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Rodin en son paradis d’antiques

Le Musée Rodin à Paris confronte l’œuvre du sculpteur à sa collection d’antiques, source inépuisable d’inspiration.

 

1/1/14 - 16 H 24

Auguste Rodin devant quelques-unes des pièces de sa collection d’antiques.

Auguste Rodin devant quelques-unes des pièces de sa collection d’antiques.

(Albert Harlingue / Roger-Violl)

Auguste Rodin devant quelques-unes des pièces de sa collection d’antiques.

 

(Albert Harlingue / Roger-Violl)

Auguste Rodin devant quelques-unes des pièces de sa collection d’antiques.

Avec cet article

« J’ai fait une collection de dieux mutilés, en morceaux, quelques-uns, chefs-d’œuvre. (…) J’aime ce langage d’il y a 2 ou 3 000 ans, plus près de la nature qu’aucun autre (…), leur grandeur m’est douce. Et tout ceci n’est pas mort, ils sont animés, et je les anime encore plus, je les complète facilement en vision, et ce sont mes amis de la dernière heure. » Ainsi Auguste Rodin évoquait-il, en 1905 dans sa correspondance, sa collection d’antiques. 

À la fin de sa vie, le sculpteur avait amassé quelque 6 000 œuvres, en majorité grecques ou romaines, mais aussi étrusques, égyptiennes ou asiatiques : des sculptures plus ou moins fragmentaires, des statuettes, des vases, toutes léguées à l’État en 1916… « À la villa des Brillants à Meudon, il commençait par montrer aux visiteurs cette collection avant de leur faire admirer ses propres œuvres », rappelle Bénédicte Garnier, l’une des commissaires de l’exposition « Rodin, la lumière de l’antique » présentée à Paris, après une première étape à Arles.

La référence de l’enseignement académique au XIXe siècle

Quelle fut l’influence de ces trésors sur l’artiste ? C’est ce que tente de montrer l’accrochage qui confronte une soixantaine d’œuvres de Rodin à une centaine de sculptures et moulages antiques de sa collection, plus quelques prêts de musées. La visite régulière du Louvre, puis un premier voyage en Italie en 1875, à 35 ans, l’avaient mis au contact des chefs-d’œuvre antiques, qui restaient, au XIXe  siècle, la référence de l’enseignement académique. Le jeune homme de L’Âge d’airain (1877) apparaît ainsi comme l’héritier des Captifs de Michel-Ange et des apollons antiques. Le Penseur (1880) semble garder l’empreinte du fameux Torse du Belvédère, conservé au Musée Pio-Clementino du Vatican. Tout comme les petites Femmes accroupies de Rodin se souviennent de L’Aphrodite accroupie du Louvre…

« Bien souvent toutefois, Rodin se réapproprie l’antique de telle façon que la source est difficile à identifier », note dans le catalogue Antoinette Le Normand-Romain. L’impudeur d’ Iris, par exemple, a-t-elle été influencée par ces statuettes égyptiennes Baubo de la collection de l’artiste, ou par l’Iris du fronton ouest du Parthénon, au British Museum ?

« Bonheur de vivre, quiétude, grâce, équilibre, raison »

La force intacte de ces « Dieux mutilés » a aussi encouragé l’artiste à oser, en pionnier, des œuvres fragmentaires, en dépit de l’incompréhension du public et des critiques : belles privées de bras comme la Vénus de Milo , réduite à leur torse nu « beau comme un vase antique », Homme qui marche acéphale, études de mains ou de pieds érigées en sculptures à part entière… Jouant à recomposer des œuvres à partir de fragments divers, Rodin y a même intégré parfois certains vases antiques de sa collection, telle cette coupe béotienne offerte aux ablutions d’une moderne Galatée.

« L’art antique signifie bonheur de vivre, quiétude, grâce, équilibre, raison », estimait le sculpteur qui, dans La Mort d’Athènes (1902), semble s’émouvoir de l’abandon par ses contemporains de ce lointain héritage, comme un paradis perdu.

« Rodin, la lumière de l’antique », Musée Rodin, Paris.

SABINE GIGNOUX

Jusqu’au 16 février 2014. Rens. : 01.44.18.61.10. Catalogue 400 p., 45 €.

 
 

1/1/14 - 16 H 24

http://www.la-croix.com/Culture/Actualite/Rodin-en-son-paradis-d-antiques-2014-01-01-1083406

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