre, la "veduta", que ce problème de voisinage trouve un début de solution : pour les peintres flamands et italiens, la fenêtre est ce cadre qui institue le pays en paysage, un détail qui ouvre le "cube scénique" (c’est-à-dire la pièce où, invariablement, se passe la scène principale et dans laquelle sont disposés les personnages) sur un extérieur où s’engouffre le regard, un extérieur en miniature.
Cet isolement et cette miniaturisation, cette mise à l’écart dans l’espace du tableau va permettre à ce qui va devenir "le paysage" de mettre au point ses propres conventions et son propre système perspectif (la perspective aérienne), de s’instaurer comme genre autonome dans l’histoire de l’art en s’émancipant de la peinture religieuse et de la peinture d’histoire, de devenir le genre où s’affrontent les théories esthétiques, se règlent et se discutent, par tableaux interposés, les problèmes pratiques et définitoires de toute la peinture occidentale. Pour cela, il suffira d’agrandir la fenêtre aux dimensions du tableau et de relativiser, avant de les faire disparaître, l’importance traditionnellement accordée aux personnages. Cette révolution et cette rupture, c’est à un peintre allemand, Joachim Patinir (]475-1524) surnommé "der gute Landschaftsmaler" (le bon peintre de paysages), que la majorité des historiens l’attribue.
http://ww3.ac-poitiers.fr/arts_p/b@lise12/pageshtm/paysage.htm
1 ère publication:
11/10/2006 20:25
Commentaires
coucou laura,,tu nous donne toujours des infos tres instructives
bizzz
contente que mes articles apprennent quelque chose
j'ai consacré une catégorie au " paysage" dans la peinture, la poésie etc.
c'est un de mes sujets de prédilection pendant mes études et maintenant en core