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Jean Véronis, mot de la fin

Frédérique ROUSSEL 11 septembre 2013 à 20:36

Portrait de Jean Véronis uploadé par lui-même sur Wikimédia CommonsPortrait de Jean Véronis uploadé par lui-même sur Wikimédia Commons (CC BY-SA Aixtal)

DÉCÈS

Le linguiste et spécialiste du Web est mort dimanche.

 

Un jour de novembre 2006, un des beaux hasards de la profession m’amène à contacter Jean Véronis. En surfant pour un dossier sur le traitement automatique des langues, je tombe sur ce professeur de linguistique et informatique à l’université d’Aix-Marseille. Jean Véronis a pignon sur Web depuis plus de deux ans avec un blog riche et pointu sur l’analyse statistique du langage, Technologies du langage. Un mail puis un coup de fil à une voix au léger accent ensoleillé, et nous prenions date à Paris dans un restaurant de la rue Mouffetard qu’il fréquentait. L’homme chaleureux et cultivé m’avait ensuite introduite à l’ENST (Ecole nationale supérieure des télécoms) dans une conférence de l’Association pour le traitement automatique des langues qu’il a présidée.

Cet expert du text mining était tout sauf un vieux barbon arrogant. C’était un chercheur joyeux, pétillant, fureteur de nouveautés textuelles, alignant les idées à la chaîne. Trop tôt parti, accidentellement, dimanche, à 58 ans, @aixtal ne répond plus.

En 2006, le web entrepreneur Nicolas Voisin entamait un blog intitulé le Politic’show avec le projet de mener des entretiens fleuves avec des candidats à la présidentielle pour en sortir un peu de parler vrai. Une manne pour Véronis, qui songe immédiatement à exploiter statistiquement cette masse sémantique pour ses étudiants. «Il avait vu mon interview de Le Pen, et nous avons enchaîné ensemble avec François Bayrou, passé la journée avec José Bové, affronté la fin de non-recevoir de Ségolène Royal : Jean a tout vécu de A à Z», raconte Voisin.

Dans la foulée, les deux comparses publieront avec Estelle Véronis François Bayrou : confidences, et les Politiques mis au Net. Démonteur de langue de bois et de petites phrases, affable et disponible, Jean Véronis sera sollicité sur les plateaux télé, à la radio et dans la presse, pour commenter tel discours ou tel lapsus politique. Dans la veine de l’analyse critique du langage des politiques, il publiera avec Louis-Jean Calvet, Combat pour l’Elysée et les Mots de Nicolas Sarkozy. Consultant pour plusieurs entreprises, dont Orange et Wikio, ce sémanticien venait de créer avec une autre figure du Net, Benoît Raphaël, la société d’analyse de l’information en temps réel Trendsboard. Jean Véronis, «qui avait un grain de folie dans sa sagesse», dixit Nicolas Voisin, était reparti dans une nouvelle aventure. Vivant à fond, à la ville comme dans sa campagne du Sud qu’il adorait parcourir à cheval, soucieux de son quant-à-soi familial. Pas de mot à la hauteur de ce grand vide.

Frédérique ROUSSEL
 
http://ecrans.liberation.fr/ecrans/2013/09/11/jean-veronis-mot-de-la-fin_931213

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