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andré

  • Catégories : L'art

    André, le roi de la nuit, est un petit prince

    Pourtant, sa conversation le pousse plus volontiers à évoquer sa prochaine exposition de dessins chez Colette (des villes imaginaires, façon Litlle Nemo), son penchant pour le cimetière Montparnasse qu'il traverse régulièrement, les librairies de livres anciens. La nuit ? Cet enfant de révolutionnaires portugais devait avoir 13-14 ans lorsqu'on le retrouvait endormi sur les banquettes des Bains Douches. Il y «graffait» à tour de bras. Des milliers, des centaines de milliers, 300 000 Monsieur A, ces fameux bonshommes roses au regard asymétrique. Cela lui vaudra beaucoup d'adrénaline (il en faisait 50 par jour, il continue parfois), des ennuis avec la maréchaussée (le voilà en sursis), une jolie gloire et une âme suffisamment grande pour en avoir vendu un petit bout. Son logo a été sanctifié dans le branding, une marque glissant d'un Leica, à une planche de skateboard, en passant au Japon et les «art toys» (porte-monnaie…), le portable Mitsubishi ; chez Casino sur des parasols, des sacs de plage.

     

    «Il faut pousser le Parisien»

    La fortune de ce Monsieur A le fera basculer vers le Baron, qu'il crée avec des amis en 2003, histoire d'en finir avec une nuit verrouillée par l'argent : «On voulait juste sortir de ce ghetto de stupidité et de vulgarité dominé par les footballeurs, les présentateurs de la télé, les Ferrari et les pauvres mannequins de l'Est.» Juste ses amis. Toujours la même bande : Olivier Zahm, Natacha Ramsay, Camille Bidault-Waddington, Olympia Le-Tan, Paul de Sevigny, Jean Touitou… On les retrouve sur le blog du premier nommé (purple-diary.com), la meilleure façon pour André de savoir où il était la nuit précédente. «Comment résiste-t-il à ce monde rêche ? s'interroge Olivier Zahm, parce qu'il a su établir des garde-fous contre le vertige de ce milieu. Il a ses amis, sa vie professionnelle et familiale. À la limite, le seul moment où André prend des risques, c'est en prenant son scooter à 10 heures du matin.» André aime faire plaisir. C'est quelqu'un de fort courtois et si vous voulez lui faire dire que le monde de la nuit est superficiel, il en conviendra volontiers. Mais n'y croira pas une seconde. «Ce que la vie refuse le jour, elle l'accueille la nuit. Les gens sont désinhibés, ils passent à autre chose et c'est bien souvent au cœur d'eux-mêmes.». André parle de tout cela avec la tendresse ironique de ceux qui partent sans arrêt ailleurs, comme par survie. Non point par évitement mais comme entraîné par cette étreinte molle, celle de Paris : « Il faut pousser le Parisien car il est trop critique, toujours insatisfait, pas entrepreneur. »

    André n'est, semble-t-il, pas encore satisfait. Il voudrait encore plus de reconnaissance (pas compliqué), et d'amour. Les seules choses qui le font courir. Une petite fille (Henrietta, 2 mois et demi) devrait commencer à combler ce manque. Mais sa jouissance est ailleurs. Il aime refuser du monde lorsque sa boîte est vide, fermer le soir de réveillon alors que ses concurrents font la recette de l'année, commander ses chemises chez Charvet. La nuit ne l'a pas encore mangé. Il a encore probablement des hymnes imprimés sur ses oreillers : «I Cant Get No Satisfaction.» La suite est sa vie : «and I try, and I try».

     

        http://www.lefigaro.fr/sortir-paris/2010/12/31/03013-20101231ARTFIG00012-andre-le-roi-de-la-nuit-est-un-petit-prince-.php