Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Catégories : CDI du Lycée Hôtelier Le Renouveau, La restauration, MON TRAVAIL
Le restaurateur Jean-Pierre Haeberlin tire sa révérence
Jean-Pierre Haeberlin à L'Auberge de l'Ill, à Illhaeusern (Haut-Rhin), en octobre 2011. Crédits photo : Kidlimonad / Andia.fr
Âgé de 89 ans, issu d'une famille de cuisiniers, Jean-Pierre Haeberlin s'est éteint hier. Il avait fondé avec son frère, Paul, L'Auberge de l'Ill, table alsacienne triple étoilée depuis 1967.
Avec le décès de Jean-Pierre Haeberlin jeudi, à Illhaeusern, en Alsace, c'est encore un membre de la flamboyante bande à Paulo (Bocuse) qui tire sa révérence. L'un des derniers représentants de cet âge d'or de la gastronomie française qui, entre les années 1960 et 1980, avec les compères Vergé, Troisgros, Lenôtre, Chapel, Guérard, racontait autant des histoires de plats et de recettes que d'hommes.
Âgé de 89 ans, il avait cofondé avec son frère Paul (disparu en 2008) le restaurant de L'Auberge de l'Ill, qui devait se hisser dès 1967 au rang de 3-étoiles, faisant du même coup d'Illhaeusern, paisible bourgade du Haut-Rhin, un point de passage obligé pour les gastronomes sans frontières. Au sein de la fratrie, les rôles étaient distribués depuis toujours. À Paul, l'aîné, le soin de perpétuer après guerre la dynastie de cuisiniers (ou plutôt cuisinières) qui, depuis deux générations déjà, régalaient les environs de matelottes de truites au riesling, choucroutes, écrevisses et autres omelettes paysannes. À Jean-Pierre celui de s'occuper de la gestion du restaurant, de l'accueil et de la décoration. «Drôle d'attelage que ces deux-là ; mais sacrément efficace… Mon père était aussi taiseux, timide et secret que mon oncle est bavard, vif et curieux du monde», confiait en 2012 Marc Haeberlin, fils de Paul, à Nicolas Chatenier, auteur du remarquable Mémoires de chefs (Textuel).
Au lendemain de la guerre, les deux frères reprennent les rênes de la restauration familiale, mais, entre-temps, la demeure initiale a été entièrement détruite. Pour la remplacer, ils construisent donc au même endroit L'Auberge de l'Ill, qui sera terminée en 1950. Jean-Pierre, qui a étudié le paysagisme et la peinture à l'École supérieure des arts décoratifs de Strasbourg avec le peintre Roger Mühl, est tout naturellement préposé à l'aménagement des lieux et du jardin, transformant l'ancien potager en une prairie arborée de saules qui s'inclinent harmonieusement vers la rivière. «C'est lui qui va donner son standing à l'Auberge, créant pas à pas l'écrin sans lequel le talent de mon père n'aurait pas suffi à faire sa renommée», se souvient encore son neveu.
L'homme du détail
Jean-Pierre Haeberlin est l'homme du détail, celui qui a le souci du beau, veille à la bonne tenue du personnel et sait recevoir les clients, simples voisins ou hôtes prestigieux. Des dizaines de têtes couronnées et chefs d'État ont en effet appris à connaître les petites routes du vignoble alsacien qui mènent à Illhaeusern. Fidèles à leurs racines familiales et à leur terroir, les deux frères font évoluer la carte, qui mêle tradition et modernité. Aujourd'hui, parmi les spécialités proposées, on trouve toujours la terrine de foie gras d'oie, la truffe sous la cendre (Paul avait fait son stage professionnel à la Rôtisserie Périgourdine, où il avait appris à travailler le diamant noir), le homard Prince Vladimir, la mousseline de grenouilles Paul Haeberlin ou encore le saumon soufflé…
«Mon oncle faisait encore des tours en salle il y a quelques mois à peine, a déploré Marc Haeberlin, mais son état s'est rapidement dégradé depuis, à la suite d'une maladie.» Peintre, aquarelliste (Les Neuf Affluents de l'Ill, 2012), dessinateur, le vieil homme était aussi collectionneur de peintures et faïences alsaciennes du XVIIIe siècle.
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