Le nouvel accrochage des collections présente un ensemble important d’œuvres représentatives de l’intense activité artistique menée aux États-Unis après la deuxième guerre mondiale, autour de l’Abstraction. New York devient le centre de cette effervescence qui se manifeste dans les galeries (Peggy Guggenheim, Betty Parsons) et dans le débat critique. Cette présentation des collections met en évidence deux tendances de l’abstraction américaine, une très coloriste et matiériste proche des recherches de la "Colorfield Painting" (1), avec les œuvres de Morris Louis, Jules Olitski, ou Larry Poons, l’autre plus formelle, représentée par les artistes de l’"Hard Edge" (2) et du "Minimal Art".
Parmi les critiques qui marquent la réflexion sur l’art abstrait américain se trouvent Harold Rosenberg et Clement Greenberg. Ce dernier prône l’analyse purement formaliste de la peinture (formes, couleurs, surfaces, bidimensionnalité) et avance l’idée d’une peinture autoréférencée, qui se prend elle-même comme sujet. L’abstraction américaine affirme une nouvelle conception de l’espace pictural : sans profondeur, frontal et économe dans ses procédures.
C’est en janvier 1965, dans la revue "Art Magazine" que le critique d’art Richard Wolheim utilise le terme de "Minimal Art" pour désigner le travail d’artistes ayant une esthétique commune malgré des recherches diversifiées.
Ce qui les rassemble, c’est une tendance à la réduction au profit de formes géométriques simples et de structures primaires. Des systèmes sériels et modulaires s’associent à des processus de répétitions, de permutations, de combinaisons ou de variations de ces formes élémentaires.
Mais c’est surtout le refus de tout symbolisme, pour l’affirmation d’un art concret qui anime les recherches de Donald Judd, Carl Andre, Sol LeWitt, Robert Morris et de leurs précurseurs Frank Stella et Ellsworth Kelly. Il s’agit, pour reprendre l’expression de Donald Judd, de créer des "objets spécifiques" réfutant les catégories traditionnelles qui opposent la peinture et la sculpture et de produire des œuvres qui rentrent en résonance avec l’espace qui les entoure.
Elles offrent au spectateur une expérience esthétique nouvelle : il ne s’agit plus d’identifier les formes pour elles-mêmes mais de faire l’expérience physique d’une œuvre dans un milieu ou un environnement singulier.
MUSIQUE ET DANSE MINIMALISTES
Parallèlement aux recherches des artistes plasticiens se développent d’autres pratiques artistiques relevant de l’esthétique minimale. C’est à New York, au sein de la Judson Memorial Church, autour de la figure d’Anna Halprin, que s’expérimente une nouvelle conception de la danse. Entre 1960 et 1962, un groupe informel se constitue, composé de danseurs, de chorégraphes, de compositeurs et de plasticiens. Trisha Brown, Lucinda Childs, Yvonne Rainer pour la danse, Terry Riley, La Monte Young, Steve Reich, Philip Glass pour la musique animent les programmes de ce qui constituera bientôt le Judson Dance Theater.
Anna Halprin développe une nouvelle forme de danse, élaborée à partir de gestes du quotidien et complétement dépouillée des artifices théâtraux, liés aux ballets classiques.
De nombreux chorégraphes de ce groupe ont œtravaillé les processus de répétition de mouvements simples, ce qui les rapproche des compositeurs minimalistes. En effet, Terry Riley, Steve Reich ou encore Philip Glass utilisent de court motifs mélodiques harmoniques ou rythmiques qui, répétés, subissent d’infimes variations provoquant des effets psycho-acoustiques chez l’auditeur qui se sent alors comme bercé, hypnotisé.
FOCUS SUR UNE ŒUVRE PHARE DE LA COLLECTION // "ABGATANA II", FRANCK STELLA
Ce tableau de Franck Stella, "Agbatana II", appartient à la série des "Protractors" (Rapporteurs). Comme le nom de la série l’indique, Frank Stella utilise un rapporteur pour réaliser des variations de demi-cercles colorés qui fonctionnent comme des modules. Le titre "Agbatana II "renvoie au nom d’une ancienne cité d’Asie Mineure dont le plan était circulaire. Le numéro "II" indique le type de motif : il s’agit ici de déclinaisons autour de l’arc-en-ciel, évoquant les "Disques simultanés" de Robert Delaunay (1885 – 1941, fondateur de l’orphisme, mouvement issu du cubisme).
Stella applique des acryliques de différentes couleurs, plus ou moins rompues, rabattues, saturées, pour créer des contrastes de plans. La composition est structurée par le jeu de quatre toiles peintes, agencées comme des modules, dont la forme extérieure est déterminée par la découpe du châssis ("Shaped canvas"). À l’intérieur des toiles, les formes circulaires semblent se répéter, se croiser, se superposer, se chevaucher. Stella recherche ici une unité formelle dans le tableau, qui passe par la répétition et la mise en abyme du module et du motif.
CITATIONS
"Ma peinture est fondée sur cette réalité concrète qu’il n’y a là rien d’autre que ce que l’on voit. Elle est réellement un objet." Frank Stella
"L’espace réel est intrinsèquement plus puissant et spécifique que la peinture sur une surface plane. De toute évidence une chose en trois dimensions peut adopter toute forme régulière ou irrégulière et peut entretenir toute relation avec le mur, le sol, le plafond, l’espace, les pièces ou l’extérieur." Donald Judd
"Mon travail est athée, matérialiste et communisant. Il est athée parce qu’il est sans forme transcendante, sans qualité spirituelle ou intellectuelle. Matérialiste parce qu’il est fait de ses propres matériaux. Et communisant parce que la forme est accessible à chaque individu à titre égal." Carl Andre
"Simplicité de forme ne signifie pas nécessairement simplicité de l’expérience." Robert Morris
GLOSSAIRE
(1) "La Colorfield painting" : ("peinture du champ coloré") constitue l’une des tendances de l’Expressionisme Abstrait Américain. Elle se caractérise par de grandes toiles qui présentent de grandes surfaces saturées de couleur. La notion de Colorfield développée par le critique Clement Greenberg dans son essai intitulé Modernist Painting, implique que seules les réactions optiques comptent dans la peinture, évacuant ainsi tout autre sujet que la couleur elle-même.
(2) "Hard Edge" : tendance de la peinture abstraite américaine, apparue dans les années 1950 qui se caractérise par la rigueur géométrique, l’économie formelle et la netteté des surfaces de couleurs en aplats.
VERNISSAGE
Vendredi 17 janvier 2014 de 18 h à 20 h.
HORAIRES D'OUVERTURE AU PUBLIC // VISITES GUIDÉES // TARIFS
CATALOGUE DES COLLECTIONS XXe SIECLE "D'un siècle à l'autre", catalogue des collections XXe siècle du Musée d'Art Moderne. À l'occasion de son vingtième anniversaire (1987-2007), le Musée d'Art Moderne a publié aux éditions Skira un nouveau catalogue de ses collections du XXe siècle. Tout en donnant une vision d'ensemble de la collection et de ses chefs-d'œuvre, cet ouvrage met en avant la politique d'acquisition du musée durant ces vingt dernières années.
Une édition française et une édition anglaise / Editeur : Skira, Paris / Prix : 35 euros version brochée ; 49 euros version reliée / Pages : 272 - Illustrations : 285 - Format : 24 X 28 cm / Date de parution : décembre 2007 / Disponible à La Boutique du musée.
RESSOURCES
L'ensemble de ses ressources du Musée sur les collections (peinture, sculptures, photos, design, art ancien) et les expositions temporaires. Ressources
- Dossier pédagogique Réalisé par le service des publics, il constitue un outil précieux pour tout enseignant qui souhaite préparer sa visite, ou la prolonger par une expérimentation ou un atelier en classe, approfondir certaines œuvres ou notions abordées lors de la visite, etc.
Disponible sur demande : à l'accueil du Musée, ou contacter Marie Mestre.
RENDEZ-VOUS AUTOUR DE L'EXPO
CONCERT Vendredi 17 janvier // 21 h // Accès dans la limite des places disponibles // Réservation uniquement auprès de l'Opéra Théâtre : RÉSERVER Philip Glass, A forty-year retrospective
CONFÉRENCES // COLLOQUES
Samedi 18 janvier // 11 h > 12 h 30 // À l'Opéra-Théâtre de Saint-Étienne // Réservation obligatoire auprès de l’Opéra-Théâtre : tél. 04 77 47 83 40 Table-ronde "The New York Moment"
VISITES
Mardi 21 janvier // 18 h // Gratuit // Sur réservation Visite enseignants
Mercredi 22 janvier // 14 h // Gratuit // Sur réservation Visite enseignants
Jeudi 20 février // 14 h 30 // Gratuit // Sur réservation Visite animateurs
Jeudi 23 janvier // 18 h 30 // Sur réservation Un soir au Musée
L'EXPOSITION DANS LES SALLES DU MUSÉE
Un système de protection signale par une sonnerie toute personne s’approchant trop près des œuvres. Merci de vous tenir à une distance raisonnable des œuvres et des objets.
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