Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Le « Journal d’Anne Frank » restera hors du domaine public
L’œuvre de la jeune fille juive allemande répond à plusieurs exceptions juridiques.
En France, comme dans de nombreux autres pays, le célèbre Journal d’Anne Frank restera protégé soixante-dix ans après la mort de son auteur, sa publication demeurant soumise à autorisation préalable du Fonds Anne Frank de Bâle. Dans un communiqué transmis au magazine Livres Hebdo, l’organisme explique cette exception au droit de la propriété intellectuelle.
Ou plutôt faudrait-il dire ces exceptions, tant les différentes éditions duJournal relèvent d’articles spécifiques du code de la propriété intellectuelle (CPI). Car c’est sans doute un des aspects les plus intéressants de cette situation juridique : nous rappeler l’histoire chaotique de cette œuvre, faite de multiples écritures et publications.
TROIS VERSIONS POUR UNE TRAGÉDIE
Fin 1942, à l’exception de quelques feuilles vides, Anne Frank achève son premier journal commencé en juin de la même année. Ces textes du journal originel constituent la version A.
Au printemps 1944, Gerrit Bolkestein, membre du gouvernement néerlandais en exil à Londres, appelle la population néerlandaise à conserver les journaux tenus pendant l’Occupation. Anne décide alors d’écrire un roman à partir de ses premières notes pour le publier plus tard. Du 20 mai 1944 jusqu’à son arrestation dix semaines plus tard, elle reprend ces premiers textes qui constituent la version B.
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Après l’arrestation de la famille Frank, Miep Gies rassemble les textes qu’elle réussit à trouver avec l’aide de Bep Voskuijl. Un an plus tard, elle les remet à Otto Frank, seul survivant de la famille, qui compose la première édition. Cette version C reprend des passages des premières, toutes deux incomplètes.
LES PREMIÈRES ÉDITIONS SONT DES ŒUVRES COMPOSITES
En 1947, deux ans après le décès tragique de sa fille, Otto Frank publie Le Journal d’Anne Frank en néerlandais. L’ouvrage est traduit en plus de soixante-dix langues, et en français chez Calmann Lévy en 1950. Plusieurs autres éditions paraîtront ensuite, fondées sur les écrits originaux de la jeune auteur ou sur les travaux de l’écrivaine allemande Mirjam Pressler.
Toutes ces versions, dont les droits appartiennent également au Fonds Anne Frank, correspondent à la catégorie « d’œuvre composite », créée à partir d’œuvres existantes, sans que les auteurs aient collaboré entre eux pour la réaliser. À ce titre, selon le CPI, elles ne rejoindront le domaine public qu’à partir du moment où l’ensemble des œuvres qui les composent s’y trouveront, 70 ans après la mort de leurs auteurs respectifs. Otto Frank étant décédé en 1980 et Mirjam Pressler vivant toujours, elles sont encore protégées pour longtemps.
LA PUBLICATION DU JOURNAL SIGNÉE D’ANNE FRANK DATE DES ANNÉES 1980
Le Fonds Anne Frank précise que les versions « telles que réalisées par Anne Frank elle-même n’ont été publiées que dans les années 1980 », soit 33 ans après son décès. À ce titre, elles bénéficient du régime des « œuvres posthumes » et « du régime antérieur plus favorable ne faisant courir la durée de protection de 50 ans qu’à partir de la date de la première publication ».
Actuellement, les seules éditions autorisées dans leur traduction française (par ailleurs elles aussi protégées) sont disponibles chez Calmann-Lévy et au Livre de poche.
BÉATRICE BOUNIOL