Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
La mode des légumes anciens connaît un coup d'arrêt
Après sept ans de croissance continue, ils commencent à être concurrencés par les légumes qui s'adaptent aux milieux salés, tels que la salicorne.
Les légumes anciens ou oubliés (topinambours, panais, betteraves, navets colorés…) ont fait depuis quelques années un retour spectaculaire dans nos assiettes. «Nous avons multiplié par trois en sept ans nos expéditions vers Rungis, passant de quatre à douze palettes de 800 kilos par semaine, explique Vincent Elegouet, maraîcher à Plougoulm, dans le Finistère, qui livre la maison Butet, un grossiste de Rungis spécialisé dans les restaurants étoilés parisiens. J'ai commencé par le radis noir, les courges puis la capucine tubéreuse, bien plus rémunérateurs que le chou-fleur.»
Trois raisons expliquent ce phénomène. Tout d'abord, l'engouement pour les légumes anciens a été suscité par les grands chefs, qui les ont remis au goût du jour dans leurs recettes. Certains, comme Alain Passard (L'Arpège), les cultivent même dans leur propre potager. «Ils les ont fait connaître à un plus large public en vantant leurs qualités gustatives à travers les émissions de télé sur la gastronomie», souligne Sébastien, vendeur chez Butet.
Autre raison de ce succès, le retour aux sources. Une valeur de plus en plus forte parmi les consommateurs, surtout par temps de crise. «Ils font plus confiance aux légumes anciens car ils sont majoritairement produits en France», souligne Jean-Claude Duplessis, un particulier qui a monté un potager ouvert au public de légumes anciens dans la Nièvre, près de La Charité-sur-Loire.
Enfin, pour ces légumes anciens, on utilise moins de pesticides, et ils sont source de bienfaits pour la santé. «On met moins de traitements, seulement un filet contre la mouche sur les radis noirs, nos courges sont quasi bio, confirme Vincent Elegouet. Par ailleurs, leurs qualités nutritives ont été mises en avant par les spécialistes.»
Toutefois, la mode des légumes anciens pourrait bien ne pas durer. «Elle semble avoir atteint son apogée, explique Manuel, responsable alimentaire aux célèbres fermes de Gally à Saint-Cyr-l'École, dans les Yvelines. Le topinambour y est toujours autant demandé, comme le panais. En revanche, le rutabaga a moins de fans.»
Question prix, si le topinambour reste relativement accessible (autour de 4 euros le kilo à la ferme de Gally), le cerfeuil tubéreux ou le crosne, produits de Noël, le sont beaucoup moins. Ils coûtent respectivement 19 et 29 euros le kilo actuellement. «Nous ramassons manuellement nos légumes anciens. Pour le crosne, c'est très méticuleux. Il faut quatre heures pour avoir un kilo», explique Vincent Elegouet. Pratiquement, ces légumes aux formes moins régulières sont aussi moins faciles à travailler que les produits conventionnels. «Il faut du temps pour les préparer et les cuisiner», reconnaît Jean-François Girardin, ex-chef de cuisine au Ritz.
Sentant le vent tourner, Vincent Elegouet a été l'un des premiers maraîchers à cultiver de la betterave de couleur. Il travaille désormais sur les légumes halophiles, adaptés aux milieux salés. La salicorne, la mertensia au goût d'huître ou l'épinard de mer sont les mets des tables du futur.
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