Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Débat autour de la découverte d'une stèle olmèque
n peut ne jamais avoir inventé la roue et avoir maîtrisé, très tôt, un système d'écriture complexe. Ainsi de la civilisation olmèque, qui émerge dans l'actuel Mexique vers 1 200 avant J.-C. et dont une équipe scientifique américano-mexicaine affirme avoir découvert la plus ancienne trace écrite connue à ce jour. Celle-ci serait, du même coup, la plus vénérable jamais découverte en Amérique. Le document, décrit dans l'édition du 15 septembre de la revue Science, est un bloc de pierre de 36 cm sur 21 cm, épais de 13 cm et lourd de 12 kg. Exhumé à Cascajal, au coeur du pays olmèque, dans ce mince bras de terre qui sépare le Pacifique du golfe du Mexique, il est daté par ses découvreurs d'environ 900 avant J.-C.
Gravés sur la stèle de Cascajal se déroulent, sur huit colonnes, 28 glyphes distincts dont certains sont utilisés à deux, trois, voire quatre reprises. Au total, le texte est constitué de 62 signes. Selon les auteurs, "il documente l'existence d'un système d'écriture insoupçonné et révèle que (la) civilisation (olmèque) disposait d'un haut niveau de complexité". "Cette civilisation est en quelque sorte la civilisation mère de cette région, explique Daniel Lévine, spécialiste des sociétés préhispaniques et professeur à l'université Paris-IV-Sorbonne. C'est elle qui a établi les principaux modèles culturels qui vont, par la suite, définir l'ensemble du monde mésoaméricain : Mayas, Aztèques, etc."L'annonce de la découverte de ce "nouveau système d'écriture" promet d'être l'objet de vives discussions. Pour M. Levine, "tout le monde sait que le socle civilisateur mis en place par les Olmèques à partir d'environ 1 200 et jusqu'à environ 200 avant notre ère, comprend une écriture, vraisemblablement iconographique".
Quant au bloc exhumé, "certains glyphes qui y figurent sont effectivement nouveaux, mais d'autres sont connus, dit M. Lévine. Cela vient s'ajouter au corpus mais cela n'est en aucun cas une révolution." Un cylindre-sceau attribué aux Olmèques et daté de 650 avant notre ère a été exhumé dans cette région en 2002 et indiquait déjà, pour certains archéologues et épigraphistes, l'existence d'un système d'écriture. De plus, il n'est pas exclu que des pratiques scribales se soient développées beaucoup plus tôt dans cette région du monde, mais que ses principaux supports aient été constitués de matériaux peu résistants, comme du bois.
Quant à l'antériorité de la stèle, elle est elle aussi sujette à discussion, selon Max Schvoerer, professeur émérite à l'université Bordeaux-III, fondateur de l'Institut de physique appliquée aux archéomatériaux. Les auteurs de la découverte ont en effet estimé l'âge du bloc indirectement, en étudiant des tessons de céramique retrouvés à ses côtés. Et ce, dit M. Schvoerer, "en l'absence d'un niveau d'occupation bien identifié et daté".
Quel que soit son âge, saura-t-on jamais lire ce que les anciens Olmèques ont gravé sur le bloc de serpentine retrouvé à Cascajal ? Il y a peu de chances. Voire aucune. Les Olmèques demeurent de parfaits inconnus. Identifiée au XIXe siècle, leur civilisation conserve à peu près tous ses mystères. Elle a laissé des vestiges monumentaux, des statues et des masques qui portent les archéologues à penser que le jaguar était l'objet d'un culte... "Le mot "olmèque" signifie "les gens du pays du caoutchouc", mais ce sont les Aztèques (qui installent un empire sur la région au XIVe siècle de notre ère) qui leur donnent ce nom, raconte Daniel Lévine. On ne sait pas comment ces gens se nommaient eux-mêmes... D'ailleurs, on ignore même la langue qu'ils parlaient."
Les glyphes de Cascajal vont donc durablement rejoindre la cohorte des hiéroglyphes anciens indéchiffrés qui alimentent tant de passion et dont les "pierres de Rosette" n'ont pas encore été découvertes : écriture de la vallée de l'Indus, de l'île de Pâques, écriture hiéroglyphique crétoise, disque de Phaïstos, etc.
Commentaires
Polémique archéologique.
Bien à toi.