Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Les débats sur la collection Peggy Guggenheim au tribunal, à Paris
LE MONDE | 22.05.2014 à 10h19 • Mis à jour le 22.05.2014 à 16h49 | Par Harry Bellet
Le musée Peggy Guggenheim à Venise, en 2009. | AFP/MARCO SABADIN
L'affaire Guggenheim a été entendue, mercredi 21 mai, par les juges du tribunal de grande instance de Paris. Elle oppose à la Fondation Solomon R. Guggenheim de New York certains descendants de Peggy Guggenheim (1898-1979), une riche héritière américaine, nièce de Solomon, qui a été une galeriste pionnière à Londres puis à New York.
En 1949, elle fit l'acquisition du Palazzo Venier dei Leoni, à Venise, et s'y installa avec ses collections. Pour finir par léguer l'ensemble à la Fondation Solomon sous certaines conditions – que certains de ses descendants n'estiment pas respectées.
Ces collections sont un des éléments-clés du procès : sont-elles, de par leur disposition et le refus réitéré qu'elle avait d'en prêter des fragments ou de les disperser, une « oeuvre de l'esprit » et dont l'intégrité devrait à ce titre être protégée comme le soutient Me Bernard Edelman ?
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Ou au contraire une simple accumulation d'oeuvres disparates, comme le plaide Me Pierre-Louis Dauzier, qui cite, entre autres, les exemples de Bernard Arnault et de François Pinault, collectionneurs certes, mais « pas auteurs » ? « Collectionner n'est pas créer », affirme l'avocat, qui défend la fondation new-yorkaise.
LES VOLONTÉS DE LEUR GRAND-MÈRE ONT ÉTÉ TRAHIES
Me Edelman et Me Bourdon ont plaidé pour ceux des descendants qui estiment que les volontés de leur grand-mère et arrière-grand-mère ont été trahies. Car Peggy Guggenheim a eu deux enfants, un fils, Simbad, et une fille, Pegeen. Si les descendants de Pegeen étaient au tribunal en tant que plaignants, ceux de Simbad soutiennent au contraire la partie adverse. Trois d'entre eux ont signé une attestation en ce sens, une autre, qui travaille pour la fondation new-yorkaise, s'est abstenue.
Un autre point litigieux concerne une précédente procédure, qui s'était tenue dans les années 1990 pour les mêmes faits. A l'époque déjà, certains des actuels plaignants avaient constaté, lors d'une visite à Venise, que l'esprit de leur grand-mère n'était, selon eux, pas respecté. La collection était montrée de manière fragmentaire, des pièces étrangères y étaient substituées. Le palazzo de Peggy, reflet de son goût et de celui d'une époque, était devenu la banale et mouvante extension de la Fondation Solomon R. Guggenheim.
Après plusieurs péripéties juridiques – globalement en sa faveur –, la fondation avait accepté un règlement à l'amiable fondé sur un protocole signé en 1996, qui garantissait notamment aux descendants de Peggy qu'ils seraient consultés sur d'éventuelles modifications de l'ordonnancement des collections.
1 EURO DE DOMMAGES ET INTÉRÊTS, LES LIEUX REMIS EN ÉTAT
Pour les défendeurs, selon Me Dauzier, la demande des plaignants est irrecevable aujourd'hui, car la chose a déjà été jugée dans les années 1990. Pour Me Bernard Edelman, au contraire, la transaction qui s'est ensuivie se substitue au jugement.
Ce point est crucial : si les juges suivent l'argumentation du premier, l'affaire s'arrête là. S'ils entendent ceux de Me Edelman, cela deviendra un feuilleton judiciaire des plus croustillants. Car les plaignants réclament, outre 1 euro de dommages et intérêts, que les lieux soient remis en état, voire que soit révoquée la donation faite par Peggy Guggenheim.
Or le lieu accueille 400 000 visiteurs payants par an, une manne pour la Fondation Solomon R. Guggenheim, qui n'est pas prête à se laisser faire.
Et si elle regrette la mauvaise publicité que lui fait cette affaire, au point de s'étonner, dans un droit de réponse, « que Le Monde ait donné un tel écho », elle a toutefois mandaté une célèbre agence de relations publiques. Ses représentantes distribuaient aux journalistes à la sortie de l'audience un communiqué soutenant leur point de vue. Une pratique inhabituelle au Palais. Jugement le 2 juillet.