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Catégories : La littérature, La presse

Les 40 ans du Magazine littéraire

medium_mag_litt.jpgJe me suis régalée à lire ce numéro spécial de décembre 2006 en retrouvant des livres que j'avais lus et en notant des livres à lire.

40 ans de littérature

Le bel âge

Par Jean-Louis Hue


Hegel disait que la lecture du journal quotidien lui tenait lieu de prière du matin. Mais pour le soir? Les longues soirées d'hiver? Rien ne vaut la lecture du Magazine littéraire à laquelle s'adonnent régulièrement quelque cent mille fins lettrés. Prions le ciel pour que perdure ainsi la passion des mots et des livres.
Quarante ans déjà! Pour un journal, c'est un fort bel âge. En ces temps que l'on dit moroses pour la presse écrite, une telle longévité fait notre bonheur. Depuis son premier numéro, consacré en novembre 1966 à Stendhal, Le Magazine littéraire a su rester fidèle à ses principes fondamentaux. Son ambition: un mensuel exclusivement consacré aux livres. Sa singularité: des dossiers qui convoquent chaque mois écrivains, journalistes et chercheurs autour d'un sujet lié à l'actualité éditoriale ou universitaire. Les dossiers du Magazine littéraire ont établi sa notoriété, guidant plusieurs générations d'étudiants et offrant aux lecteurs de tous âges une véritable encyclopédie littéraire, enrichie mois après mois, où chacun peut puiser à sa guise.
Les écrivains sont depuis toujours nos compagnons de route. Dans ce même premier numéro, à propos du livre de Truman Capote, De sang-froid, J.M.G. Le Clézio signait un texte prophétique sur le rôle du romancier, nécessaire témoin de son temps. (Nos lecteurs pourront découvrir cet ar­ticle, ou le relire, dans le prochain numéro de janvier.) Quelques mois plus tard, un certain Philippe Djian, attendant que la fièvre du roman monte en lui (37°2 le matin), conversait avec Henry de Montherlant, qui lui confiait son intérêt pour le suicide… À l'autre bout du temps, dans nos derniers numéros, Cees Nooteboom, tout en s'avouant paradoxalement tenté par l'immobilité de la vie monastique, méditait sur le nomadisme tandis que le jeune Tash Aw, flânant dans le jardin de Rousham, expliquait comment il conciliait ses origines malaisiennes avec la culture anglaise.
Le Magazine littéraire aime à saluer les grands écrivains, qu'il s'agisse des figures illustres de notre patrimoine ou des contemporains saisis dans le mouvement de leur œuvre (Aragon tombant le masque à l'occasion de son dernier roman, Perec reconstruisant le puzzle de La Vie mode d'emploi, Foucault progressant dans son Histoire de la sexualité, George Steiner, récemment, faisant l'éloge de Babel et de la diversité des langues…). Mais notre propos est aussi de découvrir et soutenir de jeunes auteurs (comme, parmi tant d'autres, ceux que nous avons invités dans ce numéro autour d'une question mêlant prospective et ironie: 40 ans, et après?) ainsi que de défendre des genres considérés ailleurs comme marginaux. Le polar, la science-fic­tion, les livres au format poche: autant de domaines dans lesquels Le Magazine littéraire a fait œuvre de pionnier.
Au fil du temps, tout en maintenant le même cap, Le Magazine littéraire a su évoluer et se diversifier. On y trouve aujourd'hui des cahiers d'inédits, des pages débats, une enquête littéraire, un grand entretien qui permet d'entrer dans l'intimité d'un auteur et - enjeu capital car nous nous adressons à des lecteurs voraces (plus de trente livres par an en moyenne) - une sélection des parutions récentes à travers portraits, rencontres et notes de lecture.
Le Magazine littéraire a la quarantaine épanouie. C'est le mensuel littéraire le plus vendu en France chez les marchands de journaux, tandis que les ventes à l'étranger ne cessent de croître, atteignant aujourd'hui près du quart de la diffusion totale. On lit assidûment Le Magazine littéraire dans les pays francophones - à commencer par la Belgique, le Canada et la Suisse - mais aussi un peu partout sur la planète, et parfois dans les endroits les plus inattendus, à Dubaï, au Ghana, ou en Lettonie. Très prisé en Amérique latine, Le Magazine littéraire a fait l'objet d'une édition en langue espagnole au début des années 1990. Parmi les capitales étrangères où il est le mieux diffusé: Lisbonne, Tunis, Rome et New York. En 2005, Le Magazine littéraire est entré pour la première fois dans la liste des dix mensuels français les plus vendus aux États-Unis. Somme toute, l'aventure ne fait que commencer.

Au sommaire de ce numéro, vous trouverez donc :


Jorge Luis Borges
Michel Tournier
Albert Cohen
Gabriel García Márquez
Henry de Montherlant
Françoise Sagan
Patrick Modiano
Ahmadou Kourouma
Yves Bonnefoy
Anthony Burgess
J.G. Ballard
Aragon
Georges Simenon
Doris Lessing
Federico Sánchez
Jorge Semprun
Georges Perec
Norman Mailer
Julien Gracq
Umberto Eco
Yachar Kemal
Mario Vargas Llosa
Lawrence Durrell
Marguerite Duras
Pierre Michon
Toni Morrison
Italo Calvino
Nicolas Bouvier
Bret Easton Ellis
J.M.G. Le Clézio
Octavio Paz
Julian Barnes
Antonio Tabucchi
Paul Auster
Claudio Magris
Claude Simon
Julien Green
Ray Bradbury
Kazuo Ishiguro
Manuel Vázquez Montalbán
Philippe Sollers
Haruki Murakami
Allen Ginsberg
Christa Wolf
Günter Grass
Tom Wolfe
Don DeLillo
Carlos Fuentes
Assia Djebar
Pascal Quignard
Russell Banks
Jean Echenoz

Un extrait du numéro
 

1984 - L'Amant
Marguerite Duras

Le Magazine littéraire n°459
Décembre 2006




 



 

 

Quel est le point commun entre une concierge et Marguerite Duras ? La première parle parfois comme la seconde écrit, c'est le Prix Goncourt qui le dit, dans l'un des entretiens savoureux dont elle avait le secret.


Marguerite Duras : " C'est complètement écrit à la va-vite, L'Amant. C'est un désordre total, même dans mon cas. Une récréation énorme ces trois mois qu'a durés l'écriture. Comme vous le savez, je suis complètement narcissique. C'est un livre qui agit sur le lecteur. J'ai dû recevoir plusieurs mètres cubes de lettres. Tous les lecteurs disent le relire plusieurs fois et tous parlent d'un rapport personnel qu'ils ont avec le livre. Le style aurait pu être rédhibitoire?: je change de temps sans prévenir, je mets sans cesse le sujet à la fin des phrases. Je pose le sujet au début de la phrase comme étant l'objet de celle-ci et ensuite je dis son devenir, son état.

C'est encore plus frappant dans La Pluie d'été car c'est la mère qui parle comme ça : il y a un mélange entre son langage, proche de celui des gens de Vitry et cette inversion, cette figure de style qui la replace dans le domaine du littéraire.

Le style parlé des gens est parfois très littéraire. Je me souviens d'une vieille concierge qui parlait comme j'écris. On parlait souvent ensemble. Elle nous avait toujours connus, j'étais un peu comme sa fille. Un jour, elle me dit?: " Je veux acheter un lit. " Je lui demande?: " Pourquoi un lit?? " Elle me répond?: " Pour moi, mon fils, dormir, quand il vient à Paris. " C'est du Duras.

C'est quoi " du Duras " ?

C'est laisser le mot venir quand il vient, l'attraper comme il vient, à sa place de départ, ou ailleurs, quand il passe. Et vite, vite écrire, qu'on n'oublie pas comment c'est arrivé vers soi. J'ai appelé ça " littérature d'urgence ". Je continue à avancer, je ne trahis pas l'ordre naturel de la phrase. C'est peut-être ça le plus difficile, de se laisser faire. Laisser souffler le vent du livre. Vous savez, L'Amant, ça a tout emporté. La Pluie d'été, ça a été un peu ça aussi.

Vous l'avez quand même retravaillé ?

Dans La Pluie d'été, j'ai interverti des épisodes. [...] Je change l'ordre des phrases, pas les phrases elles-mêmes. À un moment, en décrivant la mère, dans La Pluie d'été, je dis : " Elle a un teint de Pologne. " Une seconde avant de l'écrire, je ne savais pas que j'étais capable de trouver cette expression : " un teint de Pologne ". ç'aurait pu être le titre de La Pluie d'été.

Il n'y a pas parfois des images que vous retrouvez par la suite en vous demandant à quoi elles correspondent ?

Parfois, je ne comprends pas ce que j'ai fait. Un livre, ça peut se poursuivre la vie entière. Ça m'est difficile de me dire que le livre est fini. Quand on finit un livre c'est toujours un abandon. Les dernières pages de La Pluie d'été je les ai faites en deux jours, parce que je ne pouvais pas arriver à quitter ces gens. Je les ai écrites en pleurant. "

Propos recueillis par Aliette Armel
N° 278, juin 1990

http://www.magazine-litteraire.com

 

 

Commentaires

  • Bonjour Laura,
    Je ne pense pas avoir lu Le Magazine Littéraire. Mais j'ai déjà été abonnée à un magazine dans ce genre.
    Il faut dire que j'ai eu une période assez chargée avec mes deux enfants en plus de mon travail à temps plein. Plus un chien à s'occuper... et le jardin et la maison. Bref, maintenant j'en profite pour lire.
    Et peut être que je vais l'acheter ?

  • Je lis de temps en temps... Mais pas encore mis la main sur celui de décembre- il me semble valoir le détour.

  • très intéressant et instructif...

  • je ne connaissais pas ce magazine,,,,à decouvrir alors!!

    bizz

  • de la littérature, rien que de la littérature....
    plus pointu que "lire"...
    il y aussi "la quinzaine" peut-être encore plus pointu et moins attrayant par son format

  • Voilà, Laura, c'est LIRE que j'ai eu entre les mains l'année dernière. Un petit abonnement que j'avais fait.

  • je m'en doutais, élisabeth car "lire" c'est un magazine plus grand public sur les livres
    et le "magazine littéraire", plus pour les fous de littérature
    en france, je préférais acheter un numéro quand il m'intéressait
    mais pour certains magazines que je ne trouve pas ici, je m'abonnerais peut-être

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