William Degouve de Nuncques "Nocturne dans le Parc Royal à Bruxelles " © Coll. Part.
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William Degouve de Nuncques (1867-1935) est l’un des artistes majeurs du symbolisme belge. Toute sa vie, il traitera le paysage, jouant avec les nuances de couleurs, depuis les impressions urbaines nocturnes aux ambiances claires de plateaux enneigés. En 1936, le critique d’art Arnold Goffin écrivait à propos de l’artiste : « Le nom et l’œuvre de ce maître sont chers depuis longtemps aux délicats. Mais il sont fort loin d’avoir acquis, en Belgique, tout au moins, la renommée qui leur est légitimement due ».
Cette exposition regroupe un ensemble d’œuvres de Degouve de Nuncques avec une soixantaine de peintures, dessins, carnets, documents issus du Kröller-Müller Museum, de nombreux musées européens et de collections privées. Les recherches menées dans le cadre de cette exposition ont pour objet de faire redécouvrir le travail de cet artiste et de réactualiser les connaissances que nous avons de son parcours.
William Degouve de Nuncques né le 28 février 1867 à Monthermé et mort le 1er mars 1935 à Stavelot, est issu d'une ancienne famille de la noblesse française où les arts furent toujours à l’honneur. C’est son père, esprit cultivé, qui l’initie à l’art et à la littérature mais aussi à la philosophie, à la musique, et aux sciences. Installé avec ses parents en 1870 à Spa d'abord, puis à Bruxelles après la guerre franco-prussienne de 1870, Il dessine très tôt en dehors de tout enseignement artistique. Il se lie d’amitié avec le peintre hollandais Jan Toorop avec qui il partage un atelier à Machelen en 1883, lequel lui prodigue ses conseils de coloriste . Il rencontre également le peintre Henry de Groux qui le prend comme modèle, entre autres pour la tête de son célèbre « Christ aux outrages » William Degouve fréquente alors les cercles d’avant-garde belges. Suffisamment aisé pour pouvoir vivre sans son art, il multiplie les expositions à l’étranger et sillonne l’Europe en compagnie de sa jeune épouse, Juliette Massin, belle-sœur d’Emile Verhaeren. Le couple expose d’ailleurs souvent leurs oeuvres ensemble. A cette époque, son travail s’attache à représenter une nature, nocturne et silencieuse, sous des lumières lunaires exprimant mystère et inquiétante étrangeté.
Il apprécie le travail de Maurice Denis et en particulier celui de Pierre Puvis de Chavannes dont il admire le climat de mélancolie. La notion d'allégorie de ce dernier rejoint la conception du symbolisme qui est la sienne, en exprimant la suspension du temps, la théâtralisation du spirituel, la quête d’une vie hors de l'histoire. Bruges et Venise sont, au détour des années 1890, des villes qui attirent les artistes symbolistes. William Degouve lui aussi aime à peindre ces villes aquatiques, qui sont les lieux de toutes les fantasmagories : atmosphère brumeuse et romantique enveloppée d’un voile mystérieux, suspension du temps, renvoi au souvenir d’un âge d’or.
Encouragé par Rodin il expose pour la première fois en 1890 à Bruxelles. Il montre au Salon de Paris de 1894 la toile « Place du Warichet à Perwez » , peinte en 1889, qui se vend immédiatement. Au Salon de Paris de 1894, il présente des oeuvres dans lesquelles et par un rejet quasi général de la figure humaine, apparaissent le recueillement ou le mystère. Il est invité au Salon annuel de 1893 du Groupe des 20 où il présente 6 œuvres dont « La Maison rose », peinte en 1892 et un dessin représentant son ami Henry de Groux.
A l'Association La Libre Esthétique, il expose des scènes nocturnes à l'huile ou au pastel inspirées de poètes comme Maurice Maeterlinck , toujours avec ces aspects surnaturels et ces climats étranges accentués par les ambiances nocturnes qui préfigurent le surréalisme.
Le siècle s’achevant, William Degouve délaisse progressivement les effets nocturnes de ses tableaux pour gagner la clarté, la lumière, la blancheur, ce qui le conduira jusqu’à des peintures de paysages dans la blancheur de la neige. Cette transition des oeuvres sombres jusqu’à la lumière, se passe par le séjour qu’il fait en Espagne entre 1899 et 1902, lequel lui permet d’élargir sa sensibilité désormais aux effets de la lumière. Dès lors, loin des cités, et des mondanités, il s’isole pour peindre ses toiles aux Îles Baléares, dans la campagne brabançonne ou encore dans les Ardennes belges, dans le souhait général alors du retrait de nombreux artistes dans une nature non déflorée par l’industrialisation.
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