Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Le tourisme, fleuron de l'économie croate
L’entrée de la Croatie dans l’Union, le 1er juillet, correspond à une période de redéfinition de ses priorités.
Dubrovnik, haut lieu du tourisme, accueille de 200 000 à 300 000 visiteurs par jour en pleine saison.(Catherine RECHARD/SIGNATURES)
Parmi elles, l’enjeu économique du tourisme.
Village d’Orasac, à une quinzaine de kilomètres au nord de la ville très touristique de Dubrovnik. Seul le chant des criquets rompt le silence dans ce village paisible installé sur les hauteurs. Entre les murets de pierre et la végétation méditerranéenne, des escaliers mènent à la route principale puis à une petite plage de galets avec ses gros rochers et quelques bateaux amarrés. En face, l’eau turquoise de la mer Adriatique et une petite île rappellent la tranquillité et le charme de la côte croate à l’état brut, à l’écart des grandes villes comme Split ou Dubrovnik.
Son cadre idyllique, ses prix bon marché et sa proximité – quelques heures à peine par vol – des grandes capitales européennes, font que les parents de Djana n’ont aucun problème à louer leurs chambres l’été. « Regardez autour de vous ! C’est parfait, non ? » sourit la jeune mère de famille. « On a commencé il y a cinq ans et ça marche de mieux en mieux. On est inscrits sur plusieurs sites Internet (dont un français), le bouche-à-oreille fonctionne bien. En tout cas entre juin et septembre. »
Du nord au sud de la côte croate, depuis l’Istrie et jusqu’à Dubrovnik, les panneaux « chambres » s’enchaînent le long des routes : en plus des hôtels et campings, nombreux sont les habitants à faire chambre d’hôtes durant la saison estivale. « Cela ne nous permet pas d’en vivre toute l’année, mais c’est un bon complément de revenus, surtout quand on a déjà le terrain ou une maison vide », assure Djana.
La culture traditionnelle mise en avant
Quelques maisons plus loin, Mato et son épouse font aussi chambre d’hôtes. « On loue une partie de la maison aux touristes depuis le milieu des années 1980. C’est comme une tradition dans la région. » Après la guerre (1990-1995), le tourisme a peu à peu repris, avant de considérablement se développer ces dernières années. Finaud, Mato a eu l’idée de faire visiter son atelier de production d’huile d’olive. « On a une presse traditionnelle vieille de plus de deux cents ans, qui fonctionne à l’aide de notre cheval. »
Ces visites s’adressent en particulier aux groupes de touristes en quête d’authenticité qui, au cours de leur croisière, font un arrêt par Dubrovnik. « On attend un groupe d’Américains cet après-midi, annonce-t-il. Après la visite, ils auront aussi droit à une dégustation de plats traditionnels, c’est ma femme qui cuisine. »
En 2012, près de douze millions de touristes ont visité la Croatie – trois fois la population du pays. Allemands, Slovènes, Autrichiens et Italiens assurent près de la moitié du nombre total de visiteurs étrangers. Parmi les destinations les plus prisées figurent l’Istrie, dans le nord du pays, et l’ensemble de la côte dalmate. « On assiste aussi à une demande émergente de la part des pays de l’Est, comme la Pologne », explique à Zagreb Neven Ivandic, docteur en économie à l’Institut pour le tourisme.
Un quart des touristes chez des particuliers
Plus de 11,8 millions de touristes ont visité la Croatie en 2012, cela représente 42 % d’augmentation par rapport à 2002. En 2012, 88 % des touristes étaient étrangers, le tiers étant venus en voyage organisé. Près de 18 % étaient allemands, 10,2 % slovènes, 9,1 % autrichiens, pour 4 % de Français. Le quart des touristes avaient fait le choix de séjourner chez des particuliers (chambres d’hôtes ou appartements).
Dans le sud du pays, Dubrovnik et sa vieille ville classée au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1979 est l’une des villes les plus attirantes de la Croatie. « Ici, la structure des touristes est un peu différente, affirme Jelka Tepsic, de l’office du tourisme de la ville. On a beaucoup plus de Britanniques et de Français ; et énormément de passagers de croisières puisqu’on se trouve à mi-chemin entre Venise et la Grèce. » En pleine saison, les petites ruelles sont noires de monde. La ville peut recevoir un million de passagers de croisière par an, 200 000 à 300 000 touristes d'un jour et 700 000 pour au moins quelques nuits, alors qu’elle ne compte que 45 000 habitants.
L’entrée dans l’UE : une aubaine pour développer le tourisme
Pour fluidifier le tout et rendre le séjour des visiteurs le plus agréable possible, les autorités portuaires ont limité le nombre quotidien de bateaux de croisière accueillis et l’office du tourisme organise de nombreuses excursions d’un jour au Monténégro (dans les bouches de Kotor par exemple), en Bosnie (à Mostar) ou dans des petits villages croates autour de thématiques artisanales comme la production traditionnelle d’huile d’olive chez Mato.
La ville et l’office de tourisme essaient aujourd’hui d’élargir la saison afin de faire venir les visiteurs tout au long de l’année, et non plus seulement de mai à septembre. « Faire de Dubrovnik une ville pour toutes les saisons reste étroitement lié aux vols directs des compagnies aériennes : les routes ne sont pas très bonnes, et l’autoroute qui longe la côte ne descend pas (encore) jusqu’à nous. De fait, 80 % des touristes qui visitent Dubrovnik viennent par avion. » Jelka Tepsic espère que l’entrée dans l’Union européenne incitera les compagnies aériennes à ouvrir davantage de vols.
Si les habitants reconnaissent volontiers qu’ils fuient la vieille ville l’été – autant pour éviter les masses de touristes que pour ne pas subir les problèmes de stationnement –, ils sont peu nombreux à critiquer vraiment la situation, en tout cas à le faire ouvertement. « Ce serait compliqué de s’en plaindre, reconnaît un marin croate. La ville tout entière vit du tourisme ! »
Les menus des restaurants sont généralement présentés en quatre langues au moins (anglais, français, allemand et italien) ; les agences touristiques sont omniprésentes ; sans oublier les commerces, marchands de glaces et nombreuses boutiques de souvenirs.
Le tourisme, un secteur qui ne connait pas la crise
Plusieurs lycées et instituts sont également spécialisés dans l’hôtellerie et la restauration pour former les professionnels de demain. « Le seul problème, souligne toutefois Milan Peric, responsable du département tourisme à la mairie, c’est qu’il s’agit aujourd’hui de notre seule activité… alors qu’on n’est jamais à l’abri d’une catastrophe. On devrait essayer de développer un autre secteur d’activité. »
Jusqu’à présent, le tourisme est l’un des rares secteurs de l’économie de la Croatie à avoir progressé malgré la crise. Il représentait en 2012 près de 12 % du produit intérieur brut et 13 % des emplois. La contribution totale du tourisme (comprenant les secteurs indirects et conséquences induites) dépasse 25 % du PIB. C’est bien plus que la moyenne de l’Union européenne (3 % du PIB, 2,8 % des emplois), que l’Italie (4,8 % des emplois) ou l’Espagne (5,2 %) (1). « Quand l’économie d’un pays est autant dépendante du tourisme qu’elle l’est en Croatie, avance Rochelle Turner, du Conseil mondial pour le voyage et le tourisme, il faut à la fois protéger ce secteur pour en faire quelque chose de durable mais aussi s’assurer de renvoyer une bonne image du pays en évitant tout ce qui pourrait lui nuire, comme ce qui se passe en ce moment en Turquie ou au Brésil. »
L’entrée du pays dans l’Union européenne devrait ainsi lui faire gagner des points en termes de bonne image, et lui donner une plus grande visibilité. Mais les touristes en provenance de l’UE représentent déjà 80 % des visiteurs actuels, et les autorités ne s’attendent pas à une véritable hausse dans les années à venir. Elles espèrent, en revanche, davantage de connexions aériennes directes avec les grandes capitales européennes… assez peut-être pour compenser la perte des touristes ukrainiens et russes qui devront, eux, désormais, présenter un visa pour entrer dans le pays, alors qu’ils en étaient jusque-là dispensés.
SOPHIE GUESNE (à Dubrovnik)
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http://www.la-croix.com/Actualite/Europe/Le-tourisme-fleuron-de-l-economie-croate-2013-07-04-982309