Avec Joseph, l’âne et des provisions de route, nous sommes partis de Nazareth nous faire recenser à Bethléem, la cité de David, car Joseph est de sa lignée*. Je suis bien ronde, sur le point d’accoucher. La marche à pied m’épuise, celle à dos d’âne risque de déclencher à tout moment le travail avant l’arrivée en ville. Nous n’en sommes pourtant pas loin, j’ai hâte d’arriver, mais, à défaut d’avoir trouvé place pour dormir, nous devons faire halte dans un champ pour la nuit. Joseph est tout prévenant pour me préparer une couche confortable avec les moyens du bord.
Vers minuit, les contractions me faisaient voir la lune danser. La nuit était douce, le silence était enveloppant. Je n’ai pas eu à pousser, juste le laisser passer… Il ne m’a pas fatiguée, il s’est frayé lui-même son chemin comme s’il avait attendu minuit. Son cri s’est fait entendre. Joseph a vidé sa gourde, nous l’avons lavé, langé.
Je l’ai bercé dans mes bras et Joseph, les larmes aux yeux, chantonnait à voix basse : « D’heureuses paroles jaillissent de mon cœur quand je dis mes poèmes pour le roi d’une langue aussi vive que la plume du scribe ! Tu es beau, comme aucun des enfants de l’homme, la grâce est répandue sur tes lèvres : oui, Dieu te bénit pour toujours. »**
C’est vrai qu’il est beau, le fruit de mes entrailles. Fruit de la Parole. Parole en chair et en os. Regardez-le, prenez-le dans vos bras… Dites-lui quelque chose, faites un vœu, rendez grâce et, avec moi, chantez en chœur : « Mon âme exalte le Seigneur ! Exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur ! »
*Évangile selon saint Matthieu ch. 1, v. 16.
** Psaume 44, 2-3.