Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Lucien Clergue, chantre de l'art photographique, fêté par Arles
PhotographieA 80 ans, Lucien Clergue demeure un chantre infatigable de la photographie, qu'il a contribué à faire reconnaître comme une discipline artistique à part entière. Arles, sa ville natale, célèbre son talent avec plusieurs expositions. Un hommage qu'il reçoit avec "beaucoup d'émotion", confie-t-il à l'AFP.
Les Rencontres photographiques d'Arles, inaugurées lundi, déroulent sur une longue cimaise ses 60 ans de carrière: ruines, enfants costumés en saltimbanques, corrida, gitans, images de Picasso et de Cocteau, nus féminins, paysages camarguais...
Simultanément, le musée Réattu, dirigé par Pascale Picard, présente un important ensemble de photographies de Lucien Clergue offertes par l'artiste sur plusieurs décennies.
Ces célébrations suscitent "beaucoup d'émotion chez moi", déclare Lucien Clergue, apparu fatigué ces derniers temps. "Les 80 ans, on ne les a pas deux fois", souligne le photographe, qui a été élu à l'Académie des Beaux-arts en 2006, faisant entrer le 8ème art sous la Coupole pour la première fois.
Né en août 1934 dans une famille d'épiciers, Lucien Clergue est arrivé à la photo un peu par défaut. Il apprend d'abord le violon mais n'a pas les moyens d'aller au conservatoire. "J'ai été bloqué à cause des finances. J'étais seul avec ma mère."
La vie active, pour lui, commence par l'usine. "La photo, je la pratiquais entre midi et 2 heures, par passion".
Le jeune homme a de l'audace. "Un jour de 1953, je suis allé aux Arènes d'Arles où Picasso venait d'assister à une corrida et je l'ai interpellé pour lui montrer mes photos. C'étaient des recherches, avec des flous, des bougés. Il m'a encouragé à continuer".
"J'ai alors pensé à la période rose de Picasso. J'ai trouvé des gosses dans la rue et je les ai habillés en acrobates pour les photographier".
Cette même année, dans un magazine, il découvre un nu sculptural et graphique du photographe américain Edward Weston. L'enthousiasme est total. Les nus de Clergue s'inscriront dans cette veine.
-'A bras ouverts'-
En 1955, il se met à faire des photographies d'animaux morts. Et se rend chez Picasso à Cannes pour lui montrer ses travaux. "Il m'a accueilli à bras ouverts. J'ai eu un choc".
A partir de ce moment, il devient un véritable ami de la famille Picasso, jusqu'à la mort du peintre en 1973. "Picasso avait beaucoup d'affection pour moi. Je lui dois tout".
Picasso le présente à Jean Cocteau. L'écrivain préface l'ouvrage "Corps mémorables" (Seghers) où les photos de nus de Clergue accompagnent des poèmes d'Eluard.
Cocteau l'engage aussi sur le tournage du film "Le testament d'Orphée" en 1959.
Clergue commence à vivre de son art et peut enfin quitter son usine. "Je suis libre le 1er janvier 1960".
Et puis il y a son "aventure gitane": Clergue, qui a rencontré en 1955 le guitariste Manitas de Plata en Camargue, l'aide à faire son premier disque. Il devient son manager pendant un an, puis son directeur artistique.
Dès 1961, Clergue expose au MOMA (Museum of Modern Art) de New York alors dirigé par Edward Steichen.
Il découvre qu'aux Etats-Unis, la photographie est déjà très reconnue par les musées et il se met en tête de faire la même chose en France.
Il aide Jean-Maurice Rouquette conservateur au musée Réattu, à créer en 1965 un département de la photographie au sein de l'établissement, le premier en France. Pour cela il écrit aux photographes célèbres de l'époque pour qu'ils donnent des oeuvres. Et ça marche.
Puis en 1969, il est l'un des fondateurs des Rencontres d'Arles. Clergue est également l'un des initiateurs de l'Ecole nationale supérieure de la photographie, créée en 1982 à Arles.
L'autodidacte a aussi donné à la photographie ses lettres de noblesse universitaires en soutenant une thèse d'esthétique uniquement composée d'images, sur "Le langage des sables", en 1975, en présence de Roland Barthes.
Arles est resté le point d'ancrage de l'artiste et il y vit toujours avec sa famille.