Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
L’Assemblée nationale célèbre Rousseau
À l’occasion du tricentenaire de la naissance de Jean-Jacques Rousseau, le Palais-Bourbon expose ses manuscrits et explore les liens de la Révolution française avec le philosophe.
« L’homme est né libre et partout il est dans les fers », écrivait Rousseau dans Du contrat social, en 1762. « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit », répond, comme en écho, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Entre ces deux dates, une révolution, qui devait trouver en la personne de Rousseau l’une de ses figures tutélaires.
Les liens, complexes, de la Révolution française avec son œuvre sont aujourd’hui l’objet de l’exposition « Rousseau et la Révolution (1) » présentée à l’Assemblée nationale, à l’occasion du tricentenaire de la naissance du philosophe. Dépositaire de nombreux manuscrits, l’Assemblée nationale expose – en partenariat avec la Bibliothèque nationale de France – de très beaux documents où se déploie l’écriture fine et précise du philosophe, ainsi qu’une riche iconographie permettant de resituer sa place dans l’imaginaire collectif.
Une matrice des idées de la Révolution
Né en 1712, mort en 1778, Jean-Jacques Rousseau n’a pas connu la Révolution française. Nul ne sait ce qu’il en aurait pensé, lui-même n’ayant pas le tempérament révolutionnaire. Il en redoutait plutôt les désordres, tout en concevant qu’ils puissent être justes. « Les riches et tous ceux qui sont contents de leur état ont grand intérêt que les choses restent comme elles sont, au lieu que les misérables ne peuvent que gagner aux révolutions », avait-il noté dans un brouillon, avant d’annoncer, prophétique, dans Émile ou De l’éducation : « Nous approchons de l’état de crise et du siècle des révolutions. »
La pensée de Rousseau va offrir aux révolutionnaires une matrice pour penser la nouveauté politique en train d’émerger : égalité des droits, lutte contre l’arbitraire, souveraineté populaire, volonté générale s’exprimant dans la loi… « Si Rousseau est “un des premiers auteurs de la Révolution” (NDLR : selon l’expression de Louis Sébastien Mercier en 1791), ce n’est pas parce que ses textes en sont la cause, mais parce qu’il fournit une représentation possible de l’intelligibilité des événements », précise l’historien Bruno Bernardi, commissaire de l’exposition.
La grande œuvre politique de Rousseau, Du contrat social, est peu lue avant 1789, mais l’auteur de l’Émile et de La Nouvelle Héloïse a déjà séduit les cœurs. Initiateur d’une nouvelle forme d’éducation et d’une nouvelle manière de se tenir dans le monde, il révolutionne déjà la subjectivité. Après la Révolution, ce « rousseauisme diffus » se transformera en un véritable culte public. L’exposition en montre quelques traces, comme ces tasses à café ou ces cartes à jouer peintes à l’effigie du philosophe.
A chacun son Rousseau
Derrière l’unanimisme dévot, chacun garde pourtant son propre Rousseau : Rousseau sage législateur, Rousseau martyr de la liberté, Rousseau chantre des passions et de la sensibilité, homme de la vertu ou homme de la nature… « Une légende noire veut que Rousseau ait principalement inspiré les Montagnards terroristes, tels Marat et Robespierre. (…) Mais il y eut aussi nombre de disciples de Rousseau aristocrates et contre-révolutionnaires », rappelle l’historien James Swenson.
L’histoire de l’acquisition des manuscrits par l’Assemblée nationale témoigne de ces allégeances diverses. Si certaines œuvres proviennent de dons (comme le manuscrit des Confessions offert à la Convention par sa veuve Thérèse Levasseur), le plus grand nombre fut saisi dans les papiers d’émigrés et dans les biens de conventionnels condamnés à l’échafaud… Par la suite, la question des manuscrits de Rousseau sera traitée comme une affaire politique relevant directement des représentants du peuple. Cette exposition, présentée dans la chambre de ces représentants du peuple, poursuit à sa manière cette tradition.
(1) Jusqu’au 6 avril, Assemblée nationale, galerie des Tapisseries (Paris 7e ). Entrée libre, se munir d’une pièce d’identité. Le propos de l’exposition, assez succincte, s’éclaire dans toute sa complexité à la lecture du catalogue, réalisé par un collectif d’historiens : Rousseau et la Révolution , Gallimard, 248 p., 40 €.
ÉLODIE MAUROT
Je précise que cette article n'est pas de moi (lien vers la page citée et si possible son auteur)mais que je suis auteure et que vous pouvez commander mes livres en cliquant sur les 11 bannières de ce blog