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Catégories : L'art

"Imaginez maintenant" et la jeune création tous azimuts

LEMONDE | 02.07.10 | 16h43  •  Mis à jour le 02.07.10 | 16h44

On a découvert des racines à la tour Eiffel ! Des surgeons de fer à béton sont venus discrètement s'emparer de la colline de Chaillot. Voilà une des surprises que propose l'opération Imaginez maintenant : quatre jours de festivités, du 1er au 4 juillet, dédiés à la jeune création, tous azimuts. Du hip-hop au design culinaire, des arts plastiques au paysagisme, neuf villes se sont lancées dans l'aventure (Amiens, Basse-Terre, Bordeaux, Grenoble, Lyon, Marseille, Metz, Paris, Toulouse).

Défis de funambule, défilés de mode créole, jardin de salades anciennes : il y a à boire et à manger au fil de cette manifestation inventée par Martin Hirsch, au temps ou il était haut commissaire à la jeunesse, et portée par le Conseil de la création, ministère de la culture bis présidé par Marin Karmitz.

Annoncé comme l'un des dix grands projets de ce conseil sous tutelle de l'Elysée, Imaginez maintenant a d'abord fait polémique. Beaucoup craignaient une récupération politique de la jeune scène artistique. Aujourd'hui, des centaines de créateurs, pragmatiques, y participent. A commencer par ceux qui ont découvert que la tour Eiffel était en fait un végétal : une onirique fiction accommodée par des duos de comédiens qui s'escriment à y faire croire, auscultant les racines métalliques surgies entre Trocadéro et Palais de Tokyo.

Jeudi 1er juillet, soir d'ouverture, le public de cette sculpture-performance conçue par la scénographe Caroline Oriot et la paysagiste Charlotte Moisand est hélas clairsemé. Car un autre événement l'attire à quelques pas de là, offert par les plasticiens Florian Pugnaire et David Raffini. Dans les sous-sols du centre d'art dévoilés pour la première fois au public, une tractopelle biélorusse se suicide, comme le font les scorpions encerclés de feu. "On dirait qu'elle a une vie", entend-on murmurer. Soumise à l'action de vérins, autodétruite par sa propre pelle, elle s'écrabouille peu à peu.

En face, le public devrait pouvoir entendre le bruit des étoiles dans une superbe installation sonore de Robin Meier, malheureusement en panne le premier soir. Car l'événement a aussi ses couacs : ainsi de la polémique qui entoure la Tour sans faim, une architecture de gâteaux imaginée par Gilles Stassart, accusé par les tiers-mondistes de moquer la faim dans le monde.

A Bordeaux, Imaginez maintenant porte bien son nom : les quatre jours se déroulent dans une ancienne caserne militaire, sur la rive droite de la ville. Un quartier en soi (30 hectares), où les entrepôts à ciel ouvert font l'objet de projets d'éco-quartier. D'ici à l'été 2011, l'endroit aura commencé sa mutation ; il sera complètement achevé dans dix ans. En attendant, sur un tiers de cet espace à la fois décati et vivant - des graffeurs hors de l'opération sont venus tout au long de la préparation -, la jeune création aquitaine structurée en 23 projets devrait faire rire et surprendre, autour du thème des nouvelles formes d'engagement. "Pour beaucoup, c'est une première exposition publique de cette dimension", assure Caroline Melon, la commissaire spectacle vivant.

Dès l'entrée, le curieux tombe sur la Cardbox, un kiosque d'informations en Plexiglas et bois, avec des informations pratiques mais surtout de drôles de cartes postales de Michel Nguie. Dans un des entrepôts, Claire Moulène, jeune commissaire d'exposition, pilote le projet "Sécession", avec une trentaine de participants, artistes et conférenciers réunis en une forme communautaire : espace de débats quotidiens, de lecture, d'expositions comme les oeuvres de Sacha Beraud et Mathieu Carmona (un mur-barricade-château- fort en tuiles de récupération) ou encore les caravanes habitées nuit et jour par le collectif bordelais This is not. "On joue le jeu à plein régime en proposant un marathon critique sur la durée de l'événement", explique la jeune femme.

Dans le bâtiment d'en face, réservé aux travaux d'études de cinq écoles bordelaises, un groupe d'étudiants du master ingénierie de projets culturels de l'université Bordeaux-III propose des ateliers de hip-hop, danse et théâtre, montés et filmés avec des détenus de la maison d'arrêt de Gironde, et restitués dans un parcours labyrinthique. "Si, déjà, on peut donner l'impression que ça pulse, dans un lieu de vie où on peut écouter de la musique, débattre, danser et voir, ça sera génial, espère Charlotte Laubard, directrice du CAPC, Musée d'art contemporain de Bordeaux et commissaire générale de la manifestation. Car ça manque dans cette ville."

Claudia Courtois (à Bordeaux) et Emmanuelle Lequeux

En plus de Bordeaux et Paris, sept villes sont investies par l'opération. Amiens offre son quartier maraîcher, appelé Les Hortillonnages, à de nombreux paysagistes, qui font revivre ce lieu tombé en déshérence. A Basse-Terre, en Guadeloupe, la question des "Nègres marrons" est à l'honneur à travers défilés de mode, concerts, dégustation, mis en scène dans une forteresse. C'est aussi un lieu fortifié qui est revisité à Grenoble, notamment par le nouveau cirque et le design architectural, et à Marseille, où le fort Saint-Jean est envahi d'un paysage de chênes brûlés et de jardins méditerranéens. Metz offre à l'opération son terrain vague autour de Pompidou-Metz, avec performances et design culinaire, et Toulouse son hôpital de La Grave. Enfin, à Lyon, la bonne chère est autant à l'honneur que le fleuve.

Sur le Web : Imaginezmaintenant.com.

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