Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Deneuve et Truffaut, secrets partagés(j'ai l'article papier en entier)
Deneuve et Truffaut, secrets partagés
SÉRIE« Catherine Deneuve, derrière l’écran » (4/6). L’actrice et le réalisateur avaient noué une relation particulière, notamment pour l’inoubliable « Dernier Métro », en 1980. Un film où affleurent, sans que le public s’en rende compte, des silences communs.
« Dans cette histoire, tout le monde a quelque chose à cacher. » C’est ainsi que François Truffaut a résumé pour Catherine Deneuve Le Dernier Métro, en lui tendant son scénario. Il en a écrit l’intrigue avec sa complice Suzanne Schiffman, à l’été 1979, et il sait très bien qu’en lisant ces quelque 300 pages, parfaitement dialoguées, l’actrice en devinera toutes les allusions et les clés.
Truffaut n’a pas seulement imaginé le rôle de Marion Steiner pour elle. Il a puisé dans sa propre histoire mais aussi dans celle de l’actrice, au cœur de la famille Dorléac, de quoi nourrir ces personnages projetés en 1942, dans le Paris occupé. Qui le sait ? Le cinéaste n’en a parlé ni à ses proches ni, surtout, à la presse. Seule Catherine doit pouvoir comprendre les indices qu’il a déposés tout au long de son récit. Ce sera leur secret intime, dans cette histoire qui n’en manque pas.
Le tournage du Dernier Métro doit débuter le 28 janvier 1980, et Truffaut a déjà imaginé d’en bannir la lumière du jour : l’Occupation et ses ambiguïtés ne s’accordent qu’avec la nuit. L’action débutera par l’arrivée de Bernard Granger, que doit jouer Gérard Depardieu, au Théâtre Montmartre où se monte une nouvelle pièce, La Disparue. Il est engagé par Marion Steiner (Catherine Deneuve). C’est elle qui a repris la direction de l’établissement depuis que son mari, le metteur en scène juif Lucas Steiner, interprété par l’Allemand Heinz Bennent, a fui le nazisme en Amérique du Sud. En vérité, Steiner se dissimule dans la cave, juste sous la scène.
Le film doit fonctionner comme une série de poupées russes : Marion Steiner cache son mari ; Bernard Granger, son engagement dans la Résistance ; le metteur en scène, Jean-Louis Cottins (Jean Poiret), planque son homosexualité ; la jeune première, ses amours avec l’habilleuse ; la fille qui fait du marché noir, ses coucheries avec des officiers nazis. Le Dernier Métro, c’est le monde des doubles vies et des doubles jeux, un univers de mensonges obligés dans une période où la vérité peut tuer.
Le film lui-même est double. Il y a celui que l’on voit à l’écran ; et l’autre. Dans ce dernier, Lucas Steiner (le mari caché) est le porte-parole de Truffaut. « Qu’est-ce que c’est avoir l’air juif ? », questionne le metteur en scène confiné dans sa cave.
La question taraude le cinéaste depuis qu’il a retrouvé, en 1970, la trace de son véritable géniteur. Ce n’est pas l’architecte Roland Truffaut, comme il l’a cru jusqu’à l’âge de 12 ans, mais Roland Lévy, un dentiste contraint d’abandonner son cabinet parisien pour fuir, en 1941, les lois du régime de Vichy sur le statut des juifs. C’est là l’un des tiroirs secrets de son scénario. L’autre concerne Deneuve.
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