Le cahier Livres de Libédossier
Dans «Autoportrait aux fantômes», son huitième roman, l’écrivain parcourt Paris en quête d’une réalité disparue.
Les livres de Didier Blonde sont tous marqués par le sentiment de peu de réalité que constatait André Breton. Au présent il préfère l’impalpable passé, au réel, ses défaillances, à la présence, le manque. Il est d’une génération qui a appris à lire dans Beckett, Blanchot, Borges, Perec ou plutôt qui a pris tout ça en bloc sur la tête, et débrouille-toi avec… Autoportrait aux fantômes, son huitième, poursuit un voyage.
Didier Blonde a tracé son chemin dans un monde qui lui a détruit peu à peu tous ses repères. Ses cinémas, le Gaumont Palace, place Clichy, monument assyrien abandonné aux démolisseurs. L’écran était à la dimension de la salle de six mille places. On y a projeté la Conquête de l’Ouest de John Ford en 1963 sur trois écrans qui enfermaient les spectateurs dans la fiction. Son ciné avait été fermé trois jours avant, c’était le Régent, avenue de Neuilly : c’est là qu’une passion est née, qui l’a vu tour à tour projectionniste au lycée et parfois figurant dans quelques films où ironiquement il est quasiment invisible. Là aussi que son père, étonnamment silencieux depuis toujours – ou plutôt depuis son retour du stalag – l’emmenait le samedi soir voir les Fantômas d’André Hunebelle coincés entre les actualités et le court-métrage. Son 6/6 – une imitation du coûteux Rolleiflex – autour du cou, il a commencé à se bricoler une réalité mais s…