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Catégories : Barbey d'Aurevilly Jules

Adaptation cinématographique de Jules Barbey d'Aurevilly:Catherine Breillat : "Je suis un dandy ultraromantique"

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MARIE-NOËLLE TRANCHANT.
 Publié le 30 mai 2007
Actualisé le 30 mai 2007 : 10h14

Son adaptation de Barbey d'Aurevilly avec Asia Argento sort aujourd'hui, après son passage dans la compétition cannoise.

CINÉMA Une vieille maîtresseDrame de Catherine Breillat. Avec Asia Argento, Fu'ad Aït Aattou, Roxane Mesquida, Claude Sarraute. Durée 1 h 54.
« JE PENSE que je suis un dandy. Ultraromantique, mais d'un romantisme noir », confie Catherine Breillat. C'est pourquoi la réalisatrice de 36 fillette et de Romance a été attirée par l'auteur des Diaboliques. Voilà longtemps qu'elle songe à porter à l'écran Une vieille maîtresse, mais avant d'arriver à faire un film présentable à un assez large public, et présenté récemment dans la compétition cannoise, il lui a fallu faire beaucoup de détours, par des chemins déplaisants.
« J'ai toujours pensé que j'aurais été brûlée au temps où on brûlait les gens qui avaient des attitudes trop mystérieuses pour les autres, dit la réalisatrice. Je poursuivais une quête d'identité profonde qui était quelque chose de terrible à vivre autant qu'à faire exister dans mes films. Et je relevais un défi qu'on n'accepte pas d'une femme. J'ai été traitée de scandaleuse et de sulfureuse parce que j'explorais le sexe et la jouissance, et ce qu'on cherche à travers cela : une forme de déconsidération, parfois, qui est une façon de se jeter en enfer, comme le fait Maldoror parce qu'il n'arrive pas à rejoindre l'idéal par le haut. Pour moi, l'amour est une pensée transcendante. Et c'est pour cela qu'elle a ses abîmes. »
Avec Une vieille maîtresse, Catherine Breillat s'essaie à « un cinéma plus aimable, plus accessible ». « Barbey, dit-elle, voulait faire une grande oeuvre littéraire populaire. Et moi, je voulais montrer que je pouvais faire un grand film populaire. »
C'est une histoire de passion inarrachable plus forte que l'amour conjugal pourtant sincère choisi par le héros. D'un côté, la claire Hermangarde, ravissante aristocrate (Roxane Mesquida) : « Elle est dans les canons de la beauté et de la société. Mais elle ne sait pas sortir de son carcan de bienséance. Elle est enfermée dans ce qu'elle doit être, et incapable de rompre la glace. Sans cela leur amour aurait duré. Je ne dirais pas qu'elle est conformiste. Mais plutôt qu'elle assume d'avance un destin tragique. Et son mari sera éperdu de désespoir de lui avoir fait tant de mal. »
Des prototypes de tous les temps
À l'opposé, la Vellini (Asia Argento) est l'image même d'une séduction fatale, obsédante et dominatrice. « J'ai choisi Asia Argento parce qu'elle a quelque chose de flamenco, dit Catherine Breillat, mais je ne voulais pas représenter le flamenco. Je voulais un équivalent plus contemporain, donc un côté rock'n'roll. Le roman parle de sa laideur, mais je me suis dit que ce qu'on appelait ainsi était sa liberté et sa sensualité, qui faisaient d'elle une marginale provocante. » Entre ces deux femmes rivales, Catherine Breillat s'identifie plutôt au héros libertin qui tente de se ranger, Ryno de Marigny, qu'elle a choisi très androgyne en confiant le rôle au jeune Berbère Fu'ad Aït Aattou, pour la première fois à l'écran.
« Maintenant, je peux me mettre dans la peau d'un homme, dit-elle. L'androgynie fait partie du dandysme, comme le sens du défi, un des traits de caractère de Ryno, qui a l'art de» jeter le gant à l'opinion* , écrit Barbey. » Pour la réalisatrice, même si elle a mis son talent de peintre à composer le moindre détail, Une vieille maîtresse n'est pas un film en costumes : « Ça ne m'intéressait pas de faire un film historique. Les personnages sont des prototypes de tous les temps. On pourrait y retrouver La Femme et le Pantin, ou la relation de Charles avec Camilla.
J'espère en tout cas que tout le monde aura envie de lire ce roman fulgurant de Barbey, totalement actuel. »

Honnêtement perverse

M.-N. T..
 Publié le 30 mai 2007
Actualisé le 30 mai 2007 : 10h13
Une marquise très XVIIIe siècle (Claude Sarraute), espièglement amorale, qui ne craint pas de donner sa petite-fille à un jeune homme de mauvaise réputation en espérant qu'il a « le coeur plus élevé que les moeurs » ; une ravissante oie blanche (Roxane Mesquida), follement amoureuse de son fiancé ; un fiancé libertin (Fu'ad Aït Aattou) sincèrement épris de sa blonde promise, mais bientôt repris par le démon d'une ancienne passion. Sa maîtresse enfin, la Vellini (Asia Argento) théâtrale et vénéneuse, longtemps annoncée par des rumeurs de scandale avant d'apparaître.
C'est sur ces personnages que repose la crédibilité de l'adaptation cinématographique d'Une vieille maîtresse, il leur revient de donner un équivalent visuel de la prose superbe de Barbey d'Aurevilly. La Vellini, surtout, est le rôle clé. Catherine Breillat a fait un choix intelligent en prenant Asia Argento pour interpréter cette femme galante, experte en caresses, à la séduction envoûtante et rusée, créature baudelairienne : elle n'est pas belle, elle peut être vulgaire, tantôt repoussante, tantôt attirante, mais on conçoit qu'elle puisse ensorceler les hommes autant par sa sensualité que par son dédain, par son ardeur possessive que par sa solitude farouche. L'androgyne Fu'ad Aït Aattou, un peu trop joli, semble fait pour s'y laisser prendre. Même si certaines scènes frisent le ridicule (en Afrique, par exemple), et si rien ne peut remplacer le style de Barbey d'Aurevilly, Catherine Breillat signe une adaptation qui ne manque pas de talent, on allait dire honnêtement perverse.
Publié en 1851, Une vieille maîtresse marque un tournant important dans l'œuvre de Barbey d'Aurevilly. Délaissant la psychologie de boudoir, il se tourne vers la peinture d'un coin de provence non sans quelques touches d'un réalisme balzacien auquel Théophile Gautier fut sensible (« Depuis la mort de Balzac, nous n'avons pas encore vu un livre de cette valeur et de cette force »).

Pour la première fois, la Normandie fournit un cadre à la tragédie qui se joue entre une malagaise à la laideur envoûtante et son ancien amant. Leur liaison renouée va broyer la jeune et blonde épouse "au teint pétri de lait et de lumière".

Cette œuvre riche et complexe, dont la technique romanesque préfigure celle de l'Ensorcelée, prête à plusieurs lectures que les communications de cette quatrième rencontre aurevillienne s'efforceront d'éclairer.
Source:

Commentaires

  • Cet "honnêtement perverse" me fait sourire!
    Bonjour Laura, comment vas-tu?

  • Bonsoir Laura,

    J'ai lu mais je pense qu'il faudrait avoir le livre en main et le lire pour connaître l'auteur et apprécier.
    Merci.

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