Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Geneviève Asse au Centre Pompidou, des carnets aux grands formats
Publié le 25/06/2013 à 18H42
Pages des carnets de Geneviève Asse, 1993, achat en 2000, Collection Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, photos Georges Meguerditchian, Centre Pompidou / Dist. RMN-GP
© Adagp, Paris 2013Le premier tableau qui accueille le visiteur, "Horizontale XIII" (1978) est déjà un choc. Il n’est pas très grand. Un réglet horizontal sépare deux zones de bleu qui semblent répercuter la lumière.
Généralement, les toiles de Geneviève Asse sont coupées en deux verticalement. Mais rien n’est constant dans son œuvre. De loin, en arrivant, on pourrait se dire que tout ce bleu, c’est toujours la même chose. Mais il est plein de variations subtiles devant lesquelles il faut passer et repasser, s’arrêter, pour découvrir un univers.
Geneviève Asse, La Cuisine, 1946-1947, Don de l'artiste en 2012, Collection Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, photo Philippe Migeat, Centre Pompidou / Dist RMN-GP © Adagp, Paris 2013
Onze peinture données au Centre Pompidou
Quand Geneviève Asse a fait sa donation, constituée de onze peintures datées de 1948 à 1999, "il est apparu comme une évidence de la montrer au Centre Pompidou", raconte le commissaire de l’exposition, Christian Briend. Ces onze peintures sont entourées d’œuvres des collections publiques, dont celles du Centre Pompidou, et quelques autres prêtées par des collectionneurs privés.
Des toiles de grand et de petit format, et, "une des originalités de l’exposition" selon le commissaire, les carnets de l’artiste. On n’avait jamais vu autant de ces carnets ensemble, souligne-t-il.
Le début de la rétrospective montre comment les objets que Geneviève Asse peignait, à la fin des années 1940, se sont progressivement dissous dans de grandes zones abstraites de blanc et le bleu. Au début, elle peint des natures mortes comme la "Cuisine" (1947), dont les perspectives renversées font penser à Cézanne, la sobriété et les tons sourds à Morandi. Déjà, le bleu "assien" est en germe dans les carrelages.
Geneviève Asse, Cercle Paysage, 1966, Don de l’artiste en 2012, Collection Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, photo : Philippe Migeat, Centre Pompidou / Dist. RMN-GP © Adagp, Paris 2013
Les formes disparaissent petit à petit
Dans cette œuvre, on voit ce qui sera des constantes de l’œuvre de Geneviève Asse, comme la frontalité du sujet et le format vertical, fait remarquer Christian Briend. Dans la "Nature morte bleue" de 1955, déjà, "se mettent en place les gammes de bleu qui seront sa signature", ajoute-t-il.
Les deux tableaux suivants sont comme une transition : dans la "Composition" de 1960, l’objet disparaît dans le blanc, semblant y flotter. Et dans "Cercle paysage" de 1966 (à noter qu’il n’y a quasiment pas de bleu dans ce tableau), une forme circulaire rouge, qui pourrait être un soleil, apparaît et disparaît dans du blanc.
Après, il y a la "Peinture" de 1969-70, "la plus grande que j’aie faite", dit l’artiste. Pas de bleu non plus ici, elle est toute dans les blancs, "c’est une étude de la lumière, du soleil du matin" explique-t-elle.
Geneviève Asse, Ligne blanche intérieure, 1971, Collection Centre Pompidou, Musée national d’art moderne photo : Christian Bahier et Philippe Migeat, Centre Pompidou / Dist. RMN-GP © Adagp, Paris 2013
Des bandes verticales
Les bandes verticales de bleu, séparées par un trait ou par un réglet de bois ou de métal, se mettent en place, dans une infinité de nuances. La couleur n’est jamais uniforme, la séparation n’est jamais raide, tranchée de façon brutale. Un petit trait rouge, un peu de blanc viennent s’immiscer.
"Je peins très rapidement. Il y a des questions de lumière, il faut l’attraper", explique Geneviève Asse. "Je ne peux pas revenir dessus parce que ça ferait des enduits. Quand c’est fait c’est fait", ajoute-t-elle. Et en effet sa matière est très fine, produisant un effet de fluidité.
Un "Triptyque lumière" (1970-1971), où seules quelques traces de bleu se perdent, s’effacent, dans le blanc, est exposé à côté d’"Ouverture II" (1971). Deux bandes de bleu soutenu encadrent deux bandes de blanc, mais là le bleu, au contraire, gagne progressivement sur le blanc.
Geneviève Asse, Stèle n°4, 1996, Don de l’artiste en 2012, Collection Centre Pompidou, Musée national d’art moderne photo : Philippe Migeat, Centre Pompidou / Dist. RMN-GP © Adagp, Paris 2013
Des carnets peints à l'huile
Sept "Stèles" (1992-1999), hommage au poète Victor Segalen, sont alignées, constituant "un véritable environnement pictural", selon les mots du commissaire. Des stèles, ces toiles ont la verticalité, et aussi la solidité du bleu. Ou plutôt des bleus. Elles "tendent à la monochromie mais cette monochromie est constamment contestée", souligne Christian Briend.
Sous une série de peintures récentes de petit format sont exposés les carnets de Geneviève Asse. Ils sont particuliers d’abord parce la peinture à l’huile y est omniprésente. Ensuite parce qu’il ne s’agit pas de carnets de croquis qui prépareraient les tableaux mais d’œuvres autonomes. S’ils les rappellent souvent, ils s’en éloignent parfois. Par exemple le rouge, qui apparaît de façon allusive dans les toiles, peut occuper toute une page, comme ce minaret du carnet fait à Marrakech.
"Souvent je les sors et je les regarde avant de peindre. Je les aime", dit Geneviève Asse de ses carnets. Et elle est très heureuse de la présentation qui en est faite : "C’est très difficile de montrer des carnets. Là ça bouge, c’est comme des papillons, c’est vivant", se réjouit-elle.
Geneviève Asse, Cercle composition, 1969, Don de l’artiste en 2012, Collection Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, photo : Philippe Migeat, Centre Pompidou / Dist. RMN-GP © Adagp, Paris 2013
"Je n'ai pas perdu mon existence"
Geneviève Asse est née en 1923 à Vannes et a passé ses premières années dans le Morbihan. Et si elle travaille souvent à Paris, elle continue à passer beaucoup de temps en Bretagne. Elle en aime la lumière et les espaces. "Les paysages de mon enfance m’ont aidée. J’avais tout ça qui est venu vers moi", confie-t-elle.
"Dans l’ensemble, je n’ai pas perdu mon existence", dit-elle. "J’aime la vie, j’aime la lumière, j’aime l’air", dira-t-elle encore, se réjouissant d’avoir cette "richesse-là". Un bonheur de vivre et une sérénité qui se sentent dans son travail et qui se communiquent. On se sent bien en sortant de l’exposition.
Geneviève Asse, Peintures, Centre Pompidou, Paris 4e
Tous les jours sauf le mardi, 11h-21h
13€ / 10€
Du 26 juin au 9 septembre 2013
Journaliste, responsable de la rubrique Expositions de Culturebox