Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Tous les talents de Julie Delpy
Par Marie-Noëlle Tranchant
20/04/2010 | Mise à jour : 18:34
Julie Delpy incarne la comtesse Bathory, qui fait partie des plus célèbres meurtriers de l'histoire hongroise et slovaque et hongroise. (Bac Films)
Elle a écrit, joué, mis en scène et composé la musique de son nouveau film, La Comtesse, sur une criminelle légendaire.
Voilà une dizaine d'années que Julie Delpy, actrice et réalisatrice franco-américaine de la fin du XXe siècle, a rencontré Erzsebet Bathory, aristocrate hongroise de la fin du XVIe siècle, et elles ne se sont plus quittées. Elles ont passé ensemble tout le début de ce deuxième millénaire, liées autant par les affinités que par les difficultés. Affinités ? Julie Delpy avoue aimer les héros «fabuleux et sinistres», la méchante reine de Blanche-Neige ou les cyclopes de L'Odyssée. Elle a été fascinée par la comtesse Bathory, sorte de Gilles de Rais en jupon, entrée dans la légende environnée d'effroi, de sang, de folie et de crime.
«J'ai eu l'idée que ce serait un personnage intéressant à traiter par sa complexité, dit-elle. Elle peut être généreuse ou cruelle, folle ou saine d'esprit. Je ne voulais pas seulement faire son portrait, mais entrer dans les rapports avec la société de son époque, essentiellement masculine, qu'elle défiait par sa puissance, sa richesse et son intelligence.»
Féministe convaincue, Julie Delpy a imaginé à partir de la situation historique un complot de la noblesse contre cette jeune veuve trop indépendante qui occupait une position dominante.
«Sans chercher à l'innocenter, je me suis posé des questions sur la façon dont naissent les mythes. Qu'est-ce qui vient de la réalité, qu'est-ce qui vient du pouvoir en place ? On sait bien que l'histoire a été écrite par les vainqueurs. Et qui sont les vainqueurs ? Souvent des barbares et des traîtres.»
Mais le film a été difficile à produire:«Huit ans de galère !, assure la belle Julie, qui ne mâche pas ses mots. Un vrai cauchemar. On voulait me faire réécrire le scénario, m'obliger à prendre Jean-Claude V an Damme comme vedette ! Je suis allée de producteur en producteur, et j'en ai rencontré de très louches, plus intéressés par le blanchiment d'argent que par le film…»
Deux films en projet
E lle en rit aujourd'hui, avec la belle humeur et l'énergie qui la caractérisent. L'expérience lui a prouvé que chaque film est une aventure. Malgré le succès international de son précédent long-métrage, 2 Days in Paris, antiromance ironique, il lui a fallu repartir presque de zéro. Mais rien ne la décourage. Elle a déjà deux autres films en train. Skylab , comédie autour d'une réunion de famille, devrait se tourner prochainement en Bretagne. Avec notamment, à l'affiche, Éric Elmosnino. Et elle songe aussi à un film de guerre.
«J'aime raconter des histoires qui me tiennent à cœur, dit-elle. C'est vraiment le premier moteur. Le besoin d'écrire remonte aussi loin que mes souvenirs. Il faut que je sorte quelque chose de moi, c'est une question de santé. Cela peut être simplement une idée, une phrase, une image. Mais si je ne crée pas, je ne me sens pas bien.»
Elle ne se contente pas d'écrire, elle compose aussi : c'est elle qui signe la partition de La Comtesse. «C'est un autre processus, davantage de l'ordre de la méditation, qui m'emmène ailleurs, parfois jusqu'à un état second.»
Fille des acteurs de théâtre Albert Delpy et Marie Pillet, elle a déboulé très tôt sur les écrans, avec son visage d'ange qui aurait tenté le pinceau des primitifs italiens et qui dissimule sous son harmonie tranquille un tempérament déluré et fougueux. Godard (Détective), Carax (Mauvais Sang) et Tavernier (La Passion Béatrice) la font débuter dans les années 1980, Kieslowski prend le relais dans la décennie suivante. Très cinéma d'auteur, on le voit.
À la même époque, elle franchit l'Atlantique pour aller étudier la mise en scène à New York ou tourner avec Roger Avary. Installée à Los Angeles, elle a commencé à se faire vraiment remarquer à Hollywood en signant avec Ethan Hawke le scénario de Before Sunset de Richard Linklater, qui leur vaut une nomination à l'oscar du scénario, en 2007.
«Jusque-là, dit-elle, on ne me prenait pas très au sérieux. À Hollywood, il n'y a pratiquement pas de femmes réalisatrices. On va voir si Kathryn Bigelow, avec ses oscars pour Démineurs, fait un peu changer les choses.»
Elle peut rager et tempêter, mais somme toute elle suit son chemin patiemment.
Par Marie-Noëlle Tranchant