Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Le paysage classique s'expose au Grand Palais
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Effervescence romaine autour de 1600 |
Rome, autour de 1600-1650, reste un véritable creuset d’innovations picturales. C’est là, au contact des ruines antiques et de prestigieux commanditaires, souvent liés à l’entourage du pape, que des peintres issus de toute l’Europe viennent parfaire leur formation, certains succombant parfois définitivement aux charmes de la Ville éternelle comme Poussin, qui y vécut quarante ans. Avec soin, le commissaire général de l’exposition, Stéphane Loire, s’attache à révéler sur les cimaises les liens noués par les artistes dans cette effervescence romaine. Il montre l’empreinte déterminante des Flamands qui pratiquaient depuis fort longtemps une peinture de paysages ultra-détaillés et étirés dans le lointain. À Rome, à l’orée du XVIIe siècle, les miniatures raffinées d’un Jan Bruegel, les vues pittoresques d’un Paul Bril dépeignant les monuments du Forum envahis par un marché aux bestiaux, et plus encore son Port majestueux peint pour le pape Paul V, allaient frapper des artistes comme Claude Gellée, dont les éblouissements solaires doivent aussi beaucoup à l’Aurore de l’Allemand Adam Elsheimer, ce virtuose des effets lumineux. |
Des croquis en plein air à la peinture en atelier |
Ce sont de véritables généalogies que l’exposition (dont La Croix est partenaire) retrace, dévoilant combien l’art du génial Lorrain, loin de surgir ex nihilo, fut nourri par les paysages de ses premiers maîtres en Italie, tel Goffredo Wals, injustement oublié, et surtout Agostino Tassi. Ou encore combien Nicolas Poussin, tout en s’inspirant des couleurs chaudes du Titien, sut souscrire à la leçon constructive de Carrache, pour porter le paysage classique à son sommet. Au cœur du parcours, une petite section de dessins permet d’explorer les coulisses de cette « nature idéale », largement reconstituée, réinventée de toutes pièces dans le secret des ateliers. Les artistes ne pratiquaient pas, à l’époque, la peinture en plein air. Quant à leurs croquis faits d’après nature, très peu peuvent être rattachés directement à des tableaux, la plupart des dessins étant retravaillés, recomposés. |
Un accord profond entre homme et nature |
Le paysage classique qui s’invente dans ces premières décennies du Seicento est un paysage « domestiqué », peuplé de petits personnages, de chemins et d’architectures, célébrant une sorte d’accord profond, apaisé, entre l’homme et la nature, comme dans le somptueux Saint Jean à Patmos de Nicolas Poussin, prêté par l’Art Institute de Chicago. Le peintre y joue les deus ex machina, convoque un obélisque dans son Caprice architectural, et façonne reliefs et nappes d’eau pour guider le regard à travers sa composition. Des arbres majestueux encadrent le panorama. Une montagne bleutée le ferme au loin, dans une gradation colorée qui va du brun au premier plan jusqu’à l’azur, en passant par le vert. La lumière elle-même, observée à travers les feuillages, paraît artificiellement unifiée. Comment expliquer le succès fulgurant de ce nouveau genre, qui conquit très vite les villégiatures de l’aristocratie romaine comme les palais des souverains européens de Philippe IV d’Espagne à Louis XIV. L’exposition est trop peu loquace à ce sujet, même si une des dernières salles en livre discrètement une des clés. |
Les vertus de la retraite spirituelle |
Consacrée au décor du Buen Retiro près de Madrid, ce palais dit de la « Bonne Retraite », elle déploie une exceptionnelle série d’anachorètes et de paysages romains peints par le Lorrain, Poussin, son beau-frère Gaspard Dughet ou le Hollandais Herman Van Swanevelt, qui n’hésite pas à fleurir de tulipes la solitude de saint Bruno. Dans cette perspective, les paysages, loin de représenter un divertissement anodin, pourraient témoigner des vertus de la retraite spirituelle, du rêve d’une Arcadie primitive, d’une vie plus simple et proche de la nature, à l’opposé des tensions et mondanités de la cour. Sabine GIGNOUX Photo : Vue du campo Vaccino avec le marché aux bestiaux par Paul Bril (1554-1626), Dresde, Staatliche kunstsammlungen Gemäldegalerie Alte Meister (BPK, Berlin, Rmn-Grand Palais). |
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