Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Etonnantes Expositions universelles
Imaginez un parapluie géant de 100 m de hauteur et 120 m de circonférence. Placez au-dessous un globe de 40 m de diamètre, entièrement transparent. Puis installez, à l'intérieur, des restaurants, des magasins, une petite ligne de chemin de fer et même un bassin dans lequel vous pouvez vous immerger en montant à bord d'un sous-marin de poche...
Délirant ? Oui et non. Car ce "parapluie universel français recouvrant le globe terrestre" a bel et bien failli trôner en plein Paris. Pour son concepteur, un certain Léopold Bourdin, il devait même être l'"un des clous" de l'Exposition universelle de 1900. C'est du moins ce que cet ingénieur expliqua aux organisateurs qui, s'ils ne furent pas suffisamment convaincus pour donner suite au projet, le conservèrent tout de même dans leurs cartons.
Constitué d'une lettre ampoulée à souhait et d'un croquis digne d'une bande dessinée de science-fiction, ce dossier de candidature pour le moins farfelu fait partie des curiosités exposées, jusqu'au 28 juin, aux Archives nationales, à Paris, dans le cadre d'une belle rétrospective sur l'histoire des expositions universelles.
Au premier étage de l'hôtel de Soubise, dans ce qui était encore récemment la plus belle salle de lecture des Archives nationales, le visiteur est d'emblée confronté au plus spectaculaire : les merveilles architecturales - hélas, souvent éphé-mères - dont ces expositions furent le théâtre. Comme le gigantesque Parc des nations, construit sur le Champ-de-Mars en 1867, et où se côtoyaient des répliques du palais du Bardo (Tunisie), du temple d'Edfou (Egypte) ou de la mosquée de Bursa (Turquie).
Si le rôle joué par les expositions universelles comme vitrines du progrès technique ou comme théâtre des luttes diplomatiques n'est pas négligé, c'est davantage leur fonction de laboratoires pédagogiques qui est ici mise en relief. -Centré sur la période 1855-1937, qui correspond à l'âge d'or des impérialismes européens, le parcours montre comment les expositions universelles contribuèrent à façonner le regard porté par l'Occident sur le reste du monde, en mettant l'accent sur les charmes de l'exotisme, au risque de donner une image aseptisée et faussement idyllique des autres continents.
NÉGRIERS ET JAUNIERS
Comme le rappellent quelques vitrines parmi les plus intéressantes du parcours, une telle vision ne manqua pas d'être contestée. En 1931, la fameuse Exposition coloniale internationale de Vincennes fut ainsi concurrencée par une "Exposition anti-impérialiste" qui se proposait de "mettre en plein jour les crimes inouïs commis par les requins colonialistes (et) les odieuses besognes des négriers et des jauniers".
L'initiative, soutenue par le jeune Parti communiste français et par des écrivains comme Louis Aragon, André Breton ou René Char, sonnait comme un avertissement à une Europe trop sûre d'elle-même et incapable de se penser autrement qu'au centre du monde. Une Europe qui ne pouvait imaginer, à l'époque, qu'une exposition universelle pourrait un jour se tenir à Shanghaï.
"Exotiques expositions", Archives nationales, 60, rue des Francs-Bourgeois, Paris 3e. Mo Rambuteau. Tél. : 01-40-27-64-19. Jusqu'au 28 juin. Lundi, mercredi, jeudi et vendredi, de 10 heures à 12 h 30 et de 14 heures à 17 h 30 ; samedi et dimanche, de 14 heures à 17 h 30. De 2,30 € à 3 €.