C'est un petit garçon nu en acier. Il est surdimensionné (2,40 m de hauteur) et brandit une grenouille. Il est signé de l'artiste américain Charles Ray. Aujourd'hui, cette sculpture est devenue l'emblème d'une nouvelle Venise symbolisée par la Pointe de la douane. Derrière l'énigmatique personnage, 5 000 mètres carrés d'un bâtiment des douanes du XVIIe siècle laissé à l'abandon pendant trente ans avant d'être rénové par l'architecte japonais Tadao Ando. Il a été obtenu de haute lutte contre la Fondation Guggenheim par l'homme d'affaires et collectionneur François Pinault (propriétaire du Point) après qu'il a racheté le Palazzo Grassi sur l'autre rive du Grand Canal. Deux ans de travaux et 20 millions d'euros plus tard, la Pointe de la douane ouvrait le 6 juin 2009, pour montrer une sélection de la collection Pinault.

Ces deux lieux font désormais partie d'un itinéraire qui place tous les deux ans la vieille, l'auguste Sérénissime à l'épicentre mondial de l'art du XXIe siècle. C'est pour visiter sa fameuse Biennale, qui ouvre le 4 juin, que, venus de toute la planète, ceux qui s'intéressent à la création artistique actuelle font le voyage à Venise. Au bout de la ville, dans les Giardini, trente pavillons représentent les pays invités à concourir et, partout dans la Cité des doges, quatre-vingt-sept nations exhibent leurs créateurs. Quant à l'Exposition internationale, grand-messe censée donner le la des tendances, elle est orchestrée par une commissaire suisse, Bice Curiger. Un giga-show avec 82 artistes qui s'étend dans l'immensité de l'Arsenal. La France, installée dans les Giardini, est représentée par Christian Boltanski. Son installation vénitienne, encore mystérieuse, devrait évoquer la vie, les bébés et, dit-il, l'idée de chance qui préside à la naissance de ces êtres humains.

Lueur d'espoir

Dans ce circuit contemporain, le Palazzo Grassi et la Pointe de la douane, dirigés depuis juin 2010 par Martin Béthenod, sont des passages-clés. Depuis le 10 avril, on peut visiter une exposition dans les bâtiments de la Douane. Titre : "Éloge du doute". Commissaire : la Française Caroline Bourgeois. Propos : à la même époque, des artistes peuvent créer des choses très différentes tout en étant, chacun dans leur genre, pertinents. En juin, pour la Biennale, l'autre lieu de la Fondation Pinault, le Palazzo Grassi, présentera sa nouvelle exposition intitulée "Le monde vous appartient". En attendant, avec "Éloge du doute", la Pointe de la douane proclame que le monde est dur, mais qu'il reste une lueur d'espoir. Celle qui consisterait à revenir aux choses simples, comme le montre le petit garçon de Charles Ray observant la grenouille.

"Éloge du doute", Pointe de la douane. Jusqu'au 31 décembre 2012. "Le monde vous appartient", Palazzo Grassi. Du 2 juin au 31 décembre. www.palazzograssi.it. 54e Biennale de Venise, du 4 juin au 27 novembre. www.labiennale.org.