Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Jean Genet, un captif amoureux
par Baptiste Liger
Lire, octobre 2006
Dans l'œuvre de Genet, son homosexualité est exposée avec sensualité et crudité.
Il serait culotté de résumer l'écriture de Jean Genet au titre de son unique incursion cinématographique: Un chant d'amour. Pourtant, derrière la violence, la rébellion et l'évocation des parias, l'auteur des Bonnes n'a peut-être rien chanté d'autre. Dans ce film mythique, Genet nous met à la place d'un gardien de prison, voyeur, épiant deux détenus, face à leur désir, et dont les mouvements sont autant de pulsions sexuelles. Cru dans son regard sur les corps, le septième art a permis à Genet d'expliciter sans fard ses goûts amoureux, largement présents dans ses pièces, poèmes ou romans. Gosse de l'Assistance né en 1910, il grandit dans une famille du Morvan et, très jeune, se prend de passion pour le vol et la gent masculine, que ce soit pour ses jeunes camarades d'école - Louis Cullafroy, évoqué dans Notre-Dame-des-Fleurs, et le dénommé Querelle - ou de solides gaillards égarés. Elève (presque) modèle, il connaît la compagnie des hommes dans les geôles, qu'il fréquente dès l'âge de quinze ans suite à des fugues et différents larcins. Son expérience à la colonie pénitentiaire agricole de Mettray, où il reste jusqu'en 1928, est déterminante pour sa sexualité, sa passion pour les rapports de domination et de soumission via la captivité.
Aussitôt sorti, Genet s'engage dans la Légion étrangère, afin d'être dans un milieu viril et de voyager en Orient. Mais l'envie de fugue et de vol est trop forte: il ne cesse de déserter et de chiper (des livres, souvent), se fait condamner - une quête inconsciente de punition? - avant de parcourir l'Europe. Alors qu'il est incarcéré à Paris, en 1942, il publie son poème Le condamné à mort, puis ses romans Notre-Dame-des-Fleurs et Miracle de la rose. Cocteau, qui n'est pas insensible à l'homo-érotisme de cette prose à la fois brute et lyrique, l'aide à être libéré en 1944. Si on évoque souvent la férocité de la critique sociale, l'œuvre à venir est obsédée par cette homosexualité allégorique - songez à ce fait en relisant Les bonnes - ou bien plus explicite. Sous couvert de critique de la discrimination pour couleur de peau, sa sulfureuse pièce Les Nègres distille un évident désir pour les éphèbes à peau d'ébène. Le soutien de Genet aux Black Panthers ne serait-il pas influencé par cette attirance? Et l'amour? Genet s'entiche en 1955 du jongleur Abdallah Bentaga, qui se suicide neuf ans plus tard, après que Genet l'a quitté. L'écrivain jure alors qu'il n'écrira plus. Enième fugue, il ne tiendra pas cette promesse.
http://www.lire.fr/enquete.asp/idC=50487/idR=200
Commentaires
Un plaisir de lire tes articles laura ,de genet à picasso en passant par vangoghe merci
ce commentaire me fait plaisir car je n'ai pas beaucoup de commentaires sur les articles autres que mes poèmes...
je me dis que je bosses pour rien....