Recueil de poèmes en hommage aux deux auteurs
Le temps des illusions
- Etude | broché | Editions Fayard | février 2012
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J'ai lu un hors série de Télérama qui porte ce titre mais je n'en ai pas trouvé le texte sur le web alors je vous propose de parcourir une partie de l'exposition que la BNF a consacrée à "L'esprit des Lumières":
Dès la première moitié du XVIIIe siècle, surgissent partout en Europe des idées nouvelles qui, à travers la métaphore de la lumière évoquent le passage de l’obscurantisme à une pensée et une action libres, éclairées par la raison, qui est donnée en partage à tous les hommes de la terre.
Il faut secouer le joug de l’autorité et "oser penser par soi-même" (Diderot).
"Aie le courage de te servir de ton propre entendement ! Voilà la devise des Lumières" (Kant).
Le mouvement des Lumières n’a pu s’engager qu’à l’intérieur du cadre européen, il a en même temps contribué à le constituer : "Il n’y a plus aujourd’hui de Français, d’Allemands, d’Espagnols, d’Anglais même, quoi qu’on en dise ; il n’y a que des Européens". (Rousseau).
Aufklärung en Allemagne, Illuminismo en Italie, Enlightenment en Angleterre : la pensée des Lumières joue un rôle fondateur de la conscience européenne. L’Europe des Lumières est un espace à la fois un et multiple, où circulent librement les idées.
En même temps, la pensée des Lumières est portée par des individus qui, loin de se sentir d’accord entre eux, passent leur temps en âpres discussions. Les Lumières naissent de cette confrontation. Emerge toutefois un esprit commun où s’affirment la liberté de l’individu et la souveraineté du peuple
De nouveaux principes régulateurs accompagnent cette émancipation de la volonté : les hommes, appartenant à la même espèce, possèdent des droits inaliénables ; à travers leurs actes, ils recherchent le bien-être humain.
La chronique de Jacques Julliard
D'une révolution l'autre
Bien avant que la tête de Capet ne roule au pied de l'échafaud, les Lumières avaient jeté bas les valeurs de l'ordre ancien. Les idées neuves se nommaient : science, raison, liberté de conscience, progrès
L'Ancien Régime intellectuel n'a pas pris fin en 1789 mais en 1715. Dans les trente-cinq années qui précèdent la mort de Louis XVI, remarque Paul Hazard dans un livre classique, on assiste à un basculement sans précédent par sa radicalité et sa rapidité de toutes nos manières de penser. Tout à coup, la hiérarchie, la discipline, l'ordre, l'autorité, les dogmes s'effacent devant des valeurs nouvelles qui se nomment science, raison, liberté de conscience. C'est sans doute dans le domaine religieux que le bouleversement est le plus profond, au moins pour les classes dirigeantes. Le droit divin cède le pas au droit naturel. La grande vaincue, avant la monarchie, c'est l'Eglise catholique. « La majorité des Français pensait comme Bossuet, tout d'un coup, les Français pensent comme Voltaire : c'est une révolution » (1).
Si Voltaire est la figure la plus représentative du siècle des Lumières, c'est pourtant Rousseau qui lui fournit sa forme définitive aux yeux des générations futures. Toutes les grandes passions modernes, toutes nos névroses contemporaines aussi prennent leur source dans son oeuvre : l'adolescence et la pédagogie ; les intellectuels et la sincérité ; la démocratie et l'égalité ; l'individualisme et la recherche du bonheur. Et même l'idée de progrès, ou plutôt celle de perfectibilité qu'il introduit dans le deuxième « Discours ». Mais le xviiie a trop cru à la nature pour avoir compris, à l'exception de Turgot et de Condorcet, le rôle que le progrès allait jouer au siècle suivant. A l'époque, la nature est une idée de gauche et la culture, une idée de droite. Aujourd'hui, en dépit de l'écologie, c'est l'inverse.
Exclusif. Le grand écrivain parle très librement de l'islam, de l'Orient et de l'Occident, du choc des civilisations, du métissage et du pouvoir de la littérature par Salman Rushdie
Fractures
J'ai beaucoup relu récemment les auteurs des Lumières. Le grand combat du xviiie siècle ne se livrait pas contre l'Etat mais contre l'Eglise. C'était déjà vrai de Rabelais. Or nous vivons une époque où l'on prétend censurer non seulement les idées, mais l'imagination artistique elle-même. C'est encore pire qu'au Siècle des Lumières, où l'Eglise se contentait d'attaquer les concepts dont l'expression lui paraissait hérétique. Aujourd'hui, même les histoires que l'on raconte, et la façon de les raconter, sont menacées de censure. C'est moins leur philosophie que l'acte de création même qui est remis en cause. A l'époque, le pape se souciait peu de savoir si Diderot était un bon ou un mauvais écrivain : ce qu'il contestait, c'était le contenu de « la Religieuse ». Si les idées des Lumières demeurent plus que jamais pertinentes, il existe une différence majeure entre notre époque et le xviiie siècle : en ce temps-là, les écrivains pouvaient supposer que de nombreux lecteurs partageaient leurs conceptions, habitaient le même univers, comprenaient leur vision du monde. Aujourd'hui, on constate une prolifération de visions du monde inconciliables, qui se disputent le même espace.