Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
A Lyon, la « vélorution » est en marche
Le trafic cycliste a été multiplié par trois à Lyon depuis l’introduction des vélos en libre-service, il y a dix ans.
19/5/15 - 11 H 42
Les jeunes professionnels composent le gros du contingent, provoquant des bouchons de deux roues sur les grands axes.
Avec son garde-boue rouge et sa silhouette trapue, le Vélo’v ne passe pas inaperçu. À chaque coin de rue, 58 000 abonnés peuvent retirer l’un des 4 000 vélos attachés aux bornes de 350 stations.
Mis en place voilà dix ans jour pour jour, le premier service de vélos en libre-service « a favorisé la pratique du vélo en ville, estime Geneviève Laferrère, vice-présidente de la Fédération des usagers à bicyclette. Il a levé un frein pour les gens qui ne peuvent pas le garer chez eux ou qui ne savent pas l’entretenir. »
Mieux, « les Vélo’v ont fait sortir les cycles des caves et des balcons, souligne Gilles Vesco, conseiller pour les nouvelles mobilités urbaines à la métropole de Lyon. Le trafic global à vélo a encore augmenté de 21 % l’année passée, rapporte-t-il. Une vraie lame de fond est peut-être en train de se former. »
> Lire aussi : Paris ambitionne d’être aussi capitale du vélo
Les vendeurs de vélo remplacent les concessions auto
Quelques signes ne trompent pas, comme la multiplication des points de vente. Les belles mécaniques rutilent toujours dans les vitrines de l’avenue du Maréchal de Saxe, paradis des motards, au centre de Lyon. Mais certains concessionnaires sont allés vrombir en périphérie de la ville.
Et les vendeurs de vélo ont pris leur place. « Huit magasins dédiés au vélo de ville ont ouvert leurs portes ces dernières années, comptabilise Alexandre Karsenty, patron de Lyon cycle chic. C’était impensable il y a dix ans, quand il ne se vendait que des vélos de route ou des VTT. »
Désormais, 7 % des déplacements à Lyon s’effectuent à vélo, selon Gilles Vesco. Au point que des bouchons se forment au petit matin sur certains grands axes. Comme sur l’avenue conduisant à la Part-Dieu, qu’emprunte Guilhem pour rejoindre son travail.
« Cinquante-cinq minutes aller-retour », calcule ce chercheur dans une start-up de biotechnologies, qui a acheté son vélo au retour d’une mission humanitaire au Nicaragua. « Par convictions écologiques », explique le trentenaire converti aux magasins bio, qui désespère du mauvais bilan carbone de son appartement de la Croix-Rousse.
La voiture donnée par ses parents dort au parking. « Nous ne la prenons qu’une fois tous les quinze jours, au mieux », rapporte ce père de deux enfants.
> Lire également : cobusiness.fr : l’Atelier Dynamo: le recyclage pour des vélos accessibles à tous et en bon état!
« L’usage du deux-roues n’est plus le seul fait d’étudiants sans le sou »
Ses collègues ne sont pas tous animés des mêmes convictions. Pourtant, dans le garage de la société, ils sont une douzaine sur quatre-vingt à arriver en pédalant, été comme hiver, bravant la pluie s’il le faut. Les beaux jours, jusqu’à un quart des salariés les imitent. « L’usage du deux-roues a vraiment changé d’échelle, observe le patron de Lyon Cycle chic. Il n’est plus le seul fait d’étudiants sans le sou ou d’environnementalistes. Les gens font tout simplement le constat qu’ils gagnent du temps dans leurs déplacements quotidiens. »
C’est le cas de Guillaume, qui vient de poser son vélo contre la vitrine de Lyon Cycle chic. Cet ingénieur en mécanique a fait ses calculs. « Je mets vingt minutes avec les transports en commun pour me rendre au bureau et moins d’un quart d’heure à vélo, dit-il. Pour l’école et la crèche, c’est encore mieux. Je n’ai aucun mérite, sourit-il. La voiture est un cauchemar. Il faut l’entretenir, la garer. L’enfer. »
Désormais, il fait aussi ses courses à vélo. Ce « mode de vie » est tellement ancré dans la famille que Guillaume a aussi acheté un vélo équipé d’une capsule confortable à l’avant pour pouvoir y blottir ses enfants.
Un investissement auquel il consent d’autant plus facilement désormais que la voirie est équipée. « Même si c’est loin d’être parfait », commente-t-il.
> Lire également : Le sport marque des points dans les entreprises
A Lyon, se déroulent 614 kilomètres de voies cyclables
Timidement, Lyon commence à instaurer des double sens cyclables et à planter des panneaux autorisant à tourner à droite aux feux rouges. La ville compte désormais 614 kilomètres de voies cyclables, 10 000 arceaux à vélo et 1 500 places sécurisées aux abords des gares et des parkings relais.
« Cela a été obtenu sous la pression citoyenne, affirme Geneviève Laferrère. Les élus ont dû répondre à l’augmentation de la pratique chez les cadres supérieurs et les professions intermédiaires. En revanche, les ouvriers, pour lesquels ont été créées les premières pistes cyclables reliant les usines à l’est de Lyon, ne se sont pas encore convertis. »
En effet, « pour les classes populaires, très attachées à la voiture, revenir au vélo, c’est déchoir, estime l’économiste Frédéric Héran, maître de conférences à l’Université Lille 1. À Lille, les vélos en libre-service sont empruntés cinq fois par jours en moyenne. À Tourcoing, ville plus populaire, seulement une fois tous les trois jours. »
> Lire aussi : Tourisme, habitat, automobile, travail, les mobilités de demain…
Même si le vélo attire aussi pour son accessibilité. Les moins de trente ans représentent d’ailleurs la moitié des usagers du Vélo’v. « À l’autre bout du spectre, seuls 2 % des utilisateurs ont plus de soixante ans », regrette Gilles Vesco. L’élu compte sur l’électrification prochaine des Vélo’v pour atteindre l’objectif de 10 % des déplacements à vélo à Lyon à l’horizon 2020.
-----------------------------------------------------
En France, 14 000 kilomètres aménagés pour les cyclistes
Alors qu’en milieu urbain, plus de 80 % des déplacements sont inférieurs à 5 kilomètres, seuls 2 % s’effectuent à vélo, estime le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement). Mais en dix ans, cette proportion a progressé dans la plupart des villes françaises.
14 000 kilomètres de voiries urbaines sont désormais aménagés pour les cyclistes. Il n’y en avait que 6 000 en 2008.
Une quarantaine de villes proposent un système de vélos en libre-service, contre deux seulement en 2008. La France est le pays comptant le plus de vélos en libre-service par habitant.
BÉNÉVENT TOSSERI (à Lyon)