Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
« Vous trouverez en moi l’âme de César dans un corps de femme »
se décrit-elle un jour, selon Alexandra Lapierre, auteur d’Artemisia (Editions Robert Laffont).
Pouvoir, gloire, et passions d’une femme peintre
Jusqu’au 15 juillet 2012
Musée Maillol, 61 rue de Grenelle, Paris 7e
Révélée au public par le retentissant procès qui suit son viol de jeunesse, Artemisia Gentileschi (1593-1654) a bataillé pour que ses oeuvres soit reconnues en tant que telles. Et que la société italienne du XVIIe siècle accepte qu’une femme peintre puisse vivre de son art.
Fille aînée du grand peintre baroque Orazio Gentileschi, Artemisia débute à Rome auprès de son pater, qui la forme dès son plus jeune âge. Dans l’angle, en bas à gauche, de Suzanne et les vieillards (Pommersfelden), on peut lire « ARTEMITIA./ GENTILESCHI. F / 1610″ : c’est la première signature autonome de la jeune fille d’Orazio.
En 1611, Artemisia, qui n’a pas encore dix-huit ans, est violée par Agostino Tassi, collègue et collaborateur d’Orazio, sur les chantiers de la salle du Consistoire et de l’appartement du cardinal Lanfranco Margotti (1558-1611) au Quirinal.
Un an plus tard, pour des raisons d’ordre moral mais certainement aussi par intérêt, Orazio Gentileschi dénonce Tassi et rend publique la violence subie par sa fille. Il envoie une supplique au pape Paul V dans laquelle il rapporte comment Artemisia a été « dépucelée et connue charnellement de nombreuses fois par Agostino Tasso, peintre ami intime et compagnon de l’orateur ». Agostino Tassi est condamné à cinq années d’exil de Rome, dans les galères pontificales. Par la suite, cette peine sera jugée injuste et Agostino ne purgera jamais la punition infligée.
Au XVIIe siècle, considérée comme mineure à vie, une femme-peintre ne peut signer un contrat sans la garantie masculine d’un tuteur. Ni ne peut-elle acheter ses couleurs, toucher un paiement, détenir un passeport. Cela est vrai à Rome comme partout en Europe d’ailleurs. Pour qu’une artiste figure sur la liste des salariés du Grand duc, elle doit être unie à un homme qui exerce la même profession qu’elle. Le mariage avec un confrère est une condition sine qua non.
D’où mariage d’Artemisia, dont l’honneur est entaché par le viol, avec le Florentin Pierantonio Stiattesi – fils d’un cordonnier. Le couple emménage à Florence en 1613.
Artemisia passe dès lors sous la protection du Grand-duc de Médicis. Preuve de son esprit audacieux, la jeune femme se lie d’amitié avec Galilée. Preuve de sonn talent, elle est la première femme admise à l’Accademia del Disegno. Elle n’a que 23 ans. Ce qui lui apporte gloire et liberté
Artemisia et Pierantonio retournent à Rome en 1620, peut-être à cause des dettes qu’ils ont contractées et d’une accusation injustifiée de vol. Leurs enfants demeurent à Florence sous la tutelle du noble Francesco Maria Maringhi (1593-1653) dont Artemisia est l’amante.
C’est dans la Ville éternelle que l’artiste devient chef de file des peintres caravagesques et l’amie de grands maîtres tels Simon Vouet (1590-1649) et Massimo Stanzione (1585-1658). Des cardinaux et des princes lui commandent des tableaux inédits d’héroïnes de l’histoire biblique et antique; des jeunes femmes de la haute noblesse romaine lui demandent de peindre leur portrait.
C’est à Naples cependant qu’Artemisia connaîtra l’apogée. Pendant 25 ans, elle dirige son propre atelier et forme les jeunes peintres qui prendront sa relève : Cavallino, Spardara, Guarino.
Artemisia Gentileschi a réussi, par l’éclat de son talent, à s’affranchir des lois de la société, pour devenir l’immense peintre dont elle rêve.
« Si j’avais été un homme, je doute fort que les choses aient tourné de cette façon. [...] Mais je montrerai à Votre Seigneurie ce qu’une femme sait faire », écrit-elle de Naples à son dernier mécène. « [...] Regardez mes œuvres: elles parlent d’elles-mêmes! ». Démonstration en est faite dans cette exposition inédite du musée Maillol.