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La ville de Paul Bocuse fête la gastronomie

La première Biennale internationale du goût s’est ouverte samedi par un banquet gargantuesque, sous le tunnel de la Croix-Rousse. L’événement est organisé en marge du Salon international de la restauration, de l’hôtellerie et de l’alimentation, rendez-vous planétaire de la profession.

 

26/1/15 - 09 H 00

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Le tunnel de la Croix-Rousse, rebaptisé pour l’occasion « tunnel du goût », accueille un comptoir...

Élisabeth RULL/BIG

Le tunnel de la Croix-Rousse, rebaptisé pour l’occasion « tunnel du goût », accueille un comptoir gastronomique de 1,7 km de long.

La douce odeur des légumes moulinés réchauffe l’atmosphère encore chargée de la neige tombée tout le jour. De la joue de bœuf effilochée nage à la surface de la soupe, préparée sous les ordres de Christophe Muller.

Pour l’occasion, le bras droit de Paul Bocuse a pris ses quartiers dans la cuisine centrale des Hospices civils de Lyon, houspillant avec bienveillance ses commis. C’est que la commande était copieuse : deux mille litres d’une soupe aux vingt-sept ingrédients, composée par Paul Bocuse lui-même.

La ville de « Monsieur Paul » a banqueté samedi soir comme jamais. Réconfortés par le breuvage tiède, dix mille Lyonnais ont savouré quenelles et rillettes de carpe… sous le tunnel de la Croix-Rousse. Pour une fois, ce n’est pas sous celui de Fourvière que cela bouchonnait.

Les artisans du goût réunis sur le même comptoir

Traversé par un interminable comptoir de 1,7 kilomètre fixé sur la rambarde séparant la voie de bus de la piste cyclable, l’ensemble de l’ouvrage a été investi par tout ce que la ville compte d’artisans. Des petits mitrons pétrissent la pâte des meules de pain à la mie fondante. Des pâtissiers confectionnent des tartes pralinées scintillantes. Des bouchers bardent délicatement des paupiettes de veau. Des cuisiniers plongent une compote de mangue dans de l’azote liquide, avant de faire déguster le sorbet égayé de pépites de meringue aux passants, déambulant un verre à la main.

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« Incroyable ! », lâche, l’eau à la bouche, un garçonnet fasciné par un plateau de huit cents fromages. « Le plus grand du monde », assurent les organisateurs de cette première Biennale internationale du goût. Jusqu’à mercredi, les rendez-vous gastronomiques se succéderont dans la ville pour donner chair à cet événement au sigle tout trouvé : « B ! G ».

Défendre le savoir-faire à la française

D’autres records tomberont – la plus grande salade de fruits (5 500 kg) ou le plus grand mojito (2 500 litres)… Ces performances secondaires cachent l’essentiel : « Pour nous, c’est une occasion unique de valoriser nos métiers », glisse un charcutier.

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Empalé sur un pic de glace, un merlu dressé sur ses nageoires fend l’air, un bar planté entre les dents. « Un vrai étal », apprécie Jean-Luc Vianey en prenant du recul sur sa création, comptant quarante espèces de poissons, « tous issus de la petite pêche artisanale, une heure de bateau, pas plus ».

Poissonnier-écailler à la Croix-Rousse, il ne s’est pas fait prier pour venir représenter sa profession. « Regardez comme c’est beau ! On aimerait éduquer le regard et le goût des Lyonnais, les persuader de franchir de nouveau les portes des poissonneries. Il n’en reste que cinq à Lyon », regrette-t-il, en coupant de fines languettes de saumon – « sans OGM, sans hormones, sans pesticides », précise-t-il, à toutes fins utiles.

185 000 personnes présentes, dont 19 000 chefs

Aussi pantagruélique soit-il, le buffet n’en demeure pas moins « anecdotique », selon Dominic Moreaud. Pour ce chef lyonnais, l’événement est ailleurs, sur l’autre rive du Rhône, dans les entrailles de la Cité internationale. Une cité interdite aux habitants durant la semaine. « Les Lyonnais n’ont pas conscience que l’on organise là-bas le plus important salon gastronomique au monde », souffle le colosse au crâne rasé.

D’ici à mercredi, quelque 185 000 personnes, dont 19 000 chefs, arpenteront en effet les travées du Salon international de la restauration, de l’hôtellerie et de l’alimentation (Sirha), ou supporteront les cuisiniers qui tenteront de décrocher le Bocuse d’or – truite fario et pintade fermière des Landes au menu.

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Des professionnels uniquement, comme Guillaume Mallet qui y a acheté les fourneaux de son restaurant « L’Étage ». « La Biennale est une bonne manière de convier les habitants à la fête », reconnaît-il, fouettant un fumet de poisson tout en surveillant la réduction de son jus de veau, qui agrémentera le repas servi sur la terrasse éphémère dressée sur la voie de bus…

Quand elle aura replié sa terrasse, la Biennale du goût donnera rendez-vous au Lyonnais en 2017. C’est à cet horizon que la ville doit inaugurer la Cité de la gastronomie. Un espace grand public occupera alors les bâtiments les plus anciens de l’Hôtel-Dieu, au bord du Rhône. Paul Bocuse investira pour sa part le réfectoire des Sœurs de l’ancien hôpital. Là même où exerça un certain François Rabelais.

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Lyon et la « gastrono-diplomatie »

Il n’était pas là samedi soir mais son nom était sur toutes les lèvres. Paul Bocuse, 89 ans le 11 février, fête cette année un demi-siècle de grande cuisine : son Auberge du Pont de Collonges décrochait en 1965 sa troisième étoile au guide Michelin. Pour l’occasion, une campagne mondiale de communication associera Lyon à « l’excellence gastronomique ».

Présent sur place, Laurent Fabius a évoqué samedi cette opération de « gastrono-diplomatie » que soutient le ministère des affaires étrangères dans le cadre des « contrats de destination » valorisant le tourisme dans l’Hexagone. Ainsi, bien qu’elle ne compte aucun établissement classé au « World’s 50 Best Restaurants » , qui fait autorité, la ville aux 64 chefs étoilés, entend faire fructifier l’héritage des « mères », qui ont élevé la cuisine locale à des sommets.

Déjà, Lyon se prévaut d’organiser le « Davos de la gastronomie », en accueillant demain, le « World Summit Cuisine », dans le cadre du Salon international de la restauration, de l’hôtellerie et de l’alimentation. Un salon créé par « Monsieur Paul » et que préside son fils, Jérôme Bocuse.

BÉNÉVENT TOSSERI (à Lyon)

Biennale internationale du goût, jusqu’au 28 janvier. Rens. : www.big-lyon.com.

 
 

26/1/15 - 09 H 00

http://www.la-croix.com/Culture/Actualite/La-ville-de-Paul-Bocuse-fete-la-gastronomie-2015-01-26-1272789?xtor=EPR-9-%5B1300776897%5D

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