Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Quatuor viennois au Grand Palais
Vienne, une cité en pleine mutation
Aborder Vienne au tournant du XIXème et du XXème siècles, c'est en montrer l'effervescence et les bouleversements que connaît la capitale de l'empire austro-hongrois. Or, c'est au niveau culturel que ces changements se font le plus ressentir. En 1897, une association nommée Sécession voit le jour à Vienne. Elle réunit des artistes dont l'objectif est de sortir des règles fixées par l'enseignement académique et de présenter de nouvelles formes artistiques. Les Sécessionnistes ne veulent pourtant pas mener une quelconque révolution, ils souhaitent seulement faire évoluer leur art tout en préservant leur héritage. A travers 91 tableaux et 55 dessins, provenant tous de collections étrangères, cette exposition dresse le portrait des principaux acteurs de la Sécession Viennoise que sont Klimt, Schiele, Moser et Kokoschka. Les uvres présentées, toutes réalisées entre 1890 et 1918, donnent ainsi un large panorama sur cette évolution qui toucha le langage pictural autrichien.
Afin de retracer au mieux le parcours de ces peintres de renom et de ce mouvement, l'exposition a été divisée en 3 sections correspondant aux codifications traditionnelles de la peinture : Histoires, Paysages et Figures. Ces groupements thématiques ne suffisant pas, des affinités plastiques ont également été favorisées. Des critères strictement formels ont donc permis de mettre en valeur les multiples facettes qui firent le succès des "Sécessionnistes".
Histoires : témoin de l'évolution du vocabulaire formel
Commencer cette exposition par une section sur la peinture d'histoire n'a rien d'exceptionnel. Cela répond tout simplement à l'ancienne hiérarchie des genres picturaux. Les uvres exposées dévoilent la primeur de la science de la composition à laquelle ces peintres sont parvenus. L'intérêt pictural est en effet supérieur au contenu même du tableau. Ces artistes ont donc pour ambition d'atteindre un art monumental. Pour cela, Klimt et Kokoschka se sont fondés sur des motifs classiques empruntés à la mythologie grecque ou à la religion chrétienne. Les uvres historiques, comme Pallas Athéné peinte par Klimt en 1918, suit la loi de la frontalité. Ce tableau au format carré s'impose dès l'arrivé du visiteur dans la première salle de l'exposition. La déesse protectrice des arts tient dans sa main la sculpture de la vérité nue au lieu de la victoire. Cette métaphore du triomphe de l'avant-garde sur le passé, très critiquée lorsqu'elle fut présentée en 1898, devient alors le symbole de la Sécession viennoise. Klimt joue donc plus sur l'allégorie et combine décor et ornementation. Dans Danaë, par exemple, le parti pris pour l'art décoratif est évident. Ceci le différencie donc des uvres de Kokoschka qui sont fondées sur le prisme. Les angles aigus et les aplats de couleur dominent les peintures de cet artiste. Son premier tableau religieux, Véronique et la Sainte Face, témoigne de son admiration pour cette technique qu'il lui permet de se libérer des contraintes et des règles du réalisme. Moser s'inspire quant à lui des légendes germaniques. Ainsi Judith et Holophène s'inspirant de l'histoire de Judith dans l'Ancien Testament, évoque la "femme forte". Il impressionne par la simplification, la rigueur de sa composition et l'autonomie qu'il accorde à la clarté des formes. La couleur et la lumière priment dans ses uvres. Ainsi Vénus dans la grotte et Le Marcheur ont été créés ensemble comme paire. La grâce féminine s'oppose à la force masculine. L'ovale domine la composition de ses uvres. Le Marcheur dont il fera deux versions est à identifier à Odin. Moser emploient ainsi de nombreuses variations chromatiques irradiant de couleurs ses tableaux. Du coup, il s'échappe de ses toiles une certaine énergie. La Lumière, composition monumentale, consacre la puissance des couleurs. Schiele utilise des sujets plus personnels comme la naissance, l'amour ou la mort. Ses uvres comme Mère aveugle, Mère décédée ou Agonie, sont réalisées essentiellement à base de motifs ornementaux entrelacés. Les formes s'imbriquent formant une sorte de patchwork. Dans Le Visionnaire, c'est le thème de la dualité qui est abordé. Le peintre y est représenté au premier plan accompagné de son alter ego, situé en arrière plan. Or, ce dernier apparaît comme une menace et symbolise la mort proche. Dans cette section, on constate que les artistes abandonnent la perspective pour revenir à la surface réelle des objets sur lesquels ils peignent.
Paysages entre lumière et obscurité
La partie intitulée "Paysages" présente des tableaux où la nature est très stylisée tout en s'abstenant de classicisme. Les motifs assez conventionnels laissent présager l'abstraction. Ces tableaux ne sont pas pour la plupart le résultat de commandes publiques ou privées. Elles sont réalisées en majorité pour le simple plaisir de l'artiste. Dans la peinture de paysage, il n'y a aucune tentative de narration ou de psychologie ce qui laisse la place libre à la recherche formelle. Chez Klimt comme chez Schiele, la verticalité tient une place importante dans les peintures de paysage des deux hommes. Sur l'Attersee et Etang Marécageux de Klimt, l'étendue d'eau est présentée comme une surface verticalisée où le visiteur doit élever son regard jusqu'à la ligne d'horizon placée en haut de la toile. L'absence de profondeur est évidente car les deux peintres recherche une structure bidimensionnelle. Ces éléments se retrouvent dans Maisons avec linges de couleur de Schiele.
Figures, le point fort des "Sécessionnistes"
Mais cette exposition ne pouvait se faire sans une section "Figures". Ces hommes n'ont pas grand chose en commun à part leur origine et leur goût pour les portraits. Ainsi les 32 tableaux de figures isolées, d'autoportraits et de portraits de groupe qui sont présentés montrent la manière dont évolue cette catégorie. Le portrait officiel d'apparat est abandonné au profit d'une représentation plus décorative des personnes. L'émotion prime sur la technique. C'est ainsi qu'a émergé le portrait expressionnisme. Dans les portraits que réalisent Schiele et Moser, c'est le regard qui prime. Klimt préfère les portraits de femme alors que Kokoschka peint plus les hommes. Les peintures comme les dessins de ces quatre artistes mettent en lumière la vitalité du monde artistique viennois.
Cette exposition propose de plonger dans cette ville en pleine mutation en découvrant comment ces peintres ont fait face à ces bouleversements et ont marqué leur temps.
En savoir plus Vienne 1900
EN IMAGES Klimt Schiele Moser Kokoschka Vienne 1900 | |||
|