Né le 18 juin 1925 à Paris et mort le 10 août 2011 à Grenoble, est un auteur, réalisateur à l'ORTF de 1952 à 1974 et l'un des premiers occidentaux à faire connaître, en France, au travers de documents télévisés et d'écrits, des traditions spirituelles orientales telles que l'hindouisme, le bouddhisme tibétain, le zen et le soufisme (mystique de l'islam) d'Afghanistan. Devenu disciple de Swami Prajnanpad et de son enseignement de l'adhyatma yoga, il se fait le relais de cette tradition spirituelle en France depuis le début des années 1970.
Fils de Jacques Guérin-Desjardins (originaire de Normandie) et d’Antoinette Nègre (originaire de Nîmes), protestants engagés, il est l’aîné de trois enfants (un frère et une sœur). Son père, lieutenant à Verdun, Croix de Guerre avec citations, Légion d’Honneur pour faits de guerre durant la première guerre mondiale, capitaine en 1940 et à nouveau Croix de Guerre durant la seconde, pendant laquelle aussi il aide des juifs à échapper aux rafles, est très engagé dans le développement du mouvement scout, étant même en relation directe avec Robert Baden-Powell[3],[4]. Revenu de captivité, il occupe un poste de Directeur des Ressources Humaines chez Peugeot.
Son grand-père maternel, Albert Nègre, ingénieur de l’École centrale, lui raconte ses voyages en Orient à la fin du XIXe siècle, illustrés par des albums de photos. Une tante, adoratrice de saint François d'Assise, reçoit le premier swami accueilli en France à l’initiative de Jean Herbert, Swâmi Siddheswarânanda, ainsi par ailleurs qu’un moine franciscain.
Arnaud Desjardins étudie à l’École alsacienne de Paris, puis la philosophie au lycée Henri-IV. Après le baccalauréat, il entre à l’université en droit, ainsi pour un temps qu’à l'École nationale de la France d'outre-mer. En 1941-42, ses parents lui offrent un abonnement à la Comédie Française. Il veut alors devenir comédien. Ses parents lui offrent alors le Cours Simon à la rentrée 1945, à la condition qu’il finisse Science-Po où il est inscrit depuis deux ans. Il y croise Michel Piccoli et Pierre Mondy. Sa vocation de comédien se renforce, au grand dam de ses parents. Un jour son père lui dit « tu es en train de tuer ta mère. » Arnaud Desjardins ne le supporte pas, et s’en va dire à René Simon qu’il n’a pas la vocation, mais c’est en fait un déchirement.
Diplômé de Science-Po, il commence dans la banque mais, peu intéressé, arrête après un an. Le réalisateur Jean de Marguenat lui offre alors de tenter une expérience auprès de lui. En 1947, il occupe son deuxième emploi au Centre National d’Information Économique, pour traiter de l’avenir de l’Industrie du Cinéma après la signature de l’accord laissant entrer librement les productions américaines en France. Il pénètre ainsi plus avant dans ce monde et, en juillet 1948, est embauché comme assistant-réalisateur de Jean Géhret ; Jean-Loup Lévy-Alvarez lui apprend le montage.
Cette même année 1948, le frère de son ami Olivier Cambessédès l’introduit dans les groupes Gurdjieff, patronnés par Jeanne de Salzmann et il commence, sous la houlette de Bernard Lemaître, à participer aux réunions en mars 1949. Il est en outre fiancé à une jeune fille de Mazamet. Mais en juillet 1949 une tuberculose (maladie très grave encore à cette époque) se déclare et les fiançailles sont rompues à l’initiative du père de la jeune fille. Il le vit comme un nouveau déchirement. Les pasteurs des deux familles ne sont pas intervenus pour empêcher cela : Arnaud Desjardins y voit de l’immoralité dans la morale protestante, et s’en détache.
Au sanatorium des étudiants à Saint-Hilaire du Touvet dans l’Isère, Arnaud Desjardins noue des relations diverses, qui alimentent son questionnement. Il lit René Guénon, Râmakrishna, Vivekananda, Romain Rolland, Jean Herbert et s’entraîne aux emplois de cameraman et de réalisateur. Fin 1949, Bernard Lemaître lui offre Fragments d’un enseignement inconnu de Piotr Ouspenski, portant sur l’enseignement de Georges Gurdjieff.
En 1951, à la fin de la post-cure, Arnaud Desjardins entre dans une société d’import-export des Champs-Élysées, qu’il quitte rapidement pour divergences éthiques. Il devient alors monteur-stagiaire chez Pathé-Cinéma puis entre à la Radio diffusion française en 1952. Il est l’assistant de Stellio Lorenzi puis de Marcel Bluwal, et aussi de Claude Loursais. Il est lui-même homologué réalisateur en 1956 et travaille avec Pierre Corval au service documentaire. Il est toutefois rémunéré au cachet, et cette situation, qui durera de nombreuses années, induit une insécurité financière constante.
Au sein des groupes Gurdjieff, Arnaud Desjardins est en relation avec Denise Marchina (Denise Desjardins), juive d’origine algérienne, peintre et décoratrice, avec laquelle il se marie le 25 octobre 1956 (ils fréquenteront les groupes Gurdjieff jusqu’en 1965, année de leur rencontre avec Swami Prajnanpad.) Ils habitent une location rue Soufflot à Paris.
On conseille à Arnaud Desjardins, lui qui s’intéresse aux sagesses orientales, de considérer aussi la mystique chrétienne, et d’aller à l’abbaye de Bellefontaine, placée sous l’autorité de l’abbé dom Emmanuel Courtant (qui restera son ami jusqu’à sa mort.) Il s’y rend début août 1958, pour trois semaines, et s’y instruit grandement. Toutefois, la réabsorption immédiate qui suit le retour à la vie mondaine lui montre combien le mental est changeant. On lui propose de réaliser les émissions chrétiennes du dimanche, dirigées par les dominicains, mais suite à ses remarques de fond, plus versées dans la mystique que dans le pouvoir séculier, cela ne se fera pas.
Arnaud Desjardins songe à devenir professeur de yoga. Il s’exerce au Hatha yoga depuis plusieurs années et veut se perfectionner aux meilleures sources indiennes, outre réaliser un film sur la spiritualité en Inde. Lui et Bertrand, son frère cadet, partent pour l’Inde en juillet 1959 en break Peugeot, visitent Ella Maillart en Suisse, qui leur conseille de rendre visite en priorité à Mâ Ananda Moyî, puis traversent Italie, Yougoslavie, Grèce, Turquie, Arménie, Iran, Afghanistan, Pakistan, avant d'arriver en Inde. Arnaud Desjardins poursuit seul, les vacances de son frère étant terminées. Il rencontre pour la première fois un autre français, Daniel Roumanoff (lui aussi fortement associé à Swami Prajnanpad, et qui lui donnera l’adresse de ce dernier une fois de retour en France, ainsi par ailleurs qu’Olivier Cambessédès, Roland de QuatreBarbes, le célèbre obstétricien Frédérick Leboyer, Denise Desjardins, Colette Roumanoff...), à Vrindavan, puis se rend à l’ashram de Shivananda à Rishikesh. Il passe au célèbre institut de yoga Lonavla de Bombay où son épouse Denise le rejoint
Arnaud et Denise Desjardins vont ensuite rencontrer Mâ Ananda Moyî à Bénarès (Varanasi), après un voyage très éprouvant, et, devant y rester 2 jours, y passent 3 semaines… tant cette rencontre dépasse leurs espérances. Dans le film Ashrams, Arnaud Desjardins déclare a son sujet : « C'est l'être le plus étonnant qu'il m'ait jamais été donné de rencontrer ». Le film Au cœur secret de l’Inde est monté avec Jacques Delrieu et prêt en février 1960. Il sert dans un premier temps de support pour des conférences à Arnaud Desjardins, qui a été engagé par le directeur de Connaissance du Monde. Il y a 2 600 personnes à la première. Le film est accepté par la télévision pour une diffusion à l’automne 1960. François Mauriac le salue par une critique élogieuse
En 1960, Arnaud Desjardins se rend en Afghanistan, alors quasiment inconnu des occidentaux, pour y tourner un premier film, Afghanistan, qui séduira lui-aussi le public lors de sa diffusion en 1961. Cette même année, il retourne en Inde avec son épouse. Les trajets sont toujours aussi difficiles, ainsi bien souvent que les conditions de séjour et le climat étouffant. Ils rencontrent Mâ Ananda Moyî, Swami Ramdas — appelé affectueusement « papa » — et passent à Thiruvanamalaï, séjour de feu Ramana Maharshi.
Le film de 1959 est remonté avec les nouvelles prises sous le titre Ashrams, les yogis et les Sages et sort le premier livre : Ashrams ; grands maîtres de l'Inde.
En 1962, Arnaud Desjardins, son épouse et leur fille Muriel partent pour un périple de onze mois en minibus Volkswagen. Ils séjournent en Afghanistan puis en Inde, auprès de Swami Ramdas, Shivananda, Mâ Ananda Moyî. Les films Quand bat le cœur de l’Inde, et La route de Kaboul, une fiction documentaire, sont montés et diffusés fin 1963 avec le même succès que les précédents. Le deuxième livre paraît : L’Hindouisme et nous : yoga et spiritualité.
Arnaud Desjardins rencontre par hasard le dalaï-lama (Tenzin Gyatso) en 1963 à Mussoorie, et lui exprime son souhait de faire un film sur le bouddhisme tibétain auprès de maîtres réfugiés dans le Nord de l’Inde après l’invasion du Tibet par les Chinois en 1950 et l'exil du dalaï-lama en 1959. Après de longues minutes de réflexion, le dalaï-lama lui donne l'autorisation.
En 1964, Arnaud Desjardins obtient enfin des conditions normales de travail (contrat de salarié, frais de mission) au sein de la nouvelle ORTF, par ses nouveaux dirigeants. Outre la sécurité financière, ceci lui permet de partir avec des équipements vraiment adaptés à ces voyages éprouvants, en particulier une Land Rover de nature à éviter que le voyage n’inclue une litanie de dépannages automobiles...
En 1964-65 est montée une expédition pour deux films au sujet du Bouddhisme tibétain dans le nord de l’Inde, et de l’Afghanistan. Arnaud Desjardins rencontre pendant sept mois de grands rinpochés tibétains nés et formés au Tibet : Kalou Rinpoché, Abo Rinpoché, Sonam Zangpo Rinpoché, le 16e Karmapa (Rangjung Rigpe Dorje), Chatram Rinpoché, Kyabjé Dudjom Rinpoché et Kangyour Rinpoché, auprès duquel Arnaud Desjardins vit un moment d’intense sur-conscience. Il entend aussi, à deux reprises, « ce qu’il vous faut, c’est une structure intérieure ».
De retour à Paris, il monte Le message des Tibétains 1 – Le Bouddhisme, et 2 – Le Tantrisme, diffusés en 1966 de même qu’une seconde fiction se déroulant en Afghanistan : Djomma du Nouristan. Le livre Le Message des Tibétains paraît la même année.
Rencontre de Swami Prajnanpad[modifier]
En 1965, Arnaud Desjardins pense avoir besoin d’une voie analytique « dans le monde » et d’un maître parlant l’anglais (sans, donc, le truchement d’un traducteur) et se rend à Channa, près de Ranchi, au Bengale, rencontrer Swami Prajnanpad, dont il a l’adresse depuis six ans, avec la bénédiction de Mâ Ananda Moyî[5].
Le premier entretien d'Arnaud Desjardins avec Swami Prajnanpad, appelé familièrement « Swâmiji », le marque profondément. Celui-ci enseigne la voie de l'Adhyatma yoga, adaptation de l'Advaïta Védanta. La plupart du temps, il donne les entretiens en position assise (« sittings ») et répond aux questions qui lui sont posées, incluant parfois de percutantes formules. Ayant étudié avec intérêt la Psychanalyse, il pratique cependant aussi des mises au jour du subconscient en position couchée, les « lyings ». En 1966, Swâmiji se rend en France à l’invitation de ses disciples français ; sa venue est également motivée par des problèmes cardiaques.
Nouvelle expédition en 1967
En 1967, une nouvelle expédition est en préparation pour un autre film sur les Tibétains lorsque le dalaï-lama retire son autorisation, à la suite d’une dénonciation de propos d'Arnaud Desjardins comme induisant des dissensions entre les écoles du bouddhisme tibétain, tirés d’une épreuve de la traduction anglaise de son dernier livre. Arnaud Desjardins stoppe toute édition mais sollicite auprès du dalaï-lama une audience, qui lui est accordée, pour s’expliquer.
La famille Desjardins repart au complet, récupérant la Land Rover laissée à Kaboul au retour du premier voyage. Le dalaï-lama reçoit Arnaud Desjardins à Dharamsala pour examiner avec lui la traduction anglaise du livre, après quoi il lui renouvelle son autorisation de filmer, et passe en outre de forts moments d’échanges avec lui. Plus tard, de passage à Paris, le dalaï-lama lui nouera une écharpe autour du cou « en signe d’amitié imbrisable ».
Le périple comprend le Sikkim, le Bhoutan, une visite au Karmapa. En juin, Arnaud Desjardins est auprès de Swami Prajnanpad, mais supporte très difficilement le travail qu’il lui impose. « Swâmiji » lui dit que s’il peut lui consacrer trois mois, seul, alors il pourra faire quelque chose pour lui. Arnaud Desjardins décline et part pour l’Afghanistan rencontrer de grands maîtres soufis, parmi lesquels Khalifa Saheb, le cheikh Samar-Oud-Din et Soufi Saheb de Maïmana. Mais, à sa grande surprise, ce dernier lui enjoint de retourner auprès de Swami Prajnanpad ; ce qu’il fait, pour une mise au jour du subconscient de trois mois et demi.
Notoriété
Outre celui tourné en Afghanistan, 3 films sont montés : Himalaya Terre de sérénité. 1 – Au royaume du Bhoutan, 2 – Le lac des yogis, 3 – Les enfants de la Sagesse. Diffusés en 1968 après les événements, ils ont un énorme impact sur le public. Interviewé par André Voisin, Arnaud Desjardins apparaît physiquement à l’écran. Il se lie d’amitié avec Alan Watts. Il jouit alors d’une importante notoriété, est invité dans de nombreuses émissions de radio à succès, reprend les conférences Connaissance du Monde salle Pleyel, obtient le Prix Pierre Mille pour l’ensemble de son œuvre, etc.
En 1968, 1970, 1972, Arnaud Desjardins publie sur l’enseignement de Swami Prajnanpad – sans le nommer, car c'est de son vivant – la trilogie (ensuite publiée en un seul volume) Les Chemins de la Sagesse.
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